Interviews Rappeurs

[Interview] Dandyguel : « J’estime que le rap se fait avec les tripes. »

Tu es connu pour ta capacité à improviser. C’est une discipline importante du rap. Est-ce que tu penses que c’est une corde que chaque rappeur devrait avoir à son arc ?
Non, pas forcément. L’aspect spontané, oui. Après qu’ils sachent faire de l’impro ou pas, on s’en fout. Non ce n’est pas obligé qu’ils le fassent. Et puis c’est mieux pour moi. Comme ça on reste là, et on les défonce tous. (Rires) Non, je blague. Mais pour moi, oui. Après, ceux qui n’en font pas, ce n’est pas parce qu’ils n’en font pas que je ne les estime pas en tant que MC. Il y a plein de rappeurs qui m’impressionnent alors qu’ils ne font pas d’impro. Mais l’impro, au sens savoir s’exprimer auprès de la foule, oui.

Un rappeur doit-il être un entertainer ?
Pas forcément un entertainer. Mais il doit savoir s’exprimer face à son auditoire. Qu’il parle de trucs personnels ou pas, il doit y avoir une vraie connexion. L’impro m’aide complètement à faire ça. Je suis direct dans le vif du sujet. Il n’y a plus de barrière. Chaque MC doit être en connexion avec le gars qui écoute les paroles. C’est plus important que l’impro.

Toi dans tes freestyles, tu fais de l’impro. Les rappeurs qui ont plus de notoriété, quand ils sont en freestyle, ils rappent toujours des textes tirés de leurs morceaux, alors qu’aux Etats-Unis, même les plus connus sont souvent en impro. Est-ce que tu penses qu’il devrait y avoir plus d’impro dans les freestyles de rap français ?
Non. Quand Soprano était en freestyle sur Génération, il a lâché une impro. Non mais je pense que chacun fait comme il veut. Quand j’écoutais Time Bomb, ils ne faisaient pas de l’impro pourtant je les kiffais à mort. Non ce n’est pas un problème que les reustas… Après s’ils en font, tant mieux. Ils sont dans un vrai délire. Mais ça ne me dérange pas tant que ça franchement. Moi, tant qu’ils envoient des vraies punchlines avec un putain de flow… C’est ça qui compte franchement. Que le truc soit musical.

L’impro, c’est aussi une prise de risque.
Parce qu’ils ne savent pas le faire. C’est un peu des tapettes. Il faut aussi dire les mots. (Rires) Non mais il faut le dire, il y a peut-être qui ont peur, qui se sentent pas à l’aise. Mais c’est peut-être aussi une marque de respect que de ne pas le faire. Ils se disent peut-être qu’ils laissent faire ce qui sont vraiment chauds et eux ils font leur truc. Tant qu’ils font bien leur truc… Ce sont les nuls que je déteste. Ceux qui sont pourris, qui ont pas de style, qui prennent la place des gens bêtement. Je les méprise. Après, qu’ils fassent de l’impro ou pas, je m’en fous.

Dans une interview, tu disais que tu voulais plus de spontanéité dans Ça graille que dans le précédent EP. Est-ce que ça veut dire que t’as fait des morceaux en impro ?
Non. Jamais.

C’est quoi ton processus créatif ?
Cette spontanéité, c’est quand le mec il appuie sur play, que l’instru démarre et j’ai une sensation physique où je ne suis pas à l’aise et en même temps je suis content. Ça, je sais que c’est bon. Après si moi j’ai eu ça tout seul, je vais voir Koffi. Et s’il écoute et qu’il a la même réaction que moi, je me dis « ça y est c’est bon ». Je vais la prendre. Et si j’ai déjà gratté en impro un 8 mesures sans le vouloir, ça veut dire que c’est bon. Je sais que sur scène on va délirer dessus, je sais que quand on va l’écouter ça va nous rappeler des vrais trucs, que je pourrais dire des vraies choses dessus, que je pourrais développer un vrai flow… Ça va me permettre de m’évader et de traiter d’un sujet qui était déjà là. Parce que moi c’est beaucoup ça. Quand j’écris, j’aime que l’instru me rappelle un truc que j’ai déjà travaillé. Je vais parler des meufs avec mes potes… Là par exemple en ce moment, je parle souvent avec une copine qui s’appelle Patricia. Je la cite. (Rires) On parle beaucoup des relations par rapport à Facebook, que c’est fake, et en même temps… On parle grave de ça. Et un jour, il y aura peut-être un instru qui va tomber qui va me faire penser à ça, et je saurais que je l’écrirais très vite le texte. Parce que c’est quelque chose que j’ai mûri, dont je parle, je reparle. Je regarde des reportages à la télé, je réagis… Je le vis le truc. L’instru donne une ambiance musicale qui fait ressortir un sujet qui m’est propre. Des fois, c’est conscient ou pas. Là, c’est en prenant du recul. C’est en analysant ce que je fais que je te dis ça. Mais je pense que c’est ça.

1 commentaire

  1. Merci pour cette interview très intéressante d’un MC que j’apprécie depuis longtemps. Par contre le DJ de Dandyguel je crois que c’est Karaï par Karel.

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