Interviews Rappeurs

[Interview] D6 : « J’ai exploré des nouvelles vibes, c’était une belle aventure »

Le 18 décembre, nous avions rendez-vous avec le rappeur D6, avant la Release Party secrète de son projet Bad D. L’occasion parfaite pour lui poser pleins de questions, pas forcément discrètes, au sujet de sa musique et de son EP sorti début novembre…

Au menu de cette release de qualité, organisée par le manager Léo Thomelet, que du beau monde au mic : Chanje (récemment sélectionné aux auditions IDF des Inouïs du Printemps de Bourges), KR (aka Monsieur Malsain, à checker ICI), Assaf (ex-ASF et membre du Panama Bende & Changerz) et bien sûr, la star de la soirée, le rappeur du 14ème, D6, accompagné du Juice Gang.

Bref, une bien belle soirée, dans un cadre très sympa du 11e arrondissement (qu’on ne vous révélera pas…) Durant leurs passage sur scène, les artistes ont fait vibrer le petit comité de chanceux qui ont pu profiter de la soirée. C’est donc Chanje, accompagné d’Herman Shank, qui ouvrent le bal, avec une énergie incroyable, que ce soit sur la scène de la Machine du Moulin Rouge ou dans un cadre réduit. C’est un artiste plein de talent dont nous vous en avions déjà parlé…  Vous pouvez toujours lire son interview pour LREF ICI.

Inséparable de ses lunettes noires, c’est KR qui monte ensuite sur scène pour ambiancer la salle. Encore un MC de Paris sud qui envoie du lourd. Si vous n’êtes pas familier de sa musique, vous pouvez notamment le retrouver sur le Planète Rap de PLK fin octobre… Avant de laisser place à D6, c’est Assaf qui vient représenter le rap du 14ème. En quelques titres, il se fait plaisir et déroule le tapis rouge pour D6, qui vient faire turn-up tout le monde pour célébrer la sortie de son EP Bad D (disponible ICI), entouré des siens…

Vous pouvez revivre cette belle release party sur notre profil Instagram ICI. Ce beau plateau n’était pas seulement l’occasion de nous régaler (s/o Léo Thomelet), c’était également la parfaite occasion de discuter avec D6. On vous raconte cette rencontre…

Coralie Waterlot
Coralie Waterlot

Pour commencer, c’est un peu cliché, mais pourquoi « D6 » ?

C’est une histoire de mon quartier… Il y avait un bâtiment en face de chez moi, et dans le hall, il y avait une boîte aux lettres DRI6. A force de me voir passer, les grands, qui traînaient dans le hall, ont fini par m’appeler comme ça, comme mon nom en vrai c’est Idriss. Finalement, j’ai raccourci en D6 et, voilà l’histoire. Et ça m’a permis de trouver le jeu de mot D6dément, qui est mon @ insta.

Comment tu présenterais ton projet avec tes propres mots ?

Expérimental de ouf, je me suis un peu aventuré vers des trucs que je connaissais pas vraiment sur ce projet. J’ai pris un peu de risques. Je suis allé voir ailleurs, donc c’est une belle aventure.
Bad D me fait kiffer, il me fait turn-up et il est marrant. Ça m’a permis de dire des trucs que je dis pas vraiment d’ordinaire, et en même temps, il y a des sons, comme Spaceclub, j’peux les faire écouter à ma daronne, malgré le texte un peu « controversé » [rire], donc c’est cool.

Pourquoi est-ce que tu as mis autant de temps à sortir ton projet ?

En gros, j’ai enregistré pleins de trucs et je savais pas vraiment comment sortir ma musique. Est ce que je fais pleins de singles, est-ce que je sort des sons un par un, … Bref, j’avais pleins de sons sous les bras et je ne savais pas quoi en faire. Après, je me suis entouré d’une bonne équipe, qui m’a aidé à me concentrer. Et puis, normalement ça devait sortir en juin dernier, mais j’avoue, j’ai mis du temps, et on pouvait pas le sortir pendant l’été… Du coup, j’ai aussi eu le temps de travailler sur le second projet…

Comment tu as travaillé sur ce projet ?

