Interviews Rappeurs

[Interview] A2H : « J’ai un message d’amour à passer. »

On entend souvent dire que le premier album d’un rappeur est le meilleur, parce que le plus instinctif, le plus vrai, et on est souvent plus critique sur un second projet ; d’ailleurs, combien de nos classiques – surtout de l’autre côté de l’océan, en réalité – sont des premiers albums ? Tradition un peu vieillote, probablement due au fait que trop de légendes n’ont pas eu le temps de sortir un second album de leur vivant – Christopher Wallace, Christopher Lee Rios, et beaucoup d’autres qui ne s’appellent pas tous Christopher. Quoi qu’il en soit, ce troisième album d’A2 putain d’H, est en réalité son premier*, le meilleur, et déjà un classique ici. Du coup, on est allé lui poser deux-trois questions sur Libre, tranquille au calme au bunker 105 !

*explication dans une dizaine de lignes à peu près !

D’abord, simplement pourquoi ce titre Libre ?

En fait, Libre, c’est une recherche. C’est un mec qui est en quête de liberté, dans le monde d’aujourd’hui, et qui veut savoir comment faire pour être le plus libre possible ; donc ça passe par tout mon quotidien, que ce soit le sexe, la foncedé, la famille, les amis, les échanges, les rencontres, la musique… j’exprime un peu tout ça, ce à travers quoi moi j’essaie de trouver cette liberté, pour arriver au final à une conclusion qui est que c’est quasiment impossible.

C’est ce que tu dis à la fin de l’album.

Exactement. On essaie d’être libre un maximum, tu vois.

L’album paraît dans l’ensemble plus gai, rien qu’au niveau de la cover déjà, quasiment immaculée, contrairement à celles d’Art de Vivre et Bipolaire, plus sombres, c’est une idée de toi ? T’as taffé ça avec qui ?

C’est une idée de moi, et d’une meuf qui s’appelle Stephany Hildebrand, une photographe de Montréal, on avait envie d’exprimer cette recherche de liberté, je voulais quelque chose de lumineux, parce que c’est quand même une quête vers un truc assez positif, mais je voulais qu’il y ait un rattachement avec le fait que c’est dur d’y arriver, d’où la compo avec la chaîne et tout… Après, c’était aussi pour détourner les codes un peu bling-bling et les mettre au service d’autre chose.

Avant la sortie de l’album, t’avais sorti un freestyle (En quête de liberté) dans lequel t’expliquais que là, tu arrives à faire ce que t’as toujours voulu faire, et que c’est ton vrai premier album. Tu peux rappeler le concept ?

En fait, moi je pars du principe que je fais une musique de qualité, et que du coup, les deux premiers albums, c’était trop péjoratif de les appeler mixtape. C’est pas ça une mixtape. Downtown Street Tape, ou la Kushtape, ça c’était des mixtapes ! Et moi, le terme street album me convient pas, dans le sens où j’ai pas l’impression que les premiers albums soient particulièrement street. Au contraire, les mixtapes sont plus street que les albums, et du coup je me suis dit que c’était des albums. Après, j’ai fait des tentatives dessus tu vois, on essaie des trucs, et tout, du coup j’ai bossé dessus comme une mixtape, mais une mixtape 2.0 quoi ! C’était plus que des mixtapes, mais pas tout à fait des albums finis : là, Libre, j’ai pris plus de temps pour le faire, et puis j’avais un message à défendre, un état d’esprit, un délire visuel, donc pour moi, c’est réellement le premier album d’A2H.

On va revenir un peu sur les singles qui sont sortis : les deux premiers, c’était Haïr d’amour et Les yeux dans les yeux. Là, tu parles des femmes, à une femme même, ou à des femmes ?

Ouais ouais, on va plus dire « des » que « une » (rires). Mais ouais, c’est hyper important pour moi d’avoir commencé avec les morceaux sur les femmes. Dans notre quotidien à nous, on n’a pas d’oseille, tu vois ? On vient d’un univers où on se débrouille, et franchement 80% de nos trucs pour s’évader c’est… c’est avec les gos quoi ! (rires)

C’est toi qui avais choisi ces deux singles du coup ?

