Alors qu’OG, le dernier album de Moise The Dude, est sorti il y a maintenant 2 mois, retour sur la dernière galette d’un mec “pas complexé du slip”.
De prime abord, lorsque l’on aime le rap et qu’on voit les lettres O et G accolées, on pense direct à Original Gangster, la formule notamment popularisée au début des années 90 par Ice-T. Celui qui joue aujourd’hui le rôle d’un flic dans la série New-York Unité Spéciale y glorifiait la vie incroyable de ces grands du quartier qui n’avaient peur de rien, faisaient des teufs de ouf, et étaient prêt à tout pour faire de l’oseille, quitte à y laisser la vie. Dans la bouche de Moise The Dude, comme il l’expliquait récemment chez nos confrères de l’ABCDR du son, il faut plutôt retenir l’aspect « mec qui se démerde » de ces fameux gangster originaux : malgré les difficultés auxquelles ils sont confrontés, ils ne se débinent pas, et les affrontent comme des bonhommes. Un sens de la débrouillardise que le Mo formule d’ailleurs de façon explicite dans le morceau Horizon : “Nique sa mère vos financements participatifs je me débrouille comme un grand, finalement c’est ça être un vrai OG”.
Ce côté Do It Yourself, le rappeur originaire de Chartres le distille au gré de 9 titres sur lesquels on retrouve tout ce qui fait le charme de sa musique : une misanthropie mélancolique, scandée avec un flow nonchalant sur des prods laid-back. Après le très sombre Keudar sorti l’année dernière, album lequel il racontait en filigrane une douloureuse rupture amoureuse, avec OG, le Dude revient avec un skeud qui se révèle être un concentré de la musique qu’il propose depuis le début de sa carrière solo : on y retrouve le côté à la fois cool et déprimé du triptyque The Dude volume 1 et 2 / Dudelife, et des chansons sur les meufs et pas mal d’introspection comme il le faisait sur Keudar. On retrouve également des punchlines bien senties (“vos chaînes en or restent des chaînes / vos femmes libérées restent des chiennes”), des références de geek du rap (“Je me soucie pas des gossips qui m’a pas cru m’a pas aidé / Regarde ma queue tu te rappelles de moi baby”, en référence à un célèbre morceau de Booba), ainsi que des références aux films et aux séries qui l’ont marqué (coucou Les Soprano). Sur la forme, on a le droit à des morceaux à thèmes et d’autres plus freestyles, tandis qu’il semble avoir définitivement laissé l’autotune de côté, lui qui l’utilisait beaucoup à l’époque de Dudelife.
Au rayon des nouveautés, après avoir exploré des thèmes perso et assez noir sur Keudar, le Mo semble davantage apaisé, et tourné vers le monde extérieur. En découle un Moise en mode “daron” lorsqu’il parle des jeunes et de leur fascination vis-à-vis de la violence ( “la rue c’est pas ran-ma / On n’est pas censé y voir des fils de diplomates”) ; pour ce qui est de son rapport avec le sexe opposé, après avoir été le symbole de ses échecs amoureux, les femmes accompagnent désormais ses petits moments de gloire qu’il s’autorise avant de retourner au charbon, que ce soit au bord de la mer sur Spring break et Horizon, ou avec « sa racaille du 95 » sur Lambada. Et surtout, malgré le côté résigné qui traverse toujours autant son oeuvre (“je préférerais tous vous voir morts et non pas en vie”), on voit poindre une lueur d’espoir que l’on avait rarement entendu jusque-là, si ce n’est lors de ses jeunes années avec le Bhale Bacce (“Vous trompez pas hein, moi je roule pour ma gueule / Mais j’ai compris que l’intérêt de tous est aussi le mien”). En appuyant là où ça fait mal (« Comment veux tu qu’on s’en sorte tant que le chien reste dans sa niche »), Moise, à sa manière, incite le peuple à se bouger les fesses en montrant que lui-même le fait à son échelle, même si c’est sans gaieté de cœur (“je partage par principe et non par envie”). Être un exemple pour les autres sans le vouloir, finalement, est-ce quelque part ce ne serait pas ça aussi, être un vrai OG ?