J’ai travaillé avec Simon/John Lemon, c’est un gars à moi qui est du 14ème et j’ai bosser avec Beemo, qui est un mec du 91 de base, qui a fait une école d’archi, qui est allé partout. On s’est rencontré grâce à des potes à la fac. On m’a dit, tiens y’a un mec qui fait de électro et il intéresse au rap. Du coup, je suis allé le voir, il était tout seul dans son coin, et au final, j’ai kiffé son son, il a kiffé mon délire et maintenant, on ne se lâche plus. Quand il est partir vivre 2 ans à Bruxelles, j’allais le voir là bas, on était tout le temps en train de bosser au tel, c’est vraiment mon pote de cœur. Il a fait la majorité des prods de Bad D, il a bossé partout, il a fait trop de truc, c’est trop mon gars. Avec Clément/Beemo, on a une vraie alchimie, on bosse trop bien d’un point de vue créatif.

C’est quoi du coup, ton processus créatif ?

Au début, je voulais sortir mon projet en mode super perso, j’ai un mini studio chez moi avec mon matos et je voulais tout faire de chez moi. Mais au final, la qualité ne me convenait pas, je voulais faire plus propre. Du coup, j’ai poussé pour aller en studio, j’ai tout refait. Je suis allé au DPL studio, donc s/o à eux.

@munchizz
@munchizz

Pourquoi le titre « Bad D » ?

En fait, c’est tout les trucs inavouables que je pense, que je vis. C’est un peu tout les trucs mauvais que j’ai balancé dans un seul projet, c’est tout le mauvais moi, le mauvais du D. Et du coup, inch’allah après, je sortirai un « Good D » avec que le bon…

Est-ce que tu peux nous présenter le Juice Gang ?

C’est ma famille, mes reufs qui font partout du même gang depuis toujours. Même s’ils sont pas tous dans la création artistiques, dans la musique, ce sont des gens autour de nous, c’est que les meilleurs, on se soutien, c’est que des gens sur qui tu peux compter. Après, niveau rap, il y a le noyau dur, mes gars Gilly G, Kass et Kesmo. C’est mes frérots de coeur, presque de sang. Le Juice Gang, on se connait depuis tout petit, on a pas envie de se lâcher.

Jusqu’ici, tu étais plutôt connu pour faire du rap de kickeur et ton projet est plus dans le turn-up rythmé, pourquoi ?

J’ai toujours eu cette fibre musicale,je suis toujours en train de chercher, d’essayer des nouvelles vibes. Et je suis super influencé par le rap US, j’écoute que ça. Avant, à l’ancienne, fallait prouver des choses, la tendance, c’était rapper sévère, faire du rap de kickeur. Mais moi, j’aime bien le chant, le RnB, que j’avais mis un peu de coté. Et puis, un jour, j’ai fait Sonner, et ça a été le déclic.

Tu as la réputation d’être assez proche de l’Entourage, quand on te cherche sur Google, les premiers trucs qui apparaissent sont les trucs que vous avez fait ensemble… Tu n’as pas peur que ça te colle un peu à la peau ?

Bah en soit, j’ai jamais vraiment fait de trucs avec eux, à part être leur pote et traîner avec eux. En vrai, je me suis jamais dit que j’allais lier ma musique avec eux, mémé si on a fait des sons ensemble, j’ai été sur des Planètes Rap avec eux. C’est mes potes, mais j’aime pas les étiquettes, chacun sort ses sons et fait ce qu’il veux. Après, j’imagine que sur le net, avec le référencement, c’est les trucs les plus consultés qui sortent en premier. Mais, j’espère que un jour, on changera la donne…

Du coup, tu penses quoi de l’étiquette « Rap Parisien » ?

Quoique il arrive, mon son, c’est du rap parisien. Je suis né à paris, je vis ici. Mais, comme je disais, j’ai du mal avec les étiquettes. Mettre des noms sur des trucs, sur des sensibilité hyper variées, j’ai grave du mal. Pour moi, ma musique coule de source, c’est presque un truc évident qui n’a pas besoin d’être expliqué.  Quand j’écoute un truc, je cherche pas à les mettre dans des catégories ou de dire ça, ça va avec ça, on le range dans ça, etc. Je me dis là, le mec il cherche à parler de quelque chose, il veut s’exprimer, et voilà, c’est ça qui est  intéressant. Je kiff les mélanges.

C’est quoi les bails avec la couleur violette ? Les sappes violettes, les cheveux violets…

J’adore ça. C’est MA couleur.
Il y a pleins de gens qui kiffent pas, il aiment pas le mélange jaune-violet. J’étais pour les Lakers quand j’étais petit, alors, … Je met ma doudoune jaune avec du violet, je m’en fous. J’aime bien casser les codes.

