« C’est l’histoire de quelqu’un qui naît dans la merde, qui subit les aléas de la vie et qui, malgré tout, tente d’atteindre la sérénité. Un lotus dans un marécage, cette fleur qui pousse dans le limon, traverse l’eau et s’épanouit au ciel. »(Terre)
Dernière partie du triptyque Lucide,Transe-Lucide est une composition basée sur la thématique du lotus comme concept transversal. L’album se déploie en trois mouvements bornés par de brèves interludes (Terre, Eau, Ciel) qui représentent les trois états ou étapes de l’évolution du lotus comme de l’élévation spirituelle.
En conséquence de cette structure imagée, ce neuvième album présente un univers artistique abondamment étoffé. Car s’il regroupe différentes approches musicales, cet album ne fait pas du tout dans la nuance. Tout noir ou tout blanc, seule l’impression d’ensemble est métissée. Le rappeur indique d’ailleurs lui-même que c’est un album de «contraste».
En effet, une écoute suffit pour distinguer la schizophrénie auditive de l’opus. La tonalité des morceaux correspond souvent à l’élément mis en jeu avec, dans un premier temps, des morceaux très marqués par les codes d’un rap game terre-à-terre, égotripés et parfois irritant(MC kissinger, Rap Genius, Kamikaze..) jusqu’aux fragments plus lisses et mélodieux des morceaux de la deuxième et troisième partie (Kadija, Echo, Happy End). Au tournant de ce timbre plus aérien, le morceau Spirales esquisse une intuition saisissante sur les dynamiques de vie et permet d’effectuer cette transition avec intelligence. D’autre part, on ne manquera pas d’apprécier un morceau fin et léger comme le cinglant King of cool qui emprunte le même ton décomplexé que le fameux Toussa toussa de l’album précédent. Enfin, c’est sur le très explosif Burn Out (Sayonara) que les effluves punk de l’album Dans le ventre du crocodile ressurgissent.
Quant au discours d’ensemble, Disiz maintient cette attitude proche voire fraternelle vis-à-vis de l’auditeur. Le tutoiement – souvent anaphorique -comme les références récurrentes au quotidien et à sa banalité placent la poétique du rappeur dans une volonté de partage et de simplicité. Disiz prône une quête acharné de l’amour et s’exclame, par exemple, dans le morceau Luv (Prends le risque) « On doit s’aimer, putain de merde, c’est la solution ». Le rappeur appelle l’auditeur à prendre le « risque d’aimer », l’audace d’être heureux, c’est-à-dire naïf aux yeux du monde.
De plus, quelques évocations religieuses apparaissent dans ces oraisons de tolérances : « J’aime Mohammed, Moise et Jésus ; et ça j’devrais le nier ? »(Complexité française, en compagnie de Simon Buret) comme dans des allocutions plus personnelles : « Mon premier déclic c’est Dieu, c’est ma première cause et la conséquence est que je me bats pour être pieux, que je rythme mes journées en cinq séquences… » (Echo).Trace d’ouverture d’esprit et de sensibilité, cette teinte lumineuse caractérise à elle seule les intentions du rappeur.
Le titre de l’album propose d’ailleurs une multitude de sens qui empruntent la voie de cette bienveillance. La définition du terme translucide, comme « ce qui laisse passer la lumière sans être totalement transparent » recoupe cette imagerie qui obsède l’auteur : le clair et l’obscur, la lumière et l’ombre ou encore cette petit bougie dans une pièce sombre sous le pinceau de De La Tour. Enfin, l’oxymore « Transe-Lucide » dessine une nouvelle fois cette idée de contraste entre l’état second de la transe et la conscience clairvoyante de la lucidité. A quoi ressemblerait donc une transe dans la lucidité ? Sûrement à cet ensemble de dix-sept titres osé et original. Car c’est bien le dépassement des contraintes et des contradictions qui anime Disiz avec, par exemple, la question du parcours identitaire qui reste très présente. Mais à l’image de l’identité musicale de l’auteur, elle reste « non-identifiée » voire non-identifiable tant elle s’éparpille et s’augmente au fil des rencontres. Avant-dernier morceau de l’album, le très bon Complexité française digresse longuement sur ce faux problème.
