Chroniques

[Chronique] Ol’Kameez – 1.5

Il est vrai que je suis terriblement en retard sur cette chronique, ces trois mois de vacances (vive la fac) ont été fatals pour mes capacités d’organisation… Et pourtant, profitons de mon manque de sérieux pour redonner un bref coup de projecteur sur un projet gratuit que vous n’avez peut-être pas encore acquis. Il était pour nous essentiel de vous empêcher de passer à côté de cette petite bombe de dix titres.

Walter et Skyle reviennent une deuxième fois sous le nom de Ol’Kameez (comprenez camisole) avec ce Volume 1.5. Dans la lignée directe du Volume 1 sorti le 22 janvier 2012, ce nouveau disque est tout d’abord étonnant. Une tracklist soignée, une belle pochette et des collaborations dignes d’un grand album. Et le tout gratuitement !

Alors on télécharge, on décompresse et on fait le grand saut : on écoute ça. Première surprise, le morceau d’introduction n’est pas une simple superposition de samples et d’extraits de films mais bien un vrai morceau, l’idéal pour vite comprendre l’état d’esprit des deux artistes. Les choses seront claires dès la première ligne : « J’en suis pas à mon premier seize mesures ».

Le morceau suivant est déjà plus conventionnel : un sample qui tourne et deux MCs qui kickent avec talent. Véritable preuve de parfaite symbiose entre les deux artistes, ils enchainent les couplets en alternant les rôles, on peut aisément imaginer les compères se passant le micro tant la cohésion est bien rodée. Ad Patres est ce morceau propre et agréable aux pans de storytelling, finalement assez court car sa durée avoisine les 2:30 et enfin essentiel sur ce projet, les sons les moins risqués formant un gage de constance et de stabilité de la qualité.

Arrive ensuite Le Toboggan Part II en featuring avec Tenchoo. Morceau bilingue français/anglais à la sonorité plus sombre, les trois artistes semblent avoir un ton et un flow plus incisif, presque agressif. C’est un morceau rapide composé de trois couplets laissant une place importante à la prod. L’atmosphère est morbide dès la première ligne « Fracassé, atteint, j’aime casser des vertèbres » et se poursuit tout au long du morceau avec des phrases comme « ‘til the day that I would take it on a stage and start killing people » où Tenchoo parle de son esprit maléfique.

Pour être parfaitement partial et tout en sachant qu’un avis est subjectif, je vous présente alors le morceau suivant qui s’avère être celui qui je trouve le plus abouti et agréable malgré une simplicité apparente. En collaboration avec Fixpen Sill, À couvert est donc un morceau à quatre mains. Sa construction est rendue extrêmement intéressante par son évidence, sa rigueur mais également parce qu’elle attribue un temps de parole strictement identique aux différents artistes. En effet, chacun d’entre eux pose un seize mesures puis, dans le même ordre de passage, se voit octroyer un bloc de quatre mesures afin de conclure. Un peu désemparés, parfois dégoûtés, ayant résolument confiance en leur art, les deux duos nous offrent une belle démonstration de rap mêlant pessimisme et humilité au travers de lignes comme « J’crois, j’ai pu le voir depuis que l’empathie rétrécit / La chute est brève aussi assurément que le tir est précis ».

Entendez-vous Le bruit des ombres ? Oui, il s’agit bien d’un nouveau morceau assez grave et sombre aux kicks et snares plus puissants que jamais. Au loin, une mélodie claire au piano est perceptible, mettant en relief cette note d’espoir qu’il y a dans chaque voile de ténèbres. Agrémenté d’extraits audio grésillant et de lignes percutantes, ce premier bruit des ombres est des plus entrainants. Je parle en effet de premier car suit un second Le bruit des ombres moins ténébreux, plus mélodique. Empreint d’un optimisme presque latent, Skyle explique que « voler nos rêves ce serait comme voler sa baguette au magicien ». Cependant, vite dispersé, cet élan positif est balayé par le retour d’un registre plus sombre et plus adapté au titre du morceau : « Je marche dans les tréfonds, la ville dans mes pensées / Venu au monde avec de la chance, rapidement dépensée ».

Avant dernier titre du projet, Chez toi est à mon sens le plus étrange et le plus osé. Rythmé par les répétitions samplées d’une seule et même phrase : « Dis-moi comment c’est chez toi ». Ce morceau constitue avant tout une occasion d’aborder de nombreux sujets : argent, boulot, logement, potes, quotidien… Afin de ne pas déroger à la règle informelle de ce projet, les deux amis sont parvenus à glisser subrepticement des relents d’idées négatives avec par exemple : « Chez toi c’est moins bien que chez ton boss vu que lui a vraiment réussi ». Pari réussi, Chez toi est un excellent morceau rassemblant différents thèmes nous permettant de pénétrer la vie quotidienne de Ol’Kameez et ses membres.

C’est Poudrière qui vient fermer ce 10 titres avec une collaboration de haut vol puisque Alpha Wann & Nekfeu accompagne Ol’Kameez. Composé de quatre fois 16 mesures et d’une instrumentale soignée, Poudrière n’est pas construit autour d’un refrain ou d’une répétition comme Chez toi. Il s’agirait plutôt de comparer ce morceau avec À couvert : une construction simple et logique, une collaboration qui enrichit l’album au lieu d’ajouter simplement un nom sur la pochette, une production propre et entrainante malgré un caractère très répétitif, des rimes et jeux de sonorités intéressants. En résumé, ce morceau est une magnifique conclusion d’album. Pour paraphraser Alpha Wann : « Tu croyais que j’étais seul / Mais Ken et Skyle font des étincelles et y’a Walty qui couvre ».

Enfin, ne passez pas à côté de ce court mais riche projet, à écouter par tous temps, peu importe la saison. Si un certain côté sombre a pu me toucher, peut-être aurez-vous une lecture différente de l’album ou peut-être apprécierez-vous la mienne. Alors, un seul conseil : « cliquez, cliquez bande  d’auditeurs ».

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