Chroniques

[Chronique] Georgio – Nouveau Souffle

Uppercut novateur dans nos tympans, chers auditeurs (et auditrices, s’entend). Qui l’eût cru? À part Lustucru, surement personne: un rappeur de 22 balais qui sort une mixtape composée une fois par semaine en featuring avec ses plus fidèles suiveurs, même aux States ça ne s’était jamais vu! En effet, le concept arrive tout droit de chez nous, de nos bons vieux terroirs. Comme quoi, Leclerc a bien raison: nos régions ont du talent! Et les honneurs reviennent au tumultueux Georgio, légitime relève du rap du 18ème, digne héritier du Trône de… Pardon, je m’emporte. En tout cas, la description du projet peut paraître saugrenue aux premiers abords, mais laissez-nous le démastificotier (du latin mastificus, -um, -ul, « mettre à nu ») et vous vous rendrez compte de la prouesse du jeune homme.

Le concept est simple: chaque semaine (du 13 Janvier au 28 Février), Georgio nous proposait 3 différents beats sur son site, et chaque visiteur avait le droit de voter pour sa production préférée. Celle qui avait récolté le plus de « Like » remportait le tournoi. Dès lors, Georges grattait un texte, l’enregistrait, le son passait au mixage pendant que lui-même allait préparer le clip. C’est à la fin de ces 2 mois d’intense écriture que le projet sort en téléchargement gratuit sur Internet, augmenté du son Café froid et de son instru.

Rapologiquement parlant, Georgio ne fait aucune folie, aucun morceau qui restera dans les annales, tous étant bien loin d’Homme de l’ombre. Aucun n’est désagréable pour autant, et le projet se laisse écouter malgré le manque de profondeur et d’harmonie. En effet, les morceaux se suivent et se ressemblent autant que Verbal Kint et Batman: on passe sans vergogne d’un beat dubstep en solo à une prod boom bap réunissant toute la famille 75ème session de Georges, après être passé par la nécessaire case introspective. C’est un vrai festin d’hétérogénéité que le rappeur nous offre. Et comme toute réception festive qui se respecte, les invités sont de taille. Après avoir écarté Jul (AKA Assurancetourix) du banquet, Georgio dévoile une guest list surprenante: son frère de la famille de frites surgelées Nekfeu, le fidèle Sullyvan et, en somptueux figurant sur Comme une balle, Tsh-Tsh man alias Tonton du rap game AKA Lino. Malgré les convives de marque, le manque d’homogénéité est flagrant, et cela donne un rendu découpé, haché.

Mais le succès musical n’était pas le but de l’EP, et ses faiblesses ne marqueront pas les esprits. Car le jeune artiste a réussi le tour de force de pondre un texte et un clip par semaine, et de tenir cette cadence haletante pendant 2 mois. Qu’est ce que cela prouve? Plus que de la productivité, cela montre l’ambition et la témérité de l’autoproclamée rock star qui, du haut de ses 22 ans, en est déjà à plus de tapes que la majorité des rappeurs français. Et épargnez moi vos discours de vierges effarouchées du genre « Ouais mais mieux vaut la qualité que la quantité« : peut-être avez-vous déjà entendu parler de Tupac Shakur (en gros c’est un black américain qui est mort et qui faisait des chansons dans lesquelles il parlait de changements, au pire regardez sur Wikipédia): il était le rappeur le plus productif du game de son époque, et la qualité de son œuvre (dans son intégralité) est indiscutable. Comme quoi, au delà de non seulement rimer, qualité et quantité peuvent aussi se conjuguer.

De plus, le projet 9 titres À L’Abri, rejeton de Nouveau Souffle, sorti le 19 Mai, soit (seulement) 2 mois et demi plus tard, vient prouver l’ouverture d’esprit du jeune homme, sa maturité et sa créativité, et contrebalancer la tape précédente. Le clip de A l’abri est spectaculaire, tant dans son concept que dans sa conception, et l’intelligence du texte de Tour de Babel sont deux preuves irréfutables du talent de Georgio.

Nouveau souffle est un baptême. Une transition. Une preuve. Malgré ses lacunes musicales, absolument pas choquantes, c’est un projet qui rend optimiste quant au futur de ce game français que certains trouvent figé. Novateur et participatif, il démontre la proximité que l’artiste souhaite entretenir avec son public. Et cela fait du bien de voir que les possibilités quasi-infinies d’internet sont utilisées à des fins si louables.

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À proposLeo Chaix

Grand brun ténébreux et musclé fan de Monkey D. Luffy, Kenneth Graham et Lana Del Rey, je laisse errer mon âme esseulée entre les flammes du Mordor et les tavernes de Folegandros. J'aurai voulu avoir une petite soeur, aimer le parmesan, et écrire le couplet de Flynt dans "Vieux avant l'âge". Au lieu de ça, je rédige des conneries pour un site de rap. Monde de merde.

2 commentaires

  1. Tu n’as pas tort, j’aurais effectivement pu le mentionner.
    Merci d’avoir pris le temps de tout lire et de laisser ton avis Julien !

  2. Il aurait été intéressant d’évoquer les mails envoyés par l’artiste lui-même en fin de chaque semaine. C’est une communication d’un genre plutôt nouveau en France, cela mérite d’être relevé, et c’est aussi un très bon moyen de collecter les adresses mails de son public (à des fins marketing). Rappelons que Fonky Flav’ participe à aux projets de Georgio.

    Bon article 🙂

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