Nous ne surprendrons personne en disant que l’album Lunatic de Booba était le plus attendu de l’année 2010. Ces hordes de fan qui le décore d’or à chacune sortie lui assure un succès intégral. En 45 jours, il a déjà tapé le platine et il est loin d’avoir fini. Analyse de l’autoproclamé « classique ».
La couverture.
Sur un fond noir et ses reflets gris, Booba la joue sobre et cohérent. Sobre voire même modeste car après trois albums où nous le voyions tout biceps dehors, cette image respire l’humilité. Cohérent car la pochette fait forcément référence à Star Wars, ce film de George Lucas qu’il n’arrête pas de citer par le biais de Yoda (Fast Life – « Maître Yoda, celle-ci est pour toi ») et Luke (Lunatic, « j’ai le short de Hulk, la force de Luke »). Dans la symbolique de l’image, être tourné vers la droite c’est regarder l’avenir. Booba et son seul œil visible brillant semblent guetter le futur avec détermination et sérénité.
Le flow.
B2O est très ambivalent. Il peut être pathétique sur un morceau puis génial sur le suivant. Quand il débite son texte dans l’urgence, il est très fort mais s’il s’aventure sur des concepts à la limite du raisonnable (Jimmy Deux-Fois), la rédaction est obligé de dire non. Pour preuve de cela, il suffit de faire une petite expertise. Sur le très bon morceau Ma Couleur, il rappe trois couplets en 106 secondes et il place 346 mots hors refrain (3,26 mots par seconde). Dans la même veine, sur Paradis, il débite 330 mots en 109 secondes de couplet (3.02 mots par seconde). A l’exact inverse, sur Jimmy Deux-Fois, en 113 secondes il ne place qu’un total famélique de 259 mots (2.29). Et pour étayer notre propos, nous pouvons rajouter le single Caesar Palace sur lequel il rappe exactement 308 mots en 118 secondes (2.6). Evidemment, l’adage de la quantité qui ne fait pas la qualité est toujours d’actualité. Sauf que pour cet opus du rappeur de Boulogne, l’impression est très nette et se confirme. Les meilleurs morceaux sont ceux qu’il pulvérise.
Les instrumentaux.
A l’américaine serait la première de nos remarques. Mais il est évidemment impossible de mettre tout le hip-hop US dans le même doggy-bag. Pourtant, il est clair que Booba et ses beatmakers sont influencés par ce qu’il se fait en ce moment outre-Atlantique. Un mal ou un bien ? Chacun se fera son idée. Notre remarque sur l’auto-tune trouve sa place ici car il fait partie des gadgets électroniques. Utilisé avec parcimonie, l’impression peut être positive. Mais un album truffé de voix métalliques vaguement justes, est à la limite du supportable. Nous avons relevé neuf pistes incluant de l’auto-tune (Ma Couleur – Killer – Lunatic – Si tu savais – Comme Une Etoile – Réel – Mé-ca et Fast Life) ce qui donne un pourcentage de 47. Trop, beaucoup trop.
Les textes.
Après plusieurs écoutes, le constat est sans appel. Lunatic est bien un album de Booba. Et loin d’être un compliment, cet argument montre bien les limites de l’artiste. Comme dans ses sorties précédentes, il alterne entre le bon et le ridicule. La rédaction a pris des notes à chaque piste et le résultat est sans appel. 13 des 19 morceaux sont suivis de la mention « rimes confuses et décousues ». Et comme rien ne vaut mieux qu’un bon exemple, en voici plusieurs. Sur Les Derniers Seront Les Premiers, il dit « et les vrais négros le savent / concert a guichet fermé, sur bateau d’esclave. » Sur Réel, c’est l’incompréhensible: « J’attaque au bélier / Je n’attends pas le pont levis » qui nous a donné un haut-le-cœur. Il y a pléthore d’exemples pour les rimes mais une mention devrait être offerte à certaines punchlines particulièrement imbuvables. En vrac : « B20BA, fils du soleil, tu es fils de lanterne », « Pour m’endormir je compte les diamants sur ma Breitling », « pas encore de marmots, car je crache dans la bouche », « Arrête tes salades, je ne mange que de la barbaque », « Je suis un film d’horreur, t’es qu’un affreux jojo », « Je rappe depuis l’Everest, je rappe depuis tes fesses », « quand tu m’attaques je L.O.L smiley face », N’en jetons plus, vous aurez compris l’idée.
Pourtant, tout n’est pas à jeter. L’opus est traversé de fulgurance d’une beauté rare. Quand sur Ma Couleur, Booba rappe « Ronce du bitume, je ne fane pas », nous ne pouvons qu’applaudir des deux mains. Même constat pour la rime suivante : « J’ai su me tirer d’affaires, ils ont voulu ma peau / Crapaud devenu prince, cheval cabré sur le capot». Même si encore une fois, il use sa plume pour son penchant consumériste, la formule est parlante, imagée et bien trouvée. « Libéré de mes entraves, me venger comme un Troie / J’ai couru comme un esclave, pour marcher comme un Roi » fait aussi partie des meilleures phases de l’album. La dernière, celle qui nous a le plus ébahi, est une métaphore posée sur le morceau Paradis : « J’affronte les péripéties, intempéries de la vie ».
