Affichage de 20 Résultat(s)
Découvertes Sélections

Mes 5 découvertes du mois #3

Le rap est la conclusion d’une liberté, d’une liberté d’expression pour laquelle la France s’est battue pendant des siècles, mais à notre époque, il en est aussi la cause et l’acteur. Des mots, des images, des hyperboles, parfois dures et incomprises, pour dénoncer des faits, des idées, des actes. Notre rôle est de desceller le vrai du faux et de tourner les projecteurs vers les propos et les idées transmettant des valeurs humaines et justes. Il est d’autant plus impératif d’accorder de l’importance aux artistes défendant leurs principes avec humour ou second degré, à la manière d’un dessin de Charb. Mettons de côté la métaphore et entrons dans le vif du sujet ; du rappeur populaire jusqu’à celui à 400 vues sur youtube, du beatmakeur à l’accoutumée des open-mics, voici nos 5 découvertes du mois.

 

Rochdi (Krystal)

« Fils as-tu envie d’être libre ? / J’me délivre, j’m’enrichis, j’vis des livres; la sagesse est-un art de vivre / J’ai le devoir de faire honneur à mon essence / A chaque jour sa connaissance / J’ai fait une promesse d’allégeance à celle qui m’a souri le jour de ma naissance »

En ces temps de haine et de cacophonie idéologique, il est bon de se ressourcer, de se recueillir dans un art canalisant les esprits. On vous propose Rochdi, quand la poésie pense aux bons mots pour panser les bons maux. La beauté des morceaux est quasi ineffable, l’impression d’ouvrir un vieux livre, trouvé par hasard dans une bibliothèque, et d’y plonger tête baissée sans pouvoir s’en séparer, voilà le ressenti. Son projet Blue Tape, est un melting-pot littéraire grâce aux innombrables rimes riches, pour la forme, et aux multiples questionnements philosophiques que se pose l’artiste en fond.

L’absurdité de l’existence, de son existence, évoquée d’une verve enivrante guidée par la mélodie poétique de ses assonances, ne nous a pas laissés de marbre dans le sublime morceau Souvenirs. Les références littéraires ne sont ni opulentes, ni prétentieuses, simplement écrites avec une justesse indéniable, notamment avec ce renvoi à la fable du Lièvre et la Tortue « Si j’suis en vie c’est que je vais mourir / Inutile de courir / Après le bénéfice, ici les hommes sont nihilistes ». Le seul petit défaut qu’on pourrait lui reprocher est que le projet a été enregistré essentiellement (ou totalement) sur des faces b et la perte de charme en découle. En revanche c’est un projet gratuit, peut être une « interlude » avant un véritable nouvel album ? Au final, on vous incite fortement à écouter ce projet, ainsi que sa discographie antérieure et à suivre de très près cet artiste.

 

Roméo Elvis

« La nouvelle ère jurassique s’installe cette année / Les cétacés se transforment en sauropodes / Et s’en est assez de délirer sur nos consoles / A nous les courses d’iguanodon, les taxis velociraptors»

Bruxelles, c’est devenu la jungle ? Roméo Elvis, rappeur belge au nom improbable, va vous répondre. Sur fond de kicks et de snares imposants, la voix grave de ce bruxellois décortique les branches de la société dans son premier EP Bruxelles C’est Devenu La Jungle. Vous allez nous dire « Encore un qui fait la même chose ». Oui mais non. Pour établir ses observations il utilise la métaphore filée enrichie par un champ lexical animal très vaste. Et ça donne quoi ? Un projet qui détonne grâce à une mise en mots de l’imaginaire et une conceptualisation juste et intelligente. La classe ouvrière représentée par des fourmis, Roméo Elvis accompagné de Loxley expliquent à la première personne la vie d’une fourmi/ouvrière, Germinal de Zola n’a qu’à bien se tenir. Autre exemple, avec le morceau Legrand Bleu, le jeune belge énumère les vices de Bruxelles en les métaphorisant en espèces maritimes.