Ouais. Mon équipe était pas forcément d’accord, mais j’avais envie d’enfoncer le clou sur un thème, où peut-être les gens me voyaient plus comme un gars qui kicke, d’autres, comme un gars qui parle de weed… Mais pour moi, je suis plus un gars qui parle d’amour que d’autre chose. Du coup, j’avais envie que ce soit bien compris, vu que c’est vraiment comme je t’ai dit le premier album, que les gens se méprennent pas. Si tu dois me mettre dans une case, même si pour moi y’a pas de cases, mets-moi avec les rappeurs de…

De love ?

Exactement, rappeur de love (rires). J’ai un message d’amour à passer, pas un message de haine.

T’as hésité avec le track Melo comme single du coup ou pas ?

Melo j’avais envie de le sortir, finalement après coup. En le faisant, je me l’étais pas dit, mais plus je le réécoute plus je me dis qu’il a vraiment le potentiel à être un morceau universel, je trouve qu’il est facile d’accès même pour les gens qui n’écoutent pas de rap.

Tu voulais que ce soit des singles faciles d’accès ?

Oui et non, Haïr d’amour mine de rien, les sonorités à la Toronto, that type of shit,  c’est pas encore bien installé ici.

Carrément pas, non. J’avais trouvé ça surprenant comme premier single !

Ouais ouais, grave. Du coup, moi je kiffe ça ! Après, commercialement parlant, c’était pas le plus évident quoi. Après, c’est pas forcément mon fort, moi, d’aller dans le sens du commerce. Pour certains c’est une qualité, pour d’autres c’est un défaut, moi je saurais pas trop quoi dire. J’ai voulu que ce soit ces morceaux-là, je les trouvais sincère, j’avais envie d’exprimer ça. Le prochain qui arrive, c’est le morceau avec S-Pri Noir.

Il y avait un troisième single qui était sorti, aussi ?

Demain j’arrête, qui est beaucoup plus proche des ambiances dans lesquelles les gens me connaissent…

Demain j’arrête ? Une dernière fois !

J’suis un ouf, je connais même pas les titres de mes sons ! (Rires) En fait, il s’appelle Demain j’arrête le morceau ! J’vais te raconter une anecdote que t’es seul à avoir du coup, le track s’appelle Demain j’arrête à la base, et après on a vu qu’il y avait un million de morceaux sur le bédo qui s’appellent Demain j’arrête, y’a le 133 qui l’a fait, RimK, et tout, donc on s’est dit non vas-y on va l’appeler Une dernière fois, en plus ça correspond plus à ce que je raconte dans le texte que Demain j’arrête.

Le morceau, il m’a carrément rappelé Fonsdar.

Y’a des gens qui disent ça, alors que pas du tout! Après y’a une ambiance similaire, parce que c’est les ambiances que j’aime bien, et puis j’avais pas envie de faire un autre morceau West Coast sur la weed, j’avais envie de faire un truc plus moderne, un peu plus trap, un peu plus drill, mais j’avais envie qu’on reste dans des sonorités quand même un peu californiennes tu vois ! Et Weedim il a utilisé un synthé qui a des sonorités un peu west mais il a vraiment frappé ça dans le style de Weedim, donc vraiment très trap. Et oui, il y a une petite couleur similaire, mais y’a pas de sample de Fonsdar dedans. Mais c’est vrai que ça ressemble un peu, c’est un clin d’oeil sans faire exprès en plus, parce que Weedim connaît pas du tout ce que j’ai fait avant !

Alors on va passer à la tracklist maintenant, déjà le premier track, Pardonnez-moi : tu t’adresses à qui ? Tu parles pas mal de tes parents ?