Quant à sa position artistique même, le rappeur adopte un discours concerné et une démarche extrêmement positive quant au rap en tant qu’engagement sur le champ social. Comme il le scande dans Rap Genius : « Fuck le rap conscient, fuck le rap bling-bling, vive le rap utile ! » Disiz semble avoir conscience des aptitudes que possède le rap à la transformation concrète de la réalité à travers les références, les représentations et les émotions qu’il emploie. Et si nous pourrions lui reprocher des intérêts commerciaux à l’écoute de quelques morceaux orientés « grand public », il conviendrait plutôt de saluer l’audace artistique de Disiz qui n’hésite pas à créer hors des conventions du moment comme en plein dedans. Atypique dans sa façon de traiter les différents goûts et genres musicaux à travers le prisme du rap, cet opus n’est peut-être au fond qu’un tableau représentatif du monde moderne et de la mondialisation culturelle.
L’artiste poursuit donc sa quête d’exemplarité dans cette pépite pleine d’aplomb et s’élance à la recherche d’une éthique valable dans un monde au bord de la névrose, voire déjà immergé dedans. Plaidoyer pour l’audace et l’espoir, Transe-Lucide est d’abord un appel à sortir la tête de l’eau, comme le lotus.
je viens de découvrir votre site déjà super site. Je vous félicite un médias uniquement dédié au rap français qui en parle bien c’est rare même trop rare.
Parenthèse fini alors je suis un grand fan de Disiz ( moins de la peste) ça façon dont il est revenu dans le rap tout le discour autour de lucide et extra-lucide m’a beaucoup plus.
Mais en écoutant 2-3fois l’album transe-lucide j’ai étais un peu déçus. L’atmosphère et la vitalité qu’on trouvé dans lucide dans les vendredi c’est sizdi et un peu moins dans extra-lucide a disparu dans cet opus transe-lucide.
Tu retrouve l’artiste qui se prend trop la tête dans la recherche des ces instrus qui au final ne sort pas quelque chose de plaisant à écouté. Et même la musique burnout que bcp de personne apprécie, je trouve que le punch la façon de faire qu’il avait au début de sa trilogie a disparu laissant place à un concept ( découpé l’album en trois parte selon l’évolution du lotus)l’enfermant dans un style ou son expression tant musicale qu’au niveau des textes est bridé. Et notament quand il explique que ces 1er sons de l’album on été pensé comme il pensait au début d sa carrière. Pourquoi s’enfermer dans ce concept et ce forcer à refaire des sons qu’il ne peu plus écrire car son évolution sa maturité ne lui permette plus de le faire ?
Si il a envie de rapper sur des instru plus classique qu’il le fasse pas de soucis mais il n’est pas obligé de ce mettre dans un autre personnage qu’il n’incarne plus aujourd’hui.
Et puis outre cette première partie quand il revient à la fin de son album aux choses qu’ils nous avaient habitué dans les précédents albums de la trilogie. La profondeur de texte le sample sont d’un niveau inférieure à ce qu’ils nous proposé dans les autres albums.
Je vais continuer d’écouter cette album pour étre sur que ce n’est pas un mauvais appriori dut aux premières écoutes.
Mais bon quand j’écoute » la haine » et » compléxité française » qui est l’un des morceaux phare de l’album de disiz la différence en terme de qualité est frappante.
Sinon le morceau rap genius vient redorer le blason de cet album.
Ce dernier opus de la trilogie de Disiz est tout simplement énorme. Il nous livre ici un album Rap d’une qualité rare et il conclut ainsi magnifiquement son travail sur la Lucidité.
Une fois de plus les sonorités sont différentes des codes établis du Rap et comme il le dit si bien dans « Prélude à la rébellion des cœurs » dans Extra-Lucide, il « déteste qu’on le mette dans une case ». Effectivement son Rap est impossible à classer tant au niveaux des thèmes traités que des ambiances musicales utilisées.
En résumé un très bon album Rap, bien présenté à travers cette chronique !