En somme, l’EP est atypique et ça fait du bien, sorte de récit fabuleux interprété par un Jean de La Fontaine 2.0, on vagabonde dans un Bruxelles narré à la manière d’un apologue, le tout produit par le beatmakeur Le Seize. Son deuxième EP Famille Nombreuse est sorti récemment, il consolide l’image vertueuse que nous avions à son égard. Plus classique, l’artiste se détache du champ lexical animal mais n’en devient pas moins intéressant. Animé par son « cousin dégueulasse », Roméo Elvis flâne entre storytelling, introspection et second degré avec un dédoublement de la personnalité un peu trop franc.

 

Géabé

« Ma France elle a pas lu Sartre mais elle sait ce qui lui fout la nausée »

Bon, ce n’est peut-être plus une découverte car beaucoup d’artistes ont relayé ce fabuleux morceau Ma France. Mais avec les événements tragiques que la France a connus, comment passer à côté de ce bijou ? Véritable hymne à la France, ode à son peuple et hommage à sa culture.

« Ma France elle aime son pays, elle est fière de sa culture mais y’a certains aspects de son histoire qui lui donne des verrues »

Sur une instrumentale signé Dakeyz Nation, Géabé décline toutes les particularités françaises : des innombrables dialectes aux bobos parisiens, du siècle des lumières à la politique bas de gamme (cf Morano) et de sa diversité culturelle à son histoire peuplée d’erreurs. Car la France ne se résume pas aux Champs Elysées et au camembert. Elle n’est pas homogène culturellement et bien heureusement. Notre pays a un tronc commun de connaissances mais n’est pas fermé à de nouveaux savoirs. Du moins, pas nous et encore moins Géabé.

« La France elle part en couille, faut qu’on reprenne les rênes mais en voyant la flamme obscène du FN on dirait qu’on régresse »

Véritable message de paix et d’union accompagné d’un clip simple mais beau, afin d’expliciter les propos. Peu de choses à dire de plus sur ce clip, voyez par vous-mêmes. A noter que le texte n’a pas été écrit suite à l’actualité mais ses événements en ont peut-être forcé la sortie du morceau. C’est avec ce dernier que nous avons découvert l’artiste et nous ne sommes pas déçus !

 

Louise Kabuki

L’artiste a-t-elle sa place dans notre classement ? Nous entendons par là, est ce en rapport avec le rap ? Et bien nous ne savons pas, le seul argument que nous avons est que le grand Lucio Bukowski a déjà posé ses textes sur les prod’s de Louise Kabuki. Et puis, qu’importe ! Son EP Etudes&Collages Instrumentaux est une vraie merveille. Si vous cherchiez le recueillement, mais que le silence vous abasourdissait, écoutez ce projet. Loin d’être du beatmaking classique, c’est une succession d’instruments (réels ou numériques ?) venant effleurer ou parfois rosser notre ouïe avec une sensibilité paradoxale.

Car oui, loin d’être un assortiment de morceaux froids, sans âme, c’est une véritable harmonie sonore que l’artiste nous a livrée. Très talentueuse ; avec simplement quelques kicks asservis par des chœurs reverbés, nous obtenons un morceau déchargeant d’innombrables émotions sur les ondes. Nous ne saurons pas qualifier musicalement cet EP et c’est peut-être le but de l’artiste car on y ressent une influence musicale très variée. Cessons les logorrhées, écoutez cet étrange projet, vous en ressortirez déroutés, certes, mais n’est-ce pas là un des rôles de l’art ?

 

Heegrek et Dick Van Dyke

« Humeur en dents d’scie, j’suis plus le même ce soir / Je cherche une lueur en vente libre pour des prunelles de quartz »

Mais d’où proviennent ces blazes si atypiques ? Pas la moindre idée mais vous risquez d’en entendre parler tout au long de 2015. Ça a commencé avec un Hors d’œuvre, comme ils l’appellent, sur une instru lunaire. La gravitation décampe mais les flows pondéreux des artistes vous rattrapent vite avant que vous ne quittiez la troposphère puis la stratosphère et enfin la mésosphère (8/20 au bac de sciences, qu’est-ce que tu vas faire ??). Alors pourquoi tout ce champ lexical spatial ? Tout simplement parce qu’Heegrek et Dick Van Dyke ont annoncé, avec ce premier extrait, un EP commun nommé Space Tape Vol.1.

