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[Interview] Guizmo : « J’ai jamais été un voyou mais j’étais un bon renard »

Le 15 Décembre dernier, nous sommes allés interviewer Guizmo à la sortie de son concert au Bikini à Toulouse avec Swift Guad. Dans l’ambiance enfumée de la loge, nous avons parlé de Moha la Squale, son prochain feat, son dernier album… Voici le compte rendu de cette interview.

Qu’est-ce que tu penses du concert à Toulouse ? C’était la première fois que tu faisais le Bikini ?

Guizmo :  Ouai, le Bikini c’était la première fois et faire complet ça fait plaisir. C’est une grosse capacité, une ville où je ne viens pas forcement souvent tu vois, donc je cultive pas beaucoup le public toulousain, et voir tout le monde en mode guerrier, franchement… Grave bon !

guiz

Dans ton album Amicalement Vôtre tu dis « Réussite et gloire riment avec descente aux Enfers » et dans un autre son « J’bédave un joint au balcon, j’pense à reprendre le business », est-ce que ces deux phases sont liées ?

Ouai, ouai… C’était… Franchement c’est pertinent de ouf ta question parce que j’ai écrit les deux morceaux dans la même période. Et ça se rejoint parce que quand t’as pas la gloire… T’as vu moi j’ai longtemps été dans le business de rue, les embrouilles, les arnaques… J’étais un « hustler » comme on dit (sourire). J’ai jamais été un voyou mais j’étais un bon renard. Et des fois ça me manque quand je prenais le métro et que personne ne connaissait ma tête, quand mon argent c’était MON argent, il y avait pas une industrie autour. Comme je dis, je préférerais qu’on m’enferme tu vois, une semaine en taule entre tout le monde, y a la télé, du pillon, un kho à qui tu peux parler qui est dans le même délire que toi, en mode rue. J’te jure ça me ferait pas de mal des fois…

foot

Ouai petit retour à l’anonymat… Dans ce dernier album, j’ai retrouvé un style de rap très Normal, du nom de ton album, ou même Dans ma ruche avec des flows rapides. Même s’il y a une évolution dans tes albums, on retrouve ce style de rap « à l’ancienne ».

En fait, je pense que quand les gens disent « style de rap à l’ancienne » ils parlent plus d’écriture, parce que les prods sont actuelles tu vois ? J’fