Beatmakers Interviews

[Interview] DJ Poska : « Le hip-hop a été une bouffée d’oxygène »

Comment ça se termine une mixtape ? Quand tu arrives à un nombre de morceaux satisfaisant ou quand tu as atteint un objectif que tu t’es fixé ?
A la base, on faisait une sélection de titres américains. En sachant que tu as environ 24 titres par face, ça fait entre 50 et 60 disques sur une mixtape d’1h30. Donc tu fais ta sélection d’abord. Bien sûr tu as les gros tubes qui partent les premiers. Puis les mecs viennent, tu dis j’ai ça et ça en instru. Le but en fait, c’était de faire un freestyle, soit en intro du morceau, soit au milieu comme si c’était un featuring avec le ricain. On partait là-dessus, et on pensait plus au mix et comment ça allait s’enchaîner entre les ricains et inclure du rap français dedans. En revanche, au moment où on a fait la mixtape n° 25, on s’est dit qu’il fallait qu’on se penche uniquement là-dessus. Pendant trois mois, on a passé des coups de fil, j’allais chercher les rappeurs en bas de chez eux et j’les prenais en voiture jusqu’au studio. On les enregistrait et après je les ramenais.

Ah ouais ?
Yes. Bon il y en avait qui venaient d’eux-mêmes mais c’était à la chaîne. On faisait au plus simple « Tu peux venir ou pas ? – Ouais mais j’suis en transport c’est compliqué aujourd’hui. – Pas grave, viens j’te ramène derrière » C’était de la débrouille, de la spontanéité. Pendant trois mois. Et les jours où on n’enregistrait pas, on mixait les freestyles donc c’était une assez longue période.

C’était la fabrique quoi.
Ouais. Puis à un moment, on avait pas mal de freestyles donc on s’est dit qu’il fallait les enchaîner entre eux. Les platines CD venaient de sortir à l’époque, les Pioneer je crois.

Toi tu es toujours aux vinyles ?
Ca dépend des plans. Je n’ai pas de problème à mixer même avec un controller. Si la technique correspond à ce que je veux entendre, je fais.

Quels sont tes projets dans les temps qui viennent ? Avec RMA2N tu disais qu’il y avait quelque chose, et quoi d’autre ?
Il y a Rma2n et une mixtape avec Abuz aussi. On est toujours resté en contact. Il y a la première qui a été faite par DJ Akil. Il refait une anthologie de tous ses morceaux. Il veut remettre dans la tête des gens ce qu’il a déjà fait. Donc pour résumer, un EP avec RMA2N, avec 8 ou 10 titres, on va voir mais ça envoie déjà pas mal. Et la mixtape avec Abuz, avec des inédits quand même, mais pas mal de morceaux des années 90. Je fais toujours un peu de mix, sur hotmixradio.fr, où je m’occupe de la partie hip hop et je passe un peu d’indépendants. Puis j’ai quelques cartouches pour cette année. Là on se met en jambes, et on arrive à pas d’ours ! Entre New York et Paris, j’ai eu le temps d’avoir pas mal d’idées, des trucs qui ont mûri, des trucs que j’ai stoppé ou que je vais reprendre.

Tu travailles avec des américains ?
On fait un truc qui s’appelle Freak & Trap. Avec un mec qui s’appelle PM, qui est un compositeur français parti aux Etats-Unis aussi. Il y a DJ Akil qui a fait de la prod dessus aussi. On reprend des classiques des années 90 en rap US avec Sound Clash. Ils ont un studio où pas mal de rappeurs viennent enregistrer, beaucoup d’artistes en devenir. Il y a des très bons morceaux. Un rappeur particulièrement va très probablement décoller. Il s’appelle Uncle Murda. C’est un mec de Brooklyn, c’est du « rap rap » quoi. Mais il y a d’autres rappeurs, de New York, de Harlem, de Brooklyn, du Queens, et ça va être un beau projet. Très peu de morceaux reprennent des samples des années 90 en innovant en ce moment. Puis je suis aussi sur une série de street single Block Bangerz avec ITBOYZ Music. Je réalise les morceaux, trouve les beats et les Mc’s, et eux produisent le tout.