Pochette digne d’un film de science-fiction intello des années 70 (pas Kubrick, par contre) mais avec des morceaux, du moins les premiers extraits, très avant-gardistes. Lyrics qui détonnent avec parfois des trous noirs d’incompréhension chez nous et pourtant on adhère quand même, allez savoir pourquoi. L’univers musical est captivant, on se laisse surprendre à écouter les extraits en boucle sans se lasser. Les deux artistes ont l’air d’être bien entourés, il semblerait qu’ils apparaissent dans le clip Bon Sang D’Putain de Lucio Bukowski et Missak. A suivre …

Découvertes Sélections

Mes 5 découvertes du mois #2

Il nous est arrivé de comparer le rap à un océan, mais en y repensant, ne serait-ce pas plutôt un immense espace enfoui sous des kilos de terres, de sables, et de goudrons ? Effectivement, les têtes d’affiches du rap sont paisiblement assises sur leur colline, scrutant chaque mouvement présent sur cette terre, de peur d’être délogées de leur trône. Notre mission est de balayer chaque parcelle de terre, quitte à sortir des sentiers battus, pour vous présenter le plus raffiné des trésors, à la manière de ce bon vieux Jones. Mettons de côté la métaphore et entrons dans le vif du sujet ; du rappeur populaire au rappeur à 400 vues sur youtube, du beatmakeur à l’accoutumé des open-mics, voici nos 5 découvertes du mois.

 

Twistba

plaisance twistba

« J’suis sur la lune, distraction passagère / Mais ma folie périodique n’est qu’une démence tout comme quand j’m’assagis / Juste besoin d’éclipser mon attitude de bas âge et / M’éclaircir les idées car j’suis lassé d’voir la masse agir »

Suffit-il de faire de la musique qui détonne pour faire de la bonne musique ? Twistba vous proférera que non. Jeune Mc’ de 18 ans, Twistba préfère exceller dans un rap qu’il maîtrise plutôt que de s’essayer, comme beaucoup, à un univers « prototype » erroné. Nous approuvons cette démarche tout comme nous approuvons son EP, Plaisance, où les fausses notes sont bien rares. Équilibre parfait entre l’introversion et l’extraversion, le projet traite avec brio d’une multitude de thèmes. De la découverte du rap à la découverte de la précieuse solitude, génératrice d’inspiration, nous décelons une partie des maux de l’artiste. Mais ne vous méprenez pas, Plaisance, comme son nom l’indique, n’est pas là pour tirer des larmes.

Une grande partie des instrus inciteraient à prononcer ce fameux « chill » et à s’évader peu à peu vers les contrées joviales du rap. L’écriture est à la fois complexe et simple : complexe car les schémas de rimes et les figures de styles sont très intéressants, mais simple car le message est clair et cohérent. De même, l’artiste alterne avec agilité entre rap francophone et anglophone, figure de style peu prosaïque pour un rappeur français. Un EP qui annonce donc un artiste très prometteur, à suivre de très près.

Népal

nepal 16 par 16

« L’entêtement c’est qu’des embêtements donc j’crée tempête / Sédentaire en même temps que j’entraîne leur démantèlement / L’instru j’la ouet en l’aimant tellement, élémentairement / J’parle pas d’ta reu-seu quand elle ment »

Népal, KLM, non vous n’êtes pas sur le site d’une agence touristique et non nous n’allons pas vous vendre de voyage, nous allons, comme prévu, vous parler d’un artiste. Népal, anciennement KLM, est un des « petits » derniers de la 75eSession et grand habitué de chez 2Fingz, qui a sorti son EP 16 Par 16 très récemment. Vous ne vous remettez pas son visage ? C’est normal, vous l’avez peut-être aperçu dans un ou deux Grünt ou dans quelques clips mais l’homme est constamment vêtu d’une capuche, camouflant son visage. Son projet est loin d’être innovant, certes, il le dit lui-même : pour lui c’est un recueil de textes posés sur des Faces B.

