Focus sur

[Focus sur] Zekwé Ramos

« Ferme la à tout jamais, laisse faire le putain de maestro ! » El maestro

Aujourd’hui, l’une des problématiques du rap français est le manque de plus en plus important d’identités fortes. Dans ce rap jeu, la qualité s’égare parfois au profit de la quantité. Si vous êtes attentif à tout ce qu’il peut se faire autour de cette musique, vous remarquerez que rares sont les artistes qui savent briller par leur technique, leur originalité mais surtout par leur intelligence et leur capacité à se remettre régulièrement en question pour progresser.

« Ils s’fatiguent à faire des classiques ils en oublient d’être originaux » Libre 

C’est dans ce contexte que Zekwé Ramos a su se démarquer. Évoluant à ses débuts au sein du label Néochrome au côté des prometteurs AlKpote et Katana (formant alors l’Unité 2 Feu), il a sorti en 2007 le troisième volet de Rap De Banlieusard. Le public découvre alors la sonorité unique de son œuvre, son grain de voix authentique, un peu cassé mais surtout une personnalité forte, un rappeur de hargne oscillant entre mélodies engagées et freestyles largement décomplexés.

« Le retour de flamme est possible, dis-leur qu’ils s’préparent, on prend du poids on grossit, on exige des parts ! » Entreprenant

Le rappeur s’affirme aussi comme compositeur, produisant pour un bon nombre de ses pairs : Sinik, Seth Gueko, Dany Dan, AlK etc. Passionné, il enchaîne collaborations et featurings variés et élargit au fil du temps son public. Ses influences sont nombreuses, de Wu-Tang à IAM en passant par Nas, NTM, ou encore Jay-Z. Originaire d’Évry, d’un père français et d’une mère capverdienne, Zekwé se nourrit d’inspirations de tous horizons, ce qui alimente son style ainsi que sa technique de plus en plus aiguisée. Le rappeur a cette qualité, cette inventivité qui lui permettent de tenir son auditeur sur tout un projet. On suit avec plaisir et curiosité la variation de ses musiques, les orientations nouvelles de sa direction artistique. En 2011, Zekwé sort le premier volet de sa mixtape Seleção, qu’il poursuit trois années plus tard. Seleção 2 est plus « mature » et surtout plus élaboré, phases aiguisées, punchlines décalées, textes à thèmes, subtils et profonds s’entremêlent sur des prods uniques notamment en matière de rythmes. Il n’hésite pas à passer d’un rap réaliste, s’attardant sur les galères de la vie et la motivation sans borne pour s’en sortir (Somnambule) à un rap plus intuitif, conté comme une histoire foireuse (La fille d’à côté).

« Ma scolarité partait en fumée, on déclenchait l’alarme incendie / Maman chérie me bottait le cul mais je fumais trop j’ai rien senti » Somnambule

La richesse d’un MC, ou sa capacité à slalomer entre des styles différents,  c’est d’être capable de s’adresser aussi bien à des femmes de 15 ans qu’à des trentenaires avertis de rap français. Depuis le début de l’année, Zekwé a été entendu dans le nouveau (et génial) Memento Mori des Butters Bullets, sur le track Melle où le romantisme agonise. Mais surtout, après deux mois d’attente, il a sorti ZoMbie$. Le clip (aussi surnommée Merde visuelle) est une grosse claque réalisée par Giulian Romero pour Frappe Vision. Auditivement parlant, Zek nous surprend avec un style plus audacieux. Entre egotrip psyché et je-m’en-foutisme grandiose, il y a du talent à tous les niveaux : flow nonchalant et maîtrisé, attitude et texte assumés, prod ingénieuse. Dans le rap français, rares sont ceux aussi qui prennent des paris, des risques. Zekwé Ramos est de ceux là. Respecté par le public, les autres rappeurs et les médias, il possède toutes les cartes en main pour marquer son époque. Il est ce genre d’artiste qui s’améliore au fil des projets. Et finalement, la seule chose qui lui manque c’est la notoriété qu’il mérite.

 

À proposJeanne

En quête de la dolce vita absolue. Petites oreilles au service de LREF. Étudiante en communication malgré moi.

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