Comment tu abordes la scène ? 

J’en ai pas fait tant que ça … Ah en fait, si je réfléchis bien, j’en ai fait pas mal quand même.
La scène, c’est un truc cool. J’aime bien rencontrer des gens, voir des nouvelles têtes. Et j’adore le public, je peux tester des trucs, voir leurs réactions sur les sons. Je vois si ça turn-up ou pas, si il y a de l’étonnement et tout ça … D’ailleurs, j’ai fait un morceau inédit qui s’appelle Pute une fois sur scène avec Assaf et j’ai vu les réaction du public. C’était incroyable, les gens étaient à fond, c’était chaud, j’étais comme un ouf.

Comment s’est faite la connexion avec Verso ?

C’est un pote d’un pote, fuzi, un mec de mon quartier qui est un vrai débrouillard de la street, qui fait trop de choses, qui nous a mis en contact. Force à lui, je lui souhaite que le meilleur, même si je le charrie beaucoup et qu’il a l’impression que je le sous-estime (c’est pas vrai). Il va aller loin, c’est un bon gars, il a une super fibre artistique

Pourquoi faire une release en décembre ?

De base, j’avais pas la prétention de la faire. Et, on m’a dit que si c’est important, on m’a motivé, alors je me suis dit autant la faire, y aller à fond. Comme j’avais pas vraiment fêter la sortir, je me suis dit que c’était l’occasion parfaite. Donc, on invite tout les gens que j’aime bien, que je veux remercier, tous les potes et on mélange avec des gens nouveaux pour faire partager/découvrir le truc… Bref, on voulait une vraie célébration.

Coralie Waterlot
Coralie Waterlot

De temps en temps, dans tes textes, il y a des piques un peu « engagées », qui critiquent le monde dans lequel on vit…

Le système ?

Exactement. Pourquoi ?

Tu vois, je suis un parisien et on est des râleurs de base. Déjà, les français sont des râleurs, mais les parisiens, c’est encore pire. Du coup, je suis un peu comme ça, je peux me plaindre de pleins de trucs, alors qu’en fait, je sais que je suis bien, j’ai eu pas mal de chance. Mais après, dans les sons, ça me fait plaisir de faire des petites références, des petites piques sur des situations que je remarque. Si les gens les voient et font tourner, ça me faire grave plaisir.

Est-ce que tu as des influences musicales, des trucs que tu écoutes en ce moment ?

Bon, moi j’écoute beaucoup beaucoup de rap US, c’est un truc de ouf.
Quand j’étais jeune, j’ai pas mal écouté de métal et de rock aussi. De 11 à 13 ans, j’étais à fond dans le Hip-Hop, en mode baggy old school, mais en scred, avec  un petit groupe de pote, on a aussi écouté de Slipknot, Linkin park, Sum41, The Offsprings, Good Charlotte… Bref, des trucs de l’époque, à l’ancienne.
J’ai écouté énormément de chose, ma daronne est dans la musique, donc même quand j’étais dans son ventre, j’écoutais de la musique… Alors, j’ai vraiment baigné dans le son depuis toujours…

Quelle serait ta collaboration rêvée ?

Il y a deux types de collabs, celles qui amène du plaisir à court terme et celles qui sont incroyable à long terme.
Sur le long terme, ce serait incroyable de bosser avec Wiz Khalifa ou Pharell. Mais à court terme, ça me ferait kiffer de faire du son avec Trippie Red ou Smoke Purp (et 6ix9ine mais si la musique est lourde, je valide pas le perso).

Si tu devais créer une équipe de Basket avec que des rappeurs ?

Alors déjà, je met Doum’s et S.pri Noir, il me faut deux grands de ouf. Ensuite, mon gars Keusmo qui est à fond dans le basket. Ensuite il me faut un meneur, donc euh, moi en meneur de jeu ?
Et pour finir, on va chercher un ailier, un gars qui fait peur, qui intimide. Booba ou Kaaris ?!

Pendant l’interview, Assaf est venu nous glisser un mot, qui forme une belle conclusion :
« D6, c’est mon gars du 14ème. Il est incroyable.
Il va aller loiiin. Là, c’est que le début, mais je le dit, il est chaud ! »

Coralie Waterlot
Coralie Waterlot

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