L’explication du titre n’a donc pas lieu d’être, vous l’aurez compris, ce projet est un enchaînement de 16, parfois sans cohérence justifiée. Mais chacun de ses vers est un coup de boutoir à la finesse, paradoxalement, très aiguisée. Chaque ligne est peuplée d’assonances et d’allitérations de telle sorte que son flow tranchant s’accommode parfaitement avec les instrus. Car oui, au vu des Faces B choisies, Népal a prouvé qu’il était à l’aise avec beaucoup de registres différents. C’est un des petits projets de cette année qui a eu le plus de succès. Dans une récente interview, il nous confiait qu’il avait été téléchargé plus de 3000 fois en une semaine.

 

Nusky x Vaati

lecce nusky vaati

« On s’en porte bien, restez-là j’ai encore faim / Nous on joue et les autres feintent / Le bif n’est pas dans les bonnes mains »

Eternels bornés, il était difficile pour nous d’admettre que le rap français n’avait pas besoin de son célèbre « piano/violon », « boom-bap » et de sujets « conscients », comme certains l’appellent, pour être de qualité. Mais Enfin ! Le rappeur Nusky, du groupe La Race Canine, et Vaati, beatmaker chez Kaïoshin, nous ont prouvé avec brio que nos préjugés étaient obsolètes. EP de 3 titres, Lecce, est une flânerie nocturne au parfum sucré, une confiserie sans colorant, quelque chose de pur. En effet, les deux artistes nous ont défini ce titre comme un « parallélisme entre la pureté du lait et la pureté de l’art ».

Et après réflexion, nous approuvons : le projet est servi en petite quantité mais la finesse du produit est inouïe. Le fond des textes n’est pas là pour pousser à la réflexion, il raconte les déboires comme le contentement quotidien des choses simples de la vie. On remarque cependant un texte technique avec des rimes consonantiques qui apportent une certaine originalité et une très bonne musicalité. Les prods sont inaccoutumées mais maitrisées, une sorte de fusion entre les atouts de la musique pop et du r’n’b avec les bases solides du rap. Nous retenons également l’ambiance générale du projet, de la mélancolie à la joie, il nous transporte d’une émotion à une autre, le tout en douceur.

 

Naïad

naiad soul food

« L’école m’a appris qu’un plus un égale deux, que nos racines sont carrées et qu’on ne peut diviser le zéro / La rue m’a appris qu’on peut diviser les heureux mais peu importe l’heure on peut diviser les euros »

Composé des deux rappeurs Nostal et Tonio MC, accompagnés de leurs musiciens Louis Angeles à la guitare, Aurel Lion à la basse Pierre Stonar à la trompette et Paul Luciani aux machines, Naïad est un groupe parisien que nous avions déjà découvert en 2011 sur l’Affaire Vol 1, projet réunissant divers artistes rap, talentueux. Ces derniers avaient sorti, par la suite, un projet nommé Poètes du Béton, en 2012. Album parisien dans toute sa splendeur, aux odeurs de goudrons et de spleen, qui s’avérait être d’une grande qualité. Cette année Soul Food, album de 14 titres, sort en collaboration avec le beatmakeur Nat Powers et les vertus musicales du groupe ne se sont pas estompées. Album bien plus éclectique que le précédent, il se démarque de la scène actuelle, parfois redondante, avec des instrus plus souls et positives.

Les thèmes abordés tournent moins en rond, les artistes ont pris du recul et arrivent à évoquer des sujets différents. De nombreux anglophones sont invités sur Soul Food, de l’américain Nieve, à l’anglais Apocraphe, avec son flow très atypique, en passant par Lady Paradox qui s’insère parfaitement dans l’ambiance soul de l’album. Une fois de plus, le groupe ne commet pas de bémol, Nostal est toujours aussi technique et Tonio Mc n’a pas mis au placard sa verve inégalable.

 

  Sheldon

frequences sombres sheldon

« Ça commence toujours comme ça, c’est comme avaler d’travers / C’est un peu désagréable mais ça passe après l’averse / Nan, t’auras pas la clé d’ma haine / Tu vas parler népalais si mes balafrés s’ramènent »

On termine nos découvertes avec Sheldon aka « l’homme banal », membre également de la 75e Session. Un peu déçus de sa prestation lors du Grünt 18 dédié à son collectif, nous étions peu pressés d’écouter son EP Fréquences Sombres. Et bien l’erreur est humaine car oui, la gifle envoyée par ce projet en ferait trembler notre ami Claude Pinoteau. Accompagné de Walter du Val Mobb, Keroué du Fixpen Sill, Sanka de la 75e Session et Zeurti (Zeu) du Panama Bende, l’artiste défend honorablement son titre de rappeur.