Mais le boulonnais manie aussi l’humour. Parfois habilement, souvent grassement comme avec cette punchline implacable : « Si tu me vois enculer ta dinde, ne crois pas que je fête Noël. » On peut ne pas approuver mais la drôlerie est là. Il place une comparaison plutôt bien sentie sur Abracadabra : « t’as rien dans l’ cerveau, comme la police de proximité ». Deux autres exemples sur le thème chevaleresque : « tu veux t’asseoir sur le trône, faudra t’asseoir sur mes genoux » et « Je n’suis pas chevalier car il fallait mettre genou à terre ».
Les références.
Assez appréciable et plutôt étonnant, l’album est serti de références plus diverses les unes que les autres. Quand Djé place, sur le morceau « Mé-ca », la phrase : « pour parcourir le monde comme Phileas », il fait évidemment allusion à Phileas Fogg, le héros de Le Tour du Monde en 80 Jours, de Jules Verne. Pareillement, sur la piste Boss Du Rap Game, Booba dit : « B2OBA brolic and roses ». Il fait référence au groupe de hard-rock américain Guns & Roses, mené par Axl Rose.
Plus surprenant encore que cette minuscule connexion rap/rock, l’album est truffé d’allusions religieuses. En effet, le premier titre de l’opus est sans équivoque puisqu’il s’intitule Les derniers seront les premiers. On pourrait croire la référence biblique purement fortuite mais Elie Yaffa ne laisse aucune place au hasard avec la première sentence de l’album « Déchaine les enfers ». Et ce n’est pas tout, l’album est truffé de divinité. Ainsi, sur Ma Couleur, il dit clairement « Miséricorde envers mes ennemis, je ne l’ai pas » et sur Kojak : « Miséricordieux est dieu le père ».
Sur Jour De Paye, c’est à l’Islam qu’il s’attaque puisqu’il décline Booba comme si c’était un acronyme, ce qui donne dans sa bouche et sous sa plume : « Beta – Omega – Omega – Beta – Alpha ». L’acronyme d’Allah est en anglais: Arm – Leg – Leg – Arm – Head et il est beaucoup utilisé dans le rap américain et anglais. Les deux structures ont la même colonne vertébrale ( x – y – y – x – z). C’est sans surprise qu’on le retrouve chez RZA, le Wu-Tang et la traduction française chez… Lunatic dans plusieurs morceaux (Avertisseurs, Diaspora d’Afrique). Ce n’est donc pas une coïncidence et l’égocentrisme de Booba l’emmène jusqu’à des hauteurs insoupçonnées.
Sur Paradis, c’est plutôt en martyr sur l’autel du rap qu’il se voit quand il dit : « Mon rap a été crucifié à en devenir Christ ». Dans 45 Scientific, la référence à Jésus est replacée différemment par le featuring Dosseh : « Ils ont tué le Christ, combattu le Prophète donc moi, combien de fois ?» Le Christ, encore lui, revient sur Boss Du Rap Game quand Elie dit : « Laisse-moi porter ma croix ». Sur Saddam Hauts D’Seine, c’est encore plus clair : « Je rappe depuis le ciel. » Plus loin dans l’album, c’est encore de la Bible qu’il parle quand il rappe : « Centre de Lucifer, tête et but de Belzebuth. » Et il clôture quasiment son opus par une rime peu amène : « va t’ faire enculer par l’ diable ».
Alors Lunatic sous le signe de la religion ? Pas vraiment non. Ou alors Booba a une conception de celle-ci iconoclaste puisque son album contient 73 propos vulgaires ou injurieux… Loin de servir ses propos, ses insultes le décrédibilisent. Il n’est que plus facile de le caricaturer.
Les thèmes.
Parce que loin de se renouveler, Booba flirte avec le copier-coller. C’est tout juste si les amateurs ne s’extasient pas de le voir centrer une chanson (Killer) sur une seule femme. Les choix du rappeur sont inlassablement similaires à ceux des précédents albums. On pourrait même résumer à sexe+fric+ego. Ce trident revient en vrac sur toutes les pistes. Tel un môme, l’impression qu’il reste, c’est que le boulonnais a du mal à se concentrer et fait partir son écriture dans tous les sens possibles. Ainsi, sur Abracadabra, il abonde dans notre sens en disant : « j’ rappe sans thème » mais aussi sur Kojak quand il définit sa musique comme un « Puzzle de mots et de pensées dans ta putain de sono ». Nous pourrions définir cette galette comme un vaste foutoir, plein de rimes décousues, sans aucun rapport avec la précédente. Il est quasiment impossible de ressortir une idée concrète après l’écoute de la plupart des morceaux. Et son penchant pour l’argent qu’il fait ressortir à tous les sauces finit par produire un effet vomitif.
Conclusion.