Ouais je parle des parents, mais je parle de tout le monde, dans le sens, tous les gens qui se méprennent. Moi je suis dans une position où je peux dire pardonnez-moi à tout le monde, tu vois. Au public, qui capte peut être pas encore forcément qui je suis, d’où je viens, excusez-moi si je suis pas clair, je peux dire pardonnez-moi à mes darons parce que j’ai choisi une vie qui est compliquée, et du coup c’est dur à assumer en tant que parent, je peux dire pardonnez-moi à mes potes parce que j’ai peut être un train de vie que eux ils ont pas, je fais de la musique, je me lève à l’heure que je veux, je fais des concerts, alors qu’il y en a qui vont charbonner à l’usine ou des trucs comme ça, je peux leur dire excusez-moi de me plaindre alors que j’ai un train de vie comme ça, je peux dire pardonnez-moi pour plein de raisons. Et je trouve que ce morceau il est bien pour introduire l’album parce que pour moi pour atteindre le fait d’être libre, d’être bien, ça passe d’abord par une prise de recul sur soi-même. Après, je parle principalement des darons dans le sens où ils sont en première ligne, forcément.

Même musicalement, c’est progressif, ça introduit bien l’album.

C’est les mecs qui ont produit Bonjour de Vald, qui ont produit ça. Ovaground prod, des mecs de Suisse.

Justement, les prods : là tu me parlais de DJ Weedim, maintenant tu me parles d’eux, t’as taffé avec pas mal de monde ?

Ouais, j’aime bien taffer avec plein de gens. Moi, dans les albums que je kiffe, y’a le Black Album de Jay Z des trucs comme ça, avec pleins de producteurs. J’sais qu’il y en a qui préfèrent faire des albums avec une patte, une couleur, moi c’est pas le cas, je préfère faire des albums ou il y a plusieurs producteurs dessus, y’a Aayhasis pour le côté un peu plus digital, west coast, t’as Weedim et Kobe pour tout ce qui est un peu plus trap, t’as moi et des mecs comme Off The Wall ou Ovaground pour tout ce qui est un peu plus cloud…

Parce que toi, tu kickes, mais t’as mis aussi la main à la pâte à la prod ?

Ouais ouais, je produis, j’ai des instruments. Je le fais depuis le premier projet : Downtown Street Tape, c’est 20 morceaux, 20 prods à moi ! Au début, on faisait tout tout seul, j’avais la petite MPC 500. La Downtown était un hommage à la musique samplée, j’avais fait un projet electro sous un autre nom avant, et les gens s’étaient dit « c’est ça ton délire ? » Et moi je disais « non, je viens du boom bap en fait », du hip hop à l’ancienne, donc pour que les gens recadrent bien j’avais envie de faire une petite tape à la MPC… c’était il y a longtemps, mais il y a encore des trucs bien dessus encore aujourd’hui, du coup voilà c’est l’évolution, je produis depuis longtemps, j’avais envie de produire sur cet album, j’ai produit Paname Nuit, j’ai produit Mama avec Kobe, j’ai produit Les yeux dans les yeux

Tout à l’heure tu me parlais du prochain single, le feat avec S-Pri Noir, Sur ma vie, c’est la première collaboration ?

Non, on en avait fait d’autres, sur des projets à Weedim, et puis des trucs qui sont pas sortis, mais on se connait depuis, et c’est la première officielle, clippée, défendue, et tout… c’est un pote à moi, la connexion s’est faite facilement.

Alors après dans la tracklist, y’a Excellent qui vient, et personnellement c’est mon coup de coeur sur l’album, toi t’as un morceau préféré ? ou pas du tout ?

J’en aime plein, mais un de mes morceaux préférés c’est le feat avec Mv, Décisions, parce que il est grave dans une ambiance Taylor Gang que je kiffe, décontract’, weed, chill, grosse prod… j’aime bien ces ambiances-là. Après, Excellent aussi.

D’ailleurs, sur Excellent , le sample qui fait « again and again« , est-ce que je rêve complètement ou est-ce que c’est celui de Basto, dans le son pour Tomorrowland 2011, qui s’appelle Again and Again ?

Putain alors là, franchement, je me suis posé la même question que toi et d’ailleurs tout le monde se pose la question. Celui qui produit ça c’est Didai, et il m’a pas donné la réponse, je sais pas ce qu’il a samplé. Franchement, ça ressemble beaucoup, je demanderais à Didai et je te donnerai la réponse ! (Rires)

Tu dis que l’album est plus travaillé, que t’as passé beaucoup de temps dessus, tu l’as fait où ?