Sheldon laisse ondoyer une atmosphère pesante avec des textes cafardeux, accompagnés de beats et de mélodies sinistres qui nous tirent la main vers l’abime de l’introversion. Derrière cela, se cache une œuvre profonde, une sorte de désarroi camusien explicité par du storytelling lugubre et des pamphlets acrimonieux. Pour combler le tout, le flow utilisé est parfois apathique, ce qui rend la portée des phases encore plus déroutante. Cet Homme Banal a également sorti un EP instrumental, Innsmouth, sur le même ton macabre. En bref, on vous conseille vivement d’écouter ces deux projets, qui ne vous laisseront pas de marbre.

Si vous avez aimé cet article, n’hésitez pas à le partager avec les petites icônes ci-dessous, et à rejoindre la page facebook ou le compte twitter pour suivre les actualités que Le Rap en France vous propose.

Découvertes Sélections

Mes 5 découvertes du mois #1

Si le rap était un océan et que chaque vague était un artiste, on peut vous assurer que même le plus aguerri des marins ne connaitrait pas la totalité de ces fonds maritimes, demandez à ce bon vieux Cousteau. On a donc décidé de vous faire découvrir, non pas les abysses car le terme serait un peu trop péjoratif, mais quelques flots qui composent l’immensité des mers. Mettons de côté la métaphore et entrons dans le vif du sujet ; du rappeur populaire au rappeur à 400 vues sur youtube, du beatmaker à l’accoutumé des open-mics, voici nos 5 découvertes du mois.

 

Lonepsi

« Ma plume à l’encre noire le soir écrit des mots fâcheux / Pas ceux d’un Maupassant ni ceux d’un garçon courageux / Pourrais-je alors m’attacher plus que mes lacets ne l’font ? /Atteindre des sommets sans qu’on me dise « Là, c’est le fond » »

Le rap c’est avant tout du texte, et lorsqu’il est écrit d’une plume qui se démarque des autres, il marque des points. Lonepsi est un de ces rappeurs qui, malgré son jeune âge, écrit merveilleusement bien. Chaque vers est réalisé avec soin, pour notre plus grand plaisir. Armé d’un stylo et d’une feuille, le jeune parisien nous accompagne vers un monde où les mots sont rois. Diérèses, assonances, allitérations et autres techniques d’écriture sont utilisées à la quasi-perfection, la forme est belle et fluide, on se laisse bercer dès la première mesure. Lonepsi reste très polyvalent, de l’instru boom-bap à une mélodie planante, tout lui est accessible et nous pouvons affirmer, avec certitude, qu’aucun de ses morceaux sortis n’a été médiocre. Il est de ces rappeurs qui ne rappent pas pour le succès mais pour le plaisir d’écrire. Et on ne va pas vous cacher que les textes honnêtes, comme les siens, sont souvent les meilleurs. La plupart de ses morceaux sont solos et très introvertis, mais le jeune parisien partage avec son frère, Nuelma, un groupe : Les Deux Demis. Aucun projet n’a vu le jour jusqu’à maintenant, et aucune information sur l’avenir, mais l’artiste sort fréquemment des petites douceurs, la dernière ici.

 

Swatt’s

« La foule m’emporte mais pour autant / Je vois pas la vie en rose d’Edith Piaf »

On passe maintenant de l’autre côté de la frontière, en Belgique, plus précisément à Tournai pour un rap hargneux, maussade mais surtout épatant. En effet, Swatt’s a sorti en 2014 un des meilleurs projets de rap francophone de l’année alors qu’il n’avait que 16 ans. On nous avait prévenus que le jeune Belge était talentueux, mais à la première écoute de l’EP L’Amorce c’est la claque ! Des phases qui fusent dans tous les sens, des références à l’ancienne école du rap, des mesures interminables, personne ne s’attendait à ce qu’un jeune rappeur comme ça soit aussi habile, cultivé et professionnel que Swatt’s. On note que le Tournaisien a déjà réalisé 2 Poignées de Punchlines pour Give Me 5, qui n’ont pas laissé le public rap indifférent, on peut également le retrouver sur la mixtape Dès le Départ Vol.2, toujours de Give Me 5 avec le morceau Les Mots Qui Blessent. Chaque morceau est un cri mélancolique, un cri qui perdure sur 4 minutes d’instru, souvent produite par le talentueux Beni Luzio « La plupart des morceaux seront mélancoliques / Car du bonheur j’veux être ivre sans qu’le mal me rende alcoolique ».

