Voici la deuxième partie de l’interview enfumée donnée par les MC’s de Phases Cachées. Vous pouvez retrouver la première partie ici.
Et puis, quand les gens quand voient « gratuit » ils n’ont pas le même intérêt pour le produit.
Cheeko : J’avoue qu’il y aussi un petit côté égoïste. J’ai envie de mettre mon cd dans l’étagère. Même qu’il y ait une petite édition vinyle ce serait classe.
Volo : Et puis on n’a jamais eu du 100% Phases Cachées. La mix-tape qu’on a faite, Phases B, ne comportait comme son nom l’indique que des faces B. On voulait sortir un truc pour faire de la scène et voir ce qui allait se débloquer avec tout ça. C’était dans l’optique de faire un EP après, on y est maintenant. On est sur des grosses instrumentales d’un mec avec qui on devait déjà bosser y a deux ans. Il a des grosses instrus cainris. Le mec vient du Luxembourg, il fait des instrus de malade, qui sont vraiment adaptées à ce qu’on fait, singulières et musicales. C’est des instrus qui correspondent à Phases Cachées.
Cheeko : Maintenant qu’on a des instrus à nous, on a l’occasion de faire un vrai premier projet. On peut marquer notre identité. On a envie de le sortir en physique même si ça doit prendre un petit peu de temps. C’est la bonne démarche. Et puis on se casse le cul, on aurait pu aller enregistrer à Paris, on est parti dans le sud à Fréjus pour enregistrer, avec des musiciens et des beatmakers. On le fait vraiment de manière professionnelle.
Volo : on est vraiment dans l’optique de développement du groupe. J’ai arrêté le taff un peu aussi pour ça, pour pouvoir faire des concerts et bosser sur l’EP à fond. C’est maintenant qu’il faut se laisser la chance, ce n’est pas quand on aura 30 piges. Je préfère être en galère maintenant et tenter le coup plutôt qu’avoir des regrets à 30 ans.
Vous savez combien vous allez en presser ?
Volo : On ne sait pas. Pour l’instant, on est vraiment sur la création du truc.
Cheeko : Après forcément si y a une sortie physique nationale, il ne s’agit pas juste de le presser. Concrètement, si tu fais une date à Grenoble et que les gens ils kiffent, le lendemain ils peuvent retrouver ton skeud. Quand t’es indépendant tu peux aussi avoir un label qui te défend, avoir une promo et des gens qui font le taff humainement et honnêtement, et c’est ça qu’on cherche. Ce n’est pas non plus d’être là à passer le disque de la main à la main tous les jours même si c’est super respectable et qu’il y a des gars comme 2spee Gonzalez qui le font.
Volo : Sinon on est plus un groupe qu’a envie de développer la scène. Donc utiliser le moyen de l’EP, c’est vraiment aussi pour faire de la scène et sortir de Paris.
Vous avez développé tout ce qui va avec au niveau merchandising ?
Volo : C’est pour ça aussi qu’on a sorti des produits gratuits. On a toujours eu des plans qui sont tombés un peu à droite à gauche et là on est plus en mode recherche de la scène, ce qu’on n’a jamais vraiment fait. On a quand même des plans qui tombent en province parce qu’on a un peu saigné Paris. Paris c’est petit, le public est un peu différent, ce n’est pas la même chose.
Cheeko : On a beaucoup joué à Paris. L’idée c’est aussi d’aller voir ce qui se passe en province et partager la scène avec des locaux.
L’idéal ce serait de suivre le modèle de 1995 pour vous ?
Volo : On kifferait faire les scènes qu’ils font. Mais après, ça leur est un peu tombés dessus comme ça, ils ont eu le buzz puis les grosses dates.
Cheeko : Et ce qui est bien c’est qu’ils ont réussi contrairement à plein de gars qui ont buzzé, à transformer le buzz en physique. Ils ont un super tourneur, ils font plein de dates, plein de tournées. Pour un groupe qui il y a un an ne jouait nulle part, là tu les vois ils font les grandes scènes de tous les festivals. C’est grisant et je ne leur souhaite que le meilleur mais il faut bien garder les pieds sur terre.
Volo : Après, je ne pense pas qu’on soit un groupe à buzz. On se solidifie au niveau scénique et c’est important de passer par la case concert. Naturellement, on passe par le bon escalier.
Vous avez une approche très reggae finalement. Un groupe comme Danakil tourne sans cesse.
Cheeko : Effectivement, il y a un côté un peu festival. Des groupes comme Dub Inc’ et Danakil sont partout ! Ça fait dix ans qu’ils tournent et maintenant, ils tapent des Zénith.
Ça doit être grisant cette fierté d’avoir tout réussi tout seul.
Volo : Clairement, c’est une fierté. Maintenant, ils peuvent créer leur label. Ça marche beaucoup dans le reggae. Moi qui suis dedans depuis longtemps, j’ai toujours connu ces groupes là en indépendant.
D’Clik : Pour en revenir au sujet de base, c’est clair qu’on kifferait avoir les dates de 1995. Après, c’est quelque chose qui prend du temps et c’est tant mieux.
Cheeko : Ce qui est bien, c’est qu’on commence à devenir un vrai groupe de scène. Quand il y a un de nous trois qui se plante, les deux autres reprennent à sa place. On commence à avoir le truc, on est solides entre nous.
Puisqu’on parle de la nouvelle scène du rap français, on a l’impression que les gens ne vous catégorisent pas trop dedans.
Cheeko : Clairement, il y a un côté freestyle que l’on n’a pas. On a toujours été refrains et morceaux carrés. Même sur Face B, presque tous les morceaux ont des refrains.
Volo : Même quand tu regardes, tous les groupes qui débarquent ont des gros posses. Nous, on est tous les trois. Après, on a des connexions à droite et à gauche mais on est avant tout dans une logique de groupe.
D’Clik : Et comme Volo chante, ça nous ouvre aussi beaucoup plus de portes. On n’a pas besoin d’aller chercher quelqu’un d’autre.
C’est sûrement pour ça que le public ne vous cantonne pas au rap.
D’Clik : C’est vrai qu’on n’a pas forcément un public rap. On nous dit souvent en concert que les gens n’écoutent pas de rap mais que nous, ils aiment bien. Ça nous va, tant qu’on nous aime bien dans le rap.
Vous n’êtes pas les plus productifs du milieu, comment ça s’explique ?
Volo : C’est vrai que parfois on arrive dans des sessions studios avec d’autres mcs et les mecs sont là à écrire leurs couplets juste avant. On n’a pas cette habitude-là. On réfléchit vraiment nos morceaux. On est toujours dans une certaine remise en question.
D’Clik : C’est pour ça qu’on paraît moins productifs.
C’est un peu une méthode de travail d’un autre siècle à l’heure de l’instantanéité.
Cheeko : On a surtout un vrai respect pour le disque, l’objet et la musique. Si tu sors un cd, il faut que tu sois fier de le mettre dans ta discothèque, entre deux putains d’albums.
D’Clik : En vrai, l’EP on aurait pu le faire en trois mois. Mais six mois après, on l’aurait réécouté en trouvant que c’est de la merde.
Volo : L’important, c’est de remettre nos morceaux en question et de les tester sur scène.
La suite la semaine prochaine, même jour et même heure.