Je l’ai fait en France après ma tournée, j’avais pas envie de l’écrire pendant la tournée parce que c’est ce que j’avais fait sur Art de Vivre, j’avais pas envie d’avoir le même processus créatif que sur l’album d’avant, j’ai attendu la fin de la tournée et j’ai commencé à créer le truc, une fois que j’avais 90% du projet, je suis parti au Canada pour faire des arrangements, des pe-clis, trouver une petite fraicheur, une ambiance différente, et je l’ai finalisé là-bas, trouvé un visuel, la pochette de l’album, etc. Le gros du taf c’est fait en France, francophone, Palace Prod à 100%. C’est QLF, comme ils disent ! (Rires)

On va continuer dans la tracklist, avec Grandis un peu. Dis-nous, c’est comment de se réveiller avec un spliff et un soda ?

Mec, c’est toute ma vie. Regarde mon bide! (Éclats de rire). C’est wake and bake, tu vois ! Mais faudrait calmer ça, reprendre le sport, bédave un peu moins, c’est nos objectifs en tant que presque trentenaires bientôt ! Ouais, on essaie de recalibrer ça (rires).

Tout à l’heure, on parlait de tes parents, le track d’après justement c’est Mama, avec Zéfire. Pourquoi cette connexion ?

Zéfire c’est un artiste de Montréal justement, qui est talentueux de dingue, il sort bientôt des projets, il est encore un peu inconnu. Il bosse avec des mecs de Toronto en ce moment même, très talentueux, et il prépare son premier projet. Il est managé par un ami à moi qui s’appelle Kévin Amougou qui a une boite de distrib’ qui est derrière pas mal de petits placements cette année, sur Fababy, sur Booba, sur plein de trucs, et du coup lui il développe Zéfire, avec qui je suis pote. Et on a décidé de faire un morceau, et vu qu’on partage un peu la même vie par rapport aux darons, la mama qui nous a élevé toute seule, machin, du coup c’était la bonne personne pour faire cette connexion.

Le track d’après, on en parlait tout à l’heure, c’est Melo, avec Sowlie, vous aviez déjà fait un track ensemble sur Studio Liqueur ?

Ouais, en fait Sowlie je la produis aujourd’hui. Elle est pas réellement signée sur Palace Prod, mais elle release un EP sur Palace Prod en tout cas ; je bosse à la réal’ de ce projet en ce moment, et j’avais envie du coup pour amener ça, de la faire venir sur l’album, que les gens commencent à avoir une oreille sur elle, et après je release son projet courant d’année. C’est pour la lancer, et puis c’est un super morceau, produit par Mem’s, celui qui a aussi produit Haïr d’amour.

La rime mélodie/mélodrame, je suis sûr de t’avoir entendu la kicker dans un autre son.

Ouais ouais, ça fait longtemps je sais même plus sur quel son, mais c’est un lyrics que j’ai déjà dit même peut-être deux trois fois. Y’a, comme ça, des formulations qui me sont propres et que j’aime bien râbacher, comme les « bandes d’enfoirés » les trucs comme ça,  qui sont des phrases qui reviennent, et « je recherche la mélodie dans mes mélodrames » ça fait partie des phrases que j’ai déjà dit avant, là j’en ai fait un morceau.

Après je voulais revenir sur le track Branché: dans Libre, y’a pas mal de tracks très musicaux, mélodiques, mais pas autant que celui-là. Tout à l’heure, tu me parlais du Taylor Gang, moi ça m’a rappelé un truc ce track justement, dans la dernière mixtape de Wiz Khalifa, tu vois le track Call Waiting ? Ça m’a fait penser à ça, le côté album de pera avec là d’un coup un track plus chanté.

Alors, ce morceau je l’ai écrit bien avant, après Wiz fait partie des inspirations que j’ai ouais ! Mais là, les rêves que j’ai si on parle de références sur ce morceau-là, c’est plus Kid Cudi. Je suis plus Cudi en terme de rêve de trucs chantonné, chanté. J’avais envie de faire un format pop rap, dans mon univers, essayé de trouver une petite rime et une petite mélodie simple, pour amener un truc marrant… je suis super content du morceau, c’est moi qui l’ai produit aussi celui-là !

