Pour ceux qui ne connaissent pas, Bigflo et Oli sont deux jeunes rappeurs issus de la scène musicale toulousaine qui commencent à se faire une petite place dans le monde du rap. Ces deux frères, âgés respectivement de 21 et 18 ans, débarquent avec un petit vent de fraîcheur en proposant un style bien à eux. Un petit accent du Sud, une maturité précoce et un art de la rime quasi inné.
Il y a quelques temps déjà on découvrait ces deux frangins sur la scène des Rap Contenders où ils ont vraiment éclaté. On les retrouvaient quelques temps plus tard sur des morceaux de qualité comme Pourquoi Pas Nous ou encore le morceau L’héritage dont les paroles étaient déjà lourdes de sens et dont les clips ont rencontré un fier succès, avec notamment la présence de rappeurs comme Orelsan ou Dadoo pour ne citer qu’eux. On se devait donc de suivre le parcours de ces jeunes très prometteurs.
Un petit projet de 5 pistes qui commence par un morceau simulant une rencontre avec l’esprit du rap, censé leur donner bénédiction pour prendre la relève. D’entrée de jeu, Bigflo marque l’auditeur par une phrase qui tape : « Ils veulent m’arracher la main mais j’ai quand même envie de la tendre, demain c’est loin mais j’ai quand même envie d’attendre ». Vous noterez la très belle référence au classique de IAM. D’autres références parsèment également ce morceau, dont une en clin d’œil à NTM : « Les temps sont durs faut pas qu’on se ramollisse, j’ai rêvé que Molière écrivait « Nique la Police » ».
La poursuite de l’écoute du projet nous amène au titre Gangsta une critique légère et amusante des rappeurs blings blings qui ne cessent d’écrire des textes sur les voitures, les femmes, l’argent ou les armes et qui s’affichent avec dans leurs clips. Encore une fois on trouve un style bien pied-à-terre chez les minots : « Je ferais quoi d’une Ferrari, j’ai toujours pas le permis », « Moi je suis allé en prison mais qu’au Monopoly ».
Le morceau qui suit, intitulé Quand même fait fortement penser à des textes d’Orelsan. Il tourne autour des choses banales de la vie, auxquelles tout le monde peut s’identifier : « Tu vas faire les courses et t’as pas pris la liste, t’as oublié un truc mais tu fermes la valise », « Je dis bonjour mais ce type me réponds quand même « bonsoir » ».
Le titre suivant Jeunesse Influençable est plus sérieux, plus posé, et dénonce sur plus de 5 minutes les problèmes de la jeunesse actuelle. Encore une fois, les couplets sont très soignés et pleins de références. Je pense notamment à la phrase « Ça commence par un « t’es pas cap » et ça finit par un enterrement » qui fait référence aux tristes affaires des Neknominations – qui auraient déjà fait 5 morts sur de bêtes concours entre jeunes. Les notes de violons accentuent le côté triste de ces « choses » qui touchent la jeunesse de manière quasiment inévitable : « Faut être honnête, on parle plus à nos mères mais on partage tout sur internet », « On tire des taffs pour oublier qu’on en trouve pas »
Le dernier morceau est un titre qui fait l’effet d’une bombe. Un story-telling de qualité inouïe basé sur des notes de piano et une mélodie grave. On retrouve Bigflo dans la peau d’un père de famille qui tombe dans la déprime, sa femme le trompe et il rêverait d’un monde meilleur pour sa fille, sans pouvoir lui offrir : « Je crois que ce soir je vais faire une connerie ». On retrouve Oli dans la peau du voisin, témoin de la descente aux enfers du défunt, qui se dit qu’il n’est en fin de compte pas si différent de lui : « Qu’est-ce qui m’empêcherait de faire pareil ? ». On retrouve Kyan Khojandi dans le clip puisqu’il y occupe le rôle principal et ça surprend.
De la qualité, de la jeunesse et des textes qui font mouche. Bref, on a aimé cet EP.