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5 Sons à ne JAMAIS passer en soirée.

Aujourd’hui, c’est vendredi. Dieu merci. Et comme c’est vendredi, tu vas sans doute profiter de ta première soirée de week-end pour sortir et tu as bien raison. Tu vas probablement aller squatter le studio/l’appartement/le loft des parents de l’un ou l’une de tes potes (ou peut-être que c’est toi qui reçoit, qui sait ?!) pour passer une bonne petite soirée tranquille, boire un coup et peut-être même draguer un peu ce beau jeune homme ou cette belle jeune fille que tu as repéré dans ton amphi de mardi dernier. Seulement voilà : Il y a deux types de soirées. Il y a la soirée dépeinte dans notre sublime illustration faite sur Paint, et puis il y a la soirée où tu vas aller. Dans cette soirée de profanes, tu le sais, ton statut de fan de Rap français va être compliqué à gérer alors pour éviter le dérapage total, par pitié ne joue aucun de ces cinq sons.

Tandem – 93 Hardcore

93 Hardcore de Tandem c’est de la grosse frappe.  On a rien fait de plus puissant depuis quinze ans, et ça a tatoué le cerveau de tout ceux qui l’ont écouté au moins une fois pour l’éternité. Mais soyons honnête : tout le monde se fout des problèmes des banlieusards en soirée. Tout le monde s’en fout. Et puis il y a de fortes chances que rien de ce qui est raconté dans le son ne corresponde à ta propre vie. T’es hardcore ? T’as un gun sur toi ? Tu fais des combats de pitbull dans les caves ? Non. Alors tu mets pas 93 Hardcore. Personne n’a envie d’entendre deux gros lascardos du rap raconter la violence de la vie périurbaine, ça fait pas bouger des culs. Si tu as de la chance, l’autre amateur de rap français de la soirée prendra un air concerné en bougeant la nuque en rythme sur le beat en tirant sur son joint de shit, mais c’est tout.

Seth Gueko – Ma Couillasse

L’ambiance est détendue, tu en es à ton troisième rhum-orange, mais le fond sonore t’ennuie. Katy Perry et The Weeknd ça va cinq minutes mais là t’as envie de te marrer un peu, alors tu t’approches discrètement du PC ou de l’enceinte bluetooth et tu balances Ma couillasse de Seth Gueko. Franchement, ça aurait pu passer et te faire marrer un bon coup si tu n’avais pas, présomptueux que tu es, monté le son pour en faire profiter toute l’assistance. Bilan : ça ne fait rire que toi. Au mieux, tu devras assumer la gêne polie de tes contemporains qui n’étaient pas prêt à tant de familiarité de la part d’un inconnu à leur égard. Au pire tu sentiras la condescendance et le mépris peser un peu plus sur tes épaules chaque fois que Seth fera rimer barbichette et tartiflette et répétera le mot « couillasse ». Tu ne seras pardonné qu’après avoir fait acte de contrition en sélectionnant toi même River d’Eminem et Ed Sheeran.

Booba feat. SDHS Family – Porsche Panamera

Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse. Tu aimes quand quelqu’un vient par derrière pour te mettre une grosse claque à l’arrière du crâne alors que tu discutais paisiblement du dernier épisode de ta série préférée ? Bah voilà, alors tu mets pas Porsche Panamera du 40000 Gang. Outre le fait que la rime sur Mohammed Mehra te vaudra directement une fiche S après que l’hôte de la soirée t’ait dénoncé aux autorités compétentes, tu provoqueras immanquablement une réaction d’une violence musicale équivalente à base de Taylor Swift avec un fort risque d’avalanche de Reine des Neiges « pour déconner ». Tu veux passer une heure à écouter des classiques de Disney « pour déconner » ? NON, alors tu mets pas du 40000 Gang, sinon tu ruines la soirée pour tout le monde.

N’importe quel son d’un rappeur du 18ème arrondissement

C’est chiant. Voilà, c’est dit. Le 18ème arrondissement est connu pour deux choses : Montmartre et ses rappeurs à textes. Alors comprenons nous bien les gars, on aime les rappeurs du 18ème tout comme vous, mais au casque, chez soi. On ne va pas en soirée pour balancer 5’30  rimes riches et matures sur la vie et les difficultés à conjuguer paternité et statut d’intermittent. Et puis les prods rap avec du piano dedans sont la traduction musicale du nuage gris foncé qui te bruine à la face. Donc oublie tes meilleurs morceaux d’Hugo TSR et de Flynt chez toi. Ceci est valable, plus généralement, pour l’ensemble des rappeurs chauves et trentenaires (sauf Grems).

Avant de passer au pire son de rap à passer en soirée, nous aimerions adresser une mention spéciale à l’ensemble des couplets de l’ensemble des rappeurs ayant participé à l’ensemble des ligues de battle rap. Si Ma couillasse ou Porsche Panamera pouvaient encore passer pour une private joke un peu lourde, il est pratiquement impossible de justifier l’interruption de l’ambiance musicale consensuelle qui préside à toute soirée par un passage « battle rap ». C’est NON. Déjà parce que l’intérêt musical de ces événements est très limité en soi. Ensuite, parce que tu devras probablement passer plus de temps à chercher le bon passage qu’à écouter ledit passage, lequel est en réalité interrompu une demi-douzaine de fois par des « SAAAAAAAAAAAAAAAALE » et des « True Story !! » qui ruinent totalement l’effet. Bref, encore un classique à éviter, même si nous sommes d’accord avec toi : cette punchline pourrait figurer sur un classique de B2O.

IAM – Je dans le Mia

« You either die a hero, or you live long enough to see yourself become a villain« . Cette réplique de Batman : The Dark Knight devenue culte par son caractère prophétique n’aura jamais été aussi bien appliquée au rap français que pour illustrer ce qu’est devenu Je dans le Mia d’IAM, classique absolu et incontesté du rap des années 90. Issu d’Ombre est lumière, le deuxième album (double) du collectif marseillais, Je dans le Mia est malgré lui devenu le symbole d’un avant fantasmé et funky. Cet avant où le rap était meilleur, les choses plus simples et la vie moins chère. Bref, Je dans le Mia est devenu l’équivalent des Démons de minuit ou de La danse des canards pour toute une génération, dont le gros de l’effectif n’était pas encore à l’école primaire lorsque sortait le hit ultime de la G-funk française. Je danse le Mia est désormais un incontournable de la fin de soirée qui dégénère, que ce type à qui tu n’as pas parlé depuis que tu es arrivé balancera sans aucun complexe en disant « ça c’était du bon rap » alors que sa playlist quotidienne se compose principalement de groupes de post-punk peroxydés du début des années 2000 et des plus grosses têtes d’affiche du Tomorrow Land d’il y a trois ans.  Voilà, il est temps de laisser mourir le Mia, avant qu’il ne se transforme en monstre absolu, vidé de tout ce qui faisait son intérêt autrefois, cela devait être dit une bonne fois pour toutes.

Jacques Bonoberje

À proposJacques Bonoberje

J'ai découvert le rap français au Tegzas. Absolument.

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