Okay ouais ! T’es partout, mec.

(Rires). Ouais parce qu’en fait, personne n’a capté ce que je voulais faire. Non mais c’est vrai, parfois quand tu veux faire un morceau un peu spécial tu dis ouais, là je vais que chantonner, et les gens ils proposent des trucs et ça devient complètement de la pop, et moi je dis non je veux que ça reste un beat de pera, des fois c’est trop pera, et là je dis « non laissez… je vais le faire ».

Franchement, ça fait pas trop pop !

Nan, je voulais pas que ça fasse pop ! Je voulais juste que ce soit pas un morceau de pera. Mais que ça reste un morceau de pera ! Tu vois ? Et pour faire ça… (rires). Fallait que je le fasse, personne captait ce que je racontais.

Alors tu me parlais plus de Kid Cudi là, c’est quoi tes influences musicales ?

C’est marrant, parce que plein de gens m’ont interviewé, personne m’a réellement parlé de mes influences… en fait tu sais pourquoi je pense à ça, j’ai l’impression que c’est la première fois que je le dis, mais moi, Cudi, c’est genre ma référence numéro un sur ce que je fais depuis 2014/2013. J’écoute depuis longtemps, j’aime beaucoup mais je savais pas comment essayer de retranscrire une ambiance similaire à la française tu vois. Il fait partie des gens que j’ai beaucoup écouté Cudi, Kanye énormément, après en terme de pera je vais plus être vers du Freddie Gibbs, je kiffe à fond, ça m’a inspiré énormément sur les flow, après toute la scène West Coast, tu sais très bien que moi j’ai un penchant sur ça. Tout ce qui est la baie, San Francisco et tout ça, j’ai un pote à moi qui baigne dedans, qui s’appelle Ori, un artiste du label, il m’a initié à ça. Après tout ce qui est pas du pera, moi j’écoute principalement du RnB quoi. Franchement j’écoute mille fois plus de RnB que de rap ! Ces dernières années je me suis buté à The Internet, Anderson Paak, SZA, Frank Ocean… je suis vraiment dans ça, c’est ce que j’écoute le plus, donc ouais ça fait partie de mes influences à fond. C’est pour ça aussi que j’ai pas trop de mal à me lancer sur un truc comme Branché, qui est plus chantonné, parce que je connais ce secteur aussi.

C’est pas parce que tu fais plus du rap que t’en écoutes à mort quoi.

Ouais ouais non grave, j’écoute pas trop de rap français. J’écoute juste mes potes quoi.

Justement tes potes, le titre juste après Branché, et je pense s’il est là c’est pour rappeler que là on parle quand même d’un rappeur, c’est Mes frères, avec 3010. Alors 3010 tu l’avais déjà eu sur Jeunes et talentueux, c’était déjà un gros track qui a mis un peu tout le monde d’accord. Là c’est un peu le même topo, sur celui-là !

Ouais, c’est la suite ! Comme il dit Milli dans le début de son couplet, « c’est A2, Milli, round 2 !« , c’est le round 2. Tout simplement ! (Rires)

Toujours aussi jeunes, toujours aussi talentueux ?

Pareil mec, on bouge pas ! (Rires)

Sur ce track là et celui d’après, Partout, tu sens vachement l’influence cainry dans les prods.

Ouais ouais, là c’est le passage « oublie pas qu’on est des kickeurs », grosse prod gros flow, j’envoie la purée, salope mon pera s’élève, quoi. (Rires)

Le morceau d’après, c’est Le kiff de base, en feat avec Flynt. Au niveau du thème, c’est peut être le plus important de l’album ?

Ouais ouais, bah ouais. Je tenais à faire un morceau avec Flynt, et je tenais à ce que ce soit un morceau où on rappelle aux gens qu’on est pas des rappeurs pour faire des dabs dans les clips, tu vois ? On est des rappeurs parce que c’est le coeur qui parle. Du coup, c’était important de le faire avec un gars avec qui je pense partager cette vision, et puis un plus ancien pour « adouber » le truc tu vois.