Pour finir, permettez-nous de faire une suggestion ? Est-il possible de ressortir une version allégée de cet album ? Un EP de quatre titres serait amplement suffisant. Nous y mettrions les très bons Ma couleur, Lunatic, Comme Une Etoile et Paradis. N’est-il pas étonnant de constater que Booba, finalement, n’est très fort que quand il rappe uniquement sa vie ? Forcément, nous comprenons qu’il arrive assez vite à bout de matière.
BONUS, une grosse punchline sur Top Niveau : « cousin t’as l’flow d’une chèvre ou d’un pain au raisin ». Ça se passe de plus de commentaires.
Tssss, dès qu’on s’en prend à Booba faut s’attendre à se faire lyncher ^^
Moi j’suis d’accord avec la chronique, « « cousin t’as l’flow d’une chèvre ou d’un pain au raisin » », ça résume son niveau actuel (ce qui ne veut pas dire que je n’écoute pas de Booba par ailleurs).
Salut Faddy Bazz ! Tout d’abord, merci d’avoir pris le temps de nous écrire surtout en construisant ta critique. Je vais te répondre très honnêtement, nous n’avons appris que trop tard qu’il disait kheneze et ce passage vient d’être retiré de l’article mais nous assumons l’erreur.
Pour le second point, nous ne confondons pas le sens du mot acronyme puisqu’il est écrit « comme si c’était un acronyme ».
Ensuite, nous avons très bien compris la phrase à laquelle tu fais référence, merci pour nous mais ça n’empêche que nous la trouvons catastrophique.
Pour les erreurs de grammaire que tu signales dans la couverture, j’aimerais que tu en dises plus parce que même comme ça, je ne vois pas.
Chacun son avis sur les analyses, aucun problème avec ça et nous apprécions celle-ci. Je répète encore une fois que nous n’avons rien contre Booba (Pitbull est, à titre personnel, mon morceau de rap français préféré) mais que cet album est plus que médiocre.
Pour conclure, si chacune de ses punchlines est explicable alors je veux bien que tu éclaires ma lanterne sur certaines !
En toute amitié, nous te remercions de ton passage. A bientôt l’ami !
Ps: aucunes de ses punchlines n’est pas explicable.
Tout d’abord je ne vois pas ce que les rennaises ont à faire dans un texte de booba sisi tendez l’oreille jeune padawans
« Fuck you fuck la France fuck Dômenech, c’est pas Pas du rap de fils de Kheneze » ( c’est de l’arabe ^^ ça veut dire puante)
Puis votre logique sur le morceau jour de paye c’est monstrueux le raccourcit que vous prenez vous confondez un Acronyme et le fait d’épeler son nom en alphabet grec.
« Pas encore de marmot car je crache dans la bouche » ….réfléchissez ça va venir . Sinon pensez à la fin d’un film X xD, pour le reste « fils du soleil et fils de lanterne » etc faut être de la génération Y (ref:les cités d’or et Green lantern).
Bref corrigez les fautes de grammaire et d’analyse pour la couverture un 6eme aurait pu mieux écrire et vous avez pas assez de référence je pense pour faire une analyse sociomathematicopurinolinguistique sur le rappeur numéro en France depuis 15 ans et c’est pas pour rien ;).
Oui, nous nous relisons et il n’y a pas d’excuse.
Amusez-vous à compter les fautes de grammaire si ça vous fait plaisir.
Nous connaissons parfaitement la définition de la métaphore, merci.
« Après plusieurs écoutes, le constat est sans appel. Lunatic est bien un album de Booba. »
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non rien en fait, bravo, juste
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2ème ligne : « Ces hordes de fan qui le décore d’or à chacune sortie lui assurent un succès intégral. « , vous relisez vous ?
Vous qui êtes fans de statistiques, peut on s’amuser à compter les fautes de grammaire ? Les non sens ?
Je suis amusé qu’une personne ignorant la définition d’une métaphore puisse se permettre une critique pédante sur les figures de styles inventées par Booba.
« Vas y parle, mais parle en fermant la bouche » comme dit l’autre 😉
Tout simplement à gerber. L’apologie du vide qu’il nous propose depuis bientôt 10 ans. J’en viens à penser sérieusement que le génie de Lunatic ne reposait que sur Ali.
Le plus consternant est peut être qu’il fait partie de ceux qui ont contribué à démocratiser le rap, et dans le sens péjoratif. Que revendique-t-il s’il prétend avoir tout et tout le monde à ses pieds?
Vomitif le mot a été lâché, c’est l’effet qu’il me provoque. Définitivement je passe mon chemin, pour en trouver un qui saura partager et non imposer!
C’est du Booba point barre, pour certains c’est décousu et débile et pour d’autres c’est un enchaînement de figure de style, bref du rap. Le sens avec Booba est à cherché très profond, sa musique est bonne, les punchlines imagées, il fait de la revendication pour sa propre gueule et c’est le seul à le faire excessivement depuis bientôt 10 ans et sans se faire inquiéter, certains y verront un déclin du rap d’autres une performance à marquer d’une pierre blanche, je penche pour la seconde. Peace!
Sauf qu’il est tourné vers sa gauche.