Beatmakers Interviews

DJ Elite, entretien avec un oiseau noir.

Et puisque l’on parle de fierté, Rémi en éprouve beaucoup pour Elite : « Son succès est magnifique, il n’y a pas d’autres mots. Je savais qu’il allait aller loin, il avait le potentiel ! En plus du mix et du deejing, il avait la fibre artistique, la créativité et je savais qu’en se mettant à la production, il allait réussir à sortir de grosses instru pour le rap français. Les années ont passées et aujourd’hui je suis juste admiratif et tellement fier de lui. »

Cette période de la vie d’Eliott est étrange, rythmée par la vie scolaire la semaine et les prestations en boîte de nuit le week-end. Quand on lui demande si ça n’a pas effrayé ses parents, il répond par la positive : « Évidemment, mes parents ne comprenaient pas trop. Mais Gilles est venu les rassurer, il leur a démontré que j’étais sous bonne garde. » La réflexion naturelle quand on pense au milieu parfois louche de la nuit parisienne concerne la drogue et les excès en tout genre. Il balaie ça d’un revers de main assuré : “pour moi, quelqu’un qui se drogue est un être faible. Je n’ai même jamais envisagé d’essayer. Ça ne m’attire pas. Je suis curieux sur plein de choses mais absolument pas sur les substances.” Nous lui soulignons qu’il rejoint Nekfeu et plusieurs membres de l’Entourage qui font allusion à leur aversion des drogues dures dans leurs textes. Il confirme : “C’est une tendance dans le crew. Mais de toute façon, si tu veux qu’on soit potes, tu ne touches pas à ça. Les personnes que je fréquentais et qui tapait sont devenus des connaissances.”

Résumons : DJ Elite a 17 ans, il est DJ en club, sa notoriété grandit dans ce milieu très concurrentiel. Il mène une vie dont rêvent beaucoup de gens. Que décide-t-il ? Il arrête tout ! “Ça ne me ressemblait pas. Beaucoup trop de strass et de paillettes. C’est le milieu le plus superficiel du monde. Quand à 16 ans, tu vois un DJ sniffer sur ses platines, tu te dis que tu n’es pas à ta place.” Gilles Arki n’est alors pas très inquiet pour son poulain : “Je savais qu’Eliott allait finir bien plus haut qu’il ne l’était déjà. Il a toujours bien su s’entourer et son talent allait en séduire d’autres.” Le mentor ne se trompait pas.

Elite change de vie.

Mais quand on arrête quelque chose, il faut avoir un plan de secours. Sauf qu’Eliott n’est pas très bon en classe et qu’il navigue d’établissement en établissement et d’exclusion en exclusion. Sa mère comprend que son rejeton n’est pas fait pour le carcan scolaire et elle décide de l’envoyer en école d’ingénieur du son à Londres. On lui fait alors remarquer que sa mère a l’air d’être quelqu’un de très intelligent et de très supportif. Il s’enthousiasme d’un coup : “Ma mère est la femme de ma vie ! Mets-le en gros dans ton papier ! Il n’y a pas mieux qu’elle.”

Elite change de pays. Here we go, London ! Il est motivé par l’envie d’apprendre. “Je voulais avoir les bases. Tout ce qui peut te servir dans un studio d’enregistrement, pourquoi tu appuies sur ce bouton-là et pas un autre. J’étais le plus jeune, certains avaient jusqu’à 25 ans mais ça s’est très bien passé.” L’apprentissage se déroule bien, Eliott sort diplômé. Il revient en France pour changer complètement d’univers artistique. Le monde du cinéma l’attire et c’est au Conservatoire Libre du Cinéma Français qu’il atterrit pour une formation de trois ans, qu’il valide haut la main.

En lisant cet article, vous pourrez vous dire que le jeune parisien se cherche beaucoup mais il a une particularité primordiale, c’est qu’il va au bout des choses. Là où certains se seraient perdus en route, Eliott trace son bonhomme de chemin. Et il a une vision. Diplômé dans deux secteurs artistiques, il sait maintenant que c’est de la musique qu’il veut faire. Le cinéma attendra, Elite a rendez-vous avec l’histoire.

Parce que si la chance lui a souri une première fois quand il a rencontré son mentor, elle ne va pas hésiter à recommencer. Eliott monte un petit home studio dans sa chambre et commence à claquer des productions : “Ma première, c’était de l’électro. Après, j’avais un ami qui rappait, il avait quelques textes et j’ai commencé à lui composer des instrus. Quand je réécoute aujourd’hui, je pleure de rire tellement c’était mauvais.” C’est alors qu’il apprend via un pote qu’un jeune groupe de kickeurs cherche un studio pour enregistrer. On dit que la foudre ne tombe jamais au même endroit mais elle peut frapper deux fois la même personne. C’est encore une rencontre qui va changer sa vie. Ce groupe, vous l’avez deviné, c’est L’Entourage.

Il faut nous imaginer à quinze dans ma chambre, avec le micro au milieu. C’était n’importe quoi. On devait refaire les prises quinze fois parce qu’il fallait un silence absolu et que forcément, tout le monde rigolait.

À proposStéphane Fortems

Dictateur en chef de toute cette folie. Amateur de bon et de mauvais rap. Élu meilleur rédacteur en chef de l'année 2014 selon un panel représentatif de deux personnes.

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