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2011 – L’Esquisse Vol.2 – Keny Arkana

La rage. C’est par là qu’on avait découvert la petite Arkana dans le rap en France. Si la question est de savoir si elle l’a perdue, la réponse est claire. Non.

La couverture.

Simple et cohérente, elle fait écho à celle du premier volume de L’esquisse qui est quasiment en tout point identique. Seules la couleur et l’inclinaison de la tête de Keny diffèrent.

Les productions.

L’album est carré. Mais surprenant par plusieurs bouts. Sur « A La Vibe & Mektoub », la prod’ lorgne sur le rock dur, le ska sur « Nature Sauvage », la chanson française avec « Au Milieu du Chaos ». Vous aurez saisi, à défaut de varier abondamment le flow, Keny a décidé d’entretenir la flamme en brisant la routine du boum-bap.

Le flow.

Tout le monde la sait douée. elle maîtrise son sujet et sait jouer des variations. Mais le flow peut  finir par lasser et c’est ce qui la retient loin du grand public. Est-ce que ça la dérange ? Rien n’est moins sur ! Cependant sur des morceaux comme « Hors Game », elle révèle qu’elle sait varier les plaisirs en poussant la chansonnette et en allant chercher un air qu’on croyait sorti d’un album de Renaud sur « Au Milieu du Chaos ». Mention spéciale à « Freestyle du Maquis » où elle kicke avec une technique impressionnante.

Les textes.

Encore une fois, on ne va pas tortiller. L’intéressant est là. Tout ce qui coule de son stylo plume et qui se pose sur la feuille blanche est marqué de la griffe Arkana. On aime ou pas mais elle a le mérite, et personne ne pourra lui enlever, de rester elle-même. Cohérente jusqu’au bout du bandeau, elle développe inlassablement les mêmes thèmes qui sont son engagement à la gauche de l’extrême-gauche, son penchant écolo et alter-mondialiste. Elle se pose même en résistante sur « V Pour Vérités » dans un concept à la V Pour Vendetta.

L’album est composé de vingt pistes et la prouesse de Keny est de broder autour des mêmes idées en réussissant à ne pas se répéter. Après l’écoute, il n’y a qu’une chose qui reste dans la tête, comme un refrain lancinant : la Marseillaise chante la liberté. Sous toutes ses formes. A travers un champ lexical varié autour du vent, de l’eau, de la nature, elle tisse une toile profondément libertaire et humaniste. Aimer l’humanité mais pas ceux qui la dirige, c’est son credo qu’elle résume en une seule phrase à la toute fin de l’opus : « Je lève mon verre à ceux qui restent eux-mêmes, qui pensent par eux-mêmes / Dans un monde qui chante la peur avec une fanfare de haine. »

Conclusion.

Il se trouve que Keny Arkana a réussi un beau projet. Mais elle est comme un train en marche. Ceux qui l’ont prise à ses débuts n’auront aucun mal à la suivre et l’apprécieront de plus belle. Mais pour ces gens qui s’y intéresseraient seulement maintenant, il faudrait repartir du début. En résumé, ses fans le seront encore plus et les profanes auront du mal à adhérer. En attendant, la trublionne du rap français continue son bonhomme de chemin bien loin des sentiers battus et c’est avec soulagement que l’on constate que non, personne n’a tué Keny.

À proposStéphane Fortems

Dictateur en chef de toute cette folie. Amateur de bon et de mauvais rap. Élu meilleur rédacteur en chef de l'année 2014 selon un panel représentatif de deux personnes.

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