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[Chronique] Gaiden – Toxiplasmose.


C’est avec intérêt que nous avons écouté cet album, qui était pour certains membres de l’équipe l’un des plus attendus de cette année. Pourquoi ? Parce que Gaiden, c’est l’invincibilité au Rap Contenders, la ligue de battle a capella française. C’est aussi des textes censés et même presque profonds, sans pourtant tomber dans certains excès du rap conscient. C’est aussi un univers unique peuplé de spliffs, de mal être, de galères et d’humour. Disons le tout de suite, l’attente est comblée  et la galette que nous avons entre les mains mériterait sans doute bien plus de reconnaissance que celle qu’elle a eu depuis la sortie de l’album. Celui-ci affiche des instrus en phase avec les thèmes, souvent bien léchées, des thèmes variés, des featuring de qualité et surtout une bonne montagne de punchlines imagées et plus percutantes les unes que les autres. Étudions de plus près ce grand album d’un MC trop peu connu.

On a l’impression, à l’écoute de tous les titres, que le MC a voulu nous balader entre l’envie de rire et celle de partir en bad trip. Une partie des titres aborde avec dérision les dérives du rap game pendant que l’autre tire sans viser sur la société en général,  à travers le malaise d’un mec en descente de spliff.  L’album commence par En équilibre, un morceau à l’ambiance assez sombre et assez tranchant, avec une instru stressante à souhait. Ce n’est peut-être pas le meilleur morceau de l’album mais il a le mérite de nous plonger dans l’univers du MC. La vraie claque arrive au track d’après : Paix, amour et acte de barbarie est un OVNI dans le monde du rap. Ce morceau est de l’egotrip pur, appuyé par un clip et des paroles complètement psychés. Bien écrit, à coups d’images hautes en couleurs et de piques qui touchent juste (Fatality sur le rap conscient, c’est qu’une compèt de beaux parleurs, un combat d’bon sens). Tout y passe, Dieu, Jésus, les femmes, le rap, le Sidaction, etc… Même l’instru est étrange. Flava in Ya ear.

On va passer sur High Tech Phénomène, un morceau qui était déjà sur Dinologie vol.3 et qui tire sur les nouvelles technologies. Le refrain est un peu reggae, l’instru est fraîche, le morceau n’est pas mauvais mais le thème est devenu assez classique et le morceau ne sort pas du lot. Par contre, celui d’après… Nique le swagg est lui aussi une pépite. Comme tout bon morceau qui se respecte, là encore tout est dans le titre : on nique le swagg. Le swagg étant devenu indispensable à toute carrière dans le rap, Gaiden et ses 4 invités (Wojtek, VincenzKimble et Yoshi) déroulent leur contre-swagg, et redéfinissent le mot egotrip. Chaque couplet est presque meilleur que le précédent, des styles bien affirmés et la production est savoureuse. Alors fais nous plaisir, mets un sweat à capuche sale, un survêt et un caleçon souillé et déguste ces punchlines.

On peut aussi noter la présence de 2 interludes Rap Contenders sur l’album. Les instrus sont douces ou electro, au choix, mais les punchlines extraites de ces battles sont bien acérées. Cette façon de se la raconter tout en remerciant les Rap Contenders constitue pour nous un comportement exemplaire. Il s’agit de ne pas oublier, comme certains, que les RC ont été un formidable tremplin pour pas mal de carrières et que le minimum est de les remercier quand on a l’occasion. On vous épargne la longue et fastidieuse dissection morceau par morceau de l’album. Mais Dimanche et Entre le spliff et l’idéal sont certainement deux des meilleurs morceaux de l’album. L’instru de Dimanche est tout simplement parfaite pour ce morceau, comme le sont le refrain et les paroles. Avec Entre le spliff et l’idéal, ces deux morceaux complètent parfaitement le propos du début : la vision de la société par un mec en descente de spliff. Le regard sur la société et sur soi-même est extrêmement amer et désabusé, une leçon d’écriture et de sens. Un appel à tous ceux qui font du rap conscient en rabâchant les mêmes choses qu’il y a 15 ans, les instrus et le flow en moins : on peut, encore aujourd’hui, critiquer la société de manière tout à fait originale. Et on ne dit pas ça que pour Kery James.

En résumé, un excellent album, très bien équilibré, qui nous fait voyager à travers la quasi-totalité de l’univers rap. Il y a de tout dans cet album et quand les ingrédients sont de bonne qualité, le gâteau n’en est que meilleur. Alors soutenez l’artiste et allez vous acheter une part de ce dessert, il a du goût.

Rémi.

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