Flynt, c’est un pote à toi non ?

Ouais, on a le même tourneur en fait, et du coup on s’est croisés plein de fois, on vient d’un univers complètement différent, d’un rap complètement différent, mais on s’entend bien humainement de fou ! Et du coup on s’est dit viens on fait un truc, ça va surprendre les gens. On va s’occuper du clip bientôt, on est sur ça. La en fait dans la suite des clips, y’a celui avec S Pri Noir, t’as Mama, qu’on a clippé là bas, au Canada, et après normalement y’a celui avec Flynt. Mais celui-là, il sortira une fois que l’album sera sorti.

Flynt, c’est ta première collab avec lui non ?

Par contre ouais, première collab.

Il était temps que ça arrive alors !

Grave, c’était chanmé, en plus je l’ai amené dans mon univers. T’sais j’ai pas mis un morceau boom bap et fait venir Flynt, j’ai fait venir Flynt sur un track à la A2, et je trouve il a relevé le défi. Y’a peut-être des gens qui vont pas aimer, hein ! C’est possible, parce que c’est vrai que ça change de ce qu’il fait habituellement, mais moi je trouve qu’on a fait un super track.

Dans l’équipe il a aussi un peu divisé, parce que le flow de Flynt peut paraître bizarre à côté du tien, qu’au niveau du thème il commence à parler du FN, du coup on se dit que ça jure un peu avec le côté plus chill d’A2H ; ça t’as pas dérangé ça ?

Ça m’a pas dérangé parce que contrairement à ma musique, qui est peut-être un peu chill, je pense qu’elle l’est, moi je suis quelqu’un d’engagé. C’est juste que, je suis pas un politicien, je vois pas pourquoi ma musique me servirait à combattre. Pour moi, le fait d’exprimer la joie, l’amour, je raconte ce que je vis, pour moi ça aide autant à combattre que si j’avais mis une line en disant « ouais, Marion Maréchal, yo, on va te défenestrer, on va te mettre des pétards dans la chatte », t’sais genre… (éclats de rire) Tu vois ce que je veux dire ! Mais par contre, je suis quelqu’un d’engagé pour la cause noire, pour plein de combats qui me tiennent à coeur, je suis un très grand anti-racisme, fervent combattant, mais je trouve ça trop lourd de l’assumer dans des gros morceaux… mais c’est peut-être un truc que je ferai après ! Aujourd’hui, c’est pas ce que je recherche. Mais c’est pas dit que d’un coup je me transforme pas en Common, ou que je commence à faire que des morceaux sur ça. Mais pour en revenir au feat, ça me choque pas parce que c’est des discours qu’on peut avoir lui et moi en off, mais c’est sûr que comme moi je le mets pas forcément en musique, le fait que lui il arrive avec un truc lourd direct, fuck le FN, il parle des banques et tout, c’est beaucoup plus lourd que ce que moi j’ai raconté, la fraternité, la vie de quartier, donc on a deux point de vues différents. Mais c’est bien quand t’as un morceau avec deux personnes qui pera, d’avoir deux points de vue !

Et puis il commence comme ça, mais sur la fin du couplet il rejoint carrément le thème. Alors ensuite, y’a le track avec MV dont on parlait tout à l’heure.

Ouais, c’est un de mes morceaux préférés parce que j’aime l’ambiance de ce genre de morceau. C’est le genre de morceau que j’écoute, donc le faire, c’est cool.

Et après, les deux derniers tracks de l’album, Paname Nuit et Nuit blanche, j’ai l’impression que les deux auraient pu servir de conclusion, de fin d’album, y’en a un des deux que t’as produit du coup ?

Ouais grave, c’est moi qui ai produit Paname Nuit ouais.

A la toute fin de Nuit blanche, tu dis que t’es pas vraiment libre. Mais dans l’interlude de l’album, tu chantes l’inverse, tu dis « je suis libre ».

C’est bien que t’aies remarqué ça, c’est ce que je voulais que les gens entendent.

Mais du coup, t’es libre ou pas ?

