On ne présente plus A2H mais si par malheur vous ne le connaissiez pas, l’interview de l’ABCDR est très instructive. L’éclectique rappeur du 77 a posé son timbre de voix si particulier sur un nombre de projets affolants depuis le début de sa carrière. Toujours dans les bons coups et prenant de plus en plus de galons, Le Rap en France a décidé de lui rendre une visite dans ses studios avant la sortie de son prochain album.
Es-tu satisfait de ton premier album ?
J’en suis satisfait artistiquement mais je n’ai pas eu le temps de le finir correctement parce que j’avais vraiment envie de le sortir. Il y a quelques morceaux que j’aurais souhaité plus aboutir, certains sur lesquels j’aurais aimé retravailler les refrains et quelques instrus que j’aurais peut-être rejoué. Parce qu’il avait vraiment une vocation musicale, j’ai fait intervenir des saxophonistes, des bassistes, des claviers. On aurait pu prendre le temps de rejouer. Mais sinon, j’en suis satisfait car c’est un album qui me ressemble.
Ça s’entend, d’ailleurs.
Ouais, en terme de flow et d’instru. Après, j’ai fait plein de choses dont une tournée derrière et si je devais le refaire aujourd’hui, il serait différent. Mais à l’époque de sa création, c’était exactement ce que je cherchais.
Entre les deux, il y a eu le projet avec Alpha.
C’est encore autre chose parce que j’étais drivé de A à Z alors que c’est moi qui gère tout d’habitude. Ça fait grandir, je suis plus à l’aise aujourd’hui. Alpha, c’est le self-made man. Après on est vraiment différents. Je ne suis pas comme lui, très pointu dans un domaine. Même s’il est très éclectique, tu reconnais sa patte directement sur un son. C’était intéressant de bosser sur un projet comme ça mais je ne me vois pas faire que ça.
C’est un projet très réussi, en tout cas.
Il est bien, il est vraiment agréable. Il représente vraiment cette ride d’été.
En termes de vente, Bipolaire a bien marché ?
On n’en a pas vendu des masses. Ça a dû tourner autour de 1200 ventes, ce qui représente 60% des pressages. J’ai encore des stocks que je vends sur les concerts, ça m’arrive toujours. On est rentré à peu près dans nos frais au final.
Tu n’as pas eu énormément de promotion sur cet album ?
Et non, promo facebook ! On n’a pas pris d’attaché de presse ni de partenariat radio ou site. Du coup, on n’avait vraiment rien. J’ai véritablement sorti mon album sur facebook et je pensais que les réseaux sociaux avaient un autre impact. Mais je me suis rendu compte que quand tu n’as pas un énorme buzz, les réseaux sociaux ne te suivent pas tant que ça. On a défendu l’album comme on pouvait. En sachant en plus que j’ai eu pas mal de souci avec les clips, certains n’ont pas pu sortir pour diverses raisons. On en a clippé deux, au final. Et pour un quinze titres, ce n’est pas suffisant. Pour conclure, on peut dire que la promotion était un peu foirée.
Pourtant, il y avait quand même eu une belle soirée de lancement à la Maroquinerie.
Oui mais en terme de promotion, je pense que ça n’a pas été très bien compris. Vu que Némir était très attendu, je pense qu’on a cru que je faisais la première partie alors que c’était une scène partagée. Je crois qu’on a mal géré notre coup en faisant une co-release avec quelqu’un qui a plus de buzz que nous. Les pros attendaient vraiment Némir. Ils ont appréciés mon set mais il n’y avait pas d’attente. Hormis pour les connaisseurs qui savaient que j’envoyais un album.
Donc si je comprends bien pour ton album qui arrive, le principal axe de progrès sera la promotion.
Carrément. On a embauché Florent de MPC qui va gérer ce côté-là. On a déjà quatre clips prêts alors que l’album n’est même pas sorti. On essaie de démarcher un peu plus les radios, on ne sait pas s’ils vont rentrer les titres mais on va tenter avec Générations, Nova, Skyrock etc.
Il y a aussi les freestyles en attendant l’album ?
Oui alors ceux-là sont clairement ciblés pour les gens qui nous suivent depuis longtemps. C’est une piqure de rappel pour toute ma fan-base.
J’ai lu dans l’interview de l’ABCDR que tu te considérais comme un rappeur « monsieur tout-le-monde », un mec qui est dans l’entre-deux : ni la plus grande des cailleras ni le petit-bourgeois. Est-ce que tu espères par ce biais toucher un plus grand public ?
C’est vrai qu’on se positionne dans cette middle-class. Mais c’est pas forcément le but. Moi, je ne rappe que qui je suis. Je suis né dans un quartier mais j’ai déménagé partout, je suis dans la ride. Je suis un vadrouilleur ! J’ai pas UN endroit où j’ai grandi mais c’était dans le 7-7, entre Le Mée et Melun. C’était un milieu très modeste, je n’ai jamais vraiment eu d’argent mais je ne suis pas à cheval sur cette revendication. Greg Frite l’a très bien dit dans une interview : « on n’est pas assez caillera pour les cailleras et pas assez branchés pour les branchés. » C’est le propos qui représente le mieux ce que je fais. Donc je représente plus monsieur Tout-Le-Monde que les autres mais je touche moins de gens parce qu’ils ont besoin de s’identifier à quelque chose.
Et il existe toujours ce fantasme du rappeur.
Carrément. Et si on devait vraiment regarder, on a toute la caution street. Je pourrais revendiquer mon coin mais je préfère laisser ça à d’autres. Certains s’inventent des vies très bien.
Avec ce nouvel album, la scène sera toujours primordiale ?
Plus que jamais ! J’ai vraiment envie de le défendre au maximum. Sur scène, j’aime bien penser mes sets comme un album en plus avec des séquences qui n’existent que sur scène.
Est-ce que tu penses être à un tournant de ta carrière ?
Je crois, oui. Parce que je pense avoir fait quelque chose de plus abouti que la moitié des projets que je vois passer en rap français. Cet album, c’est vraiment toute ma vie. Les intrus sont travaillées par des gars de mon équipe ou des gars que je connais. C’est un vrai travail de fond. Un peu comme un Drake, qui bosse avec les mêmes personnes depuis le lycée. On est un peu dans cette dynamique et le disque est vraiment cohérent. Il représente vraiment A2H.
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