Tu suis un peu la mouvance actuelle du rap en France ?
Je ne suis pas trop mais je me tiens au courant de certains trucs.

Aujourd’hui quand tu fais une vidéo, ça peut vite prendre si tu es bon. Qu’est-ce que tu penses de cette nouvelle vague de popularité pour le rap et de ces jeunes rappeurs ?
J’avais fait une petite interview où j’avais répondu à une question. D’habitude je ne fais jamais ce genre de jeu. C’était pour P’tit délire. Ils m’ont demandé « Sexion d’assaut ou 1995 ? » En vérité je ne connaissais pas 1995. J’avais écouté un ou deux morceaux mais vite fait. Alors que Sexion d’assaut, je connaissais déjà bien. Leur troisième mixtape, c’est Philo une amie de Lyon qui m’a dit : « Tu devrais écouter ces mecs ». Alors qu’ils étaient de Paris 9 pour certains, je n’ai jamais eu aucun contact avec eux, c’est rare. Je les ai joués sur Couvre-Feu à l’époque, sur Skyrock, avec Jacky des Neg marrons, Lord Issa et Dj PHAXX . Donc pour répondre à P’tit délire, j’ai répondu à côté parce que j’ai fait ça en fonction de l’image que j’avais de chacun, et j’aurais jamais dû sortir ça, j’ai dit « 1995 c’est cool, mais ça fait un peu trop le miel et les abeilles ». Mais j’ai dit ça alors que je ne connaissais pas et que j’ai pas écouté tout ce qu’ils ont fait. Ce n’est pas le même rap que Sexion d’assaut, donc tu ne peux pas comparer. Quand j’ai rematé l’interview, je me suis dit « c’est quelle réponse ça ? ». Normalement je ne compare pas comme ça. Si tu me parles de Booba et Rohff, pour moi ce sont deux artistes différents. L’un n’est pas meilleur que l’autre. Pour moi, ils ne font pas du tout le même rap. Ils sont chacun très bons dans ce qu’ils font. En France, dans les groupes que je connais, quand y avait un mec qui ressemblait à un autre, il avait du mal à passer. Ou alors il passait, mais c’était l’autre qui était en retrait. Parce qu’y en a un des deux, s’ils ont le même grain de voix et le même flow, qui va faire la différence, peut-être sur le texte, peut-être sur le live, ça dépend de plein de paramètres. Mais ils ont la même voix. Donc pour la télé ou la radio, c’est difficile pour eux. Le mec doit être identifiable d’un point de vue professionnel. Mais ce que j’aime bien en tout cas, dans L’entourage, c’est leurs flows. Justement, c’est vachement 90’s, un peu Time Bomb. J’ai écouté Rov or Benz d’Alpha Wann il y a pas longtemps, je trouve ça vachement bien. Puis j’ai rencontré Nekfeu deux ou trois fois, je les ai vu en studio aussi. Et justement, ils pensaient qu’il y avait un truc avec moi. Ils pensaient que j’étais mal sur eux. Mais jamais de la vie. J’ai dit un truc sans les connaître, avec la première image que j’avais. Je ne connaissais pas leur musique. Aujourd’hui, tu vois, « Rov or Benz », je l’ai posté sur ma page facebook et je la kiffe.

Donc tu te tiens informé quand même de ce qu’il se passe.
Un peu. Mais pour les projets que j’ai, je vais devoir me tenir encore plus au courant.

Tu peux aller sur lerapenfrance.fr pour ça ! Allez une dernière question pour la route. T’écoutais quoi en venant ?
Life Style de Rich Gang.

À proposLouis Jay

Brolic à la ceinture, paquet de BN dans le cartable

1 commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.