Bah le truc il est là, c’est qu’on sait pas ! Un matin, je me réveille, je suis libre, je me dis : oh, je me réveille à 15 heures, c’est chaud ! J’ai de la weed, c’est chaud ! Ma meuf est bonne, c’est chaud ! Tu vois ? Et puis d’un autre côté c’est la merde. La daronne elle galère, machin, si je veux passer en radio je dois faire tel son, y’a des trucs à faire… ça dépend de l’heure de la journée à laquelle tu me parles, tu vois ? Et c’est ce que je voulais que les gens captent, quand t’es en quête de liberté, y’a des moments tu te sens libre, et d’autres, pas du tout.

Et pour l’album ?

Pour l’album on est pas libre, mec, on n’a que des bâtons dans les roues ! Trop de fils de pute dans ce milieu, tu vois ? Des mecs qui vont arriver, qui vont te faire des grands blowjobs quand tu fais un million de vues… moi je suis là pour dire à tout le monde que yo, on va vous chier sur la gueule bientôt et que y’aura pas de pitié, tu vois ? Tous ceux qui reviennent, qui rappellent, je leur dis : mec, va bien te faire enculer, mec ! Au moment où nous on était là on t’appelait, on demandait un coup de main sur ça, tu disais : ah les gars, ça va nulle part, vous avez pas de visibilité, demain y’a un instagram de Booba qui dit « nouveau clip d’A2 », là tu reviens ? Mais mec, on va te mettre des balayettes ! (Éclats de rire) T’es fou ou quoi ! Je supporte pas ça, dans le jeu. Nous on est dans un esprit de vengeance quand même.

D’ailleurs tu me parles de Booba, Une dernière fois était sorti en exclusivité sur Oklm radio non ? Je m’y attendais pas, ça fait pas mal de visibilité ça !

Ouais c’est cool ! Et puis surtout le morceau est apprécié, parce que la visibilité c’est bien, mais si c’est pour qu’il y ait 800 personnes qui te disent t’es un fils de pute, je m’en passerai bien de cette visibilité tu vois ! (Rires) Là les gens ils ont kiffé j’ai des bons retours, y’a plein de gens sous la vidéo youtube ils disent « ouais je suis là grâce à Oklm radio, ça tue, grande découverte », c’est cool ! Ç’a été un pari réussi on va dire, donc grand big up à l’équipe d’Oklm qui font un bon taf. On connaît l’équipe, on est en contact avec eux, moi j’apprécie le travail qui font, on leur envoie des clips, on essaie de faire des événements en commun… Après, qu’on aime ou qu’on aime pas ce qu’ils diffusent, je trouve qu’ils essaient de travailler dans la bonne direction en terme de pera. Après y’a un public, ils peuvent pas mettre tout ce qu’ils veulent ! Mais ça tend à évoluer, c’est un bon média, ils essaient de mettre un maximum de bonne musique, et ils mettent de tout ! Donc ouais, on est down avec Oklm depuis le début ouais.

Le mot de la fin, ce sera quoi ?

Allez acheter l’album ! L’album est chaud, on a fait 18 titres, il est à 10 balles, moins d’un euro le titre, appelle-moi l’abbé, l’abbé… l’abbé Pierre quoi ! C’est presque du don ! (Éclats de rire) Nous on veut que ça se diffuse, que les gens ils écoutent, ils kiffent qu’ils viennent aux concerts, qu’on s’éclate ! Si ça se trouve demain on va péter dans un métro, mon frère, kiffons un peu, quoi. Faut pas oublier le kiff. Si tu fais plus avec le kiff, arrête. Si demain j’ai plus le kiff, tu m’entendras plus chanter. Je veux pas continuer à faire du son si je kiffe plus en faire, ça n’a pas de sens.

Tu penses que tu pourrais arrêter de kiffer de faire du son ?

Non non… impossible.

***

Album libre disponible ici : http://musique.fnac.com/a9502644/A2h-Libre-CD-album

Interview réalisée par Hugo Rivière le 22 mars 2016, au Bunker 105

À proposHugo Rivière

Entêté monocellulaire impulsif, sentimental, très humain et complètement dingue

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