 

Theo Skellington 

« Oscillant et essayant d’faire vaciller mes assaillants / J’suis comme Ulysse, face à l’eau cyan de l’océan »

Attention décollage imminent, embarquez à bord de la compagnie Air Skellington et savourez votre voyage. Si vous ne connaissez pas cet artiste aux productions aériennes et au flow raffiné, on vous invite prestement à écouter un de ses morceaux. L’homme qui « gratte trop d’rimes au patronyme d’Halloween » a déjà sorti un premier EP nommé Arc-En-Ciel il y a bientôt un an, un projet très intéressant, selon nous, avec des instrus qui se démarquent de la tendance générale, toujours avec une fine plume. Également, Skellington avait un point de vue et un certain état d’esprit qu’il transmettait dans chacun de ses morceaux, une vision de la vie plutôt intelligente expliquée par une prise de recul peu habituelle à cet âge. Cependant, ce dernier a affirmé dans une interview que cet EP n’était pas à l’image de son niveau actuel. Le garçon prétend avoir mûri, que ce soit en matière d’écriture mais aussi mentalement, et on peut le constater sur son dernier morceau Œil Du Cyclone, morceau issu de son futur projet que l’on attend avec impatience.

 

So Clock

« Parait qu’il y a un temps pour la vérité, un temps pour les erreurs / Un temps pour les vérifier, un temps pour être meilleur »

On vous l’a déjà dit, la jeunesse parisienne fait ses affaires et s’accapare peu à peu cet océan qu’est le rap. Certains s’y mettent à bride abattu et emmagasinent parfois les impairs, favorisant la quantité à la qualité mais ce n’est pas du tout le cas de So Clock. Certes notre camarade a déjà sorti un premier EP, mais notre impression à l’égard de ce projet n’est pas péjorative, au contraire. En effet, 6 Oclock semble être le résultat d’une prise de conscience de soi et de l’élaboration d’une passerelle entre l’action et la réflexion, d’un artiste qui a su prendre le temps de peaufiner sa perle. Le ton fait preuve d’un profond désenchantement mais il y a une réelle analyse du quotidien d’un homme banal, une explication de cette forme de morosité qui sommeille en chaque être, une sorte de Journal d’un jeune éreinté, pour ne pas calquer une œuvre de Charles Bukowski. De plus, l’EP se termine sur un des plus beaux morceaux que nous ayons entendus cette année, En Vérité, un texte profond embelli par une agréable maitrise de l’écriture sur une face B de Nessbeal, Les Larmes De Ce Monde. La reprise de cette instru du Roi Sans Couronne paraissait ambitieuse mais le pari est réussi.
 

Yougarou

Pas de citation pour introduire cet artiste. En effet, nous terminons nos découvertes sur un beatmaker. C’est le charme de notre époque, des beatmakers influencés par le Old School mais ayant bien l’intention de faire rapper des artistes de la nouvelle école sur leurs instrus. Le résultat ? Des instrus boom-bap innovatrices et toutes fraîches, comme si ce style d’instrumentales était immaculé. Yougarou est un acteur de ce mouvement, des sonorités maussades, à deux doigts de reprendre le fameux « piano/violon » du rap français, vagabondant entre kicks et snares bien gras. C’est une ballade peu prosaïque, l’impression de s’engouffrer chez un antiquaire à la pointe de la technologie. L’antithèse est surprenante mais si vous n’êtes pas convaincus nous vous invitons à écouter l’Intro du EP de Sheldon, avec Yougarou à la prod.

Si vous avez aimé cet article, n’hésitez pas à le partager avec les petites icônes ci-dessous, et à rejoindre la page facebook ou le compte twitter pour suivre les actualités que Le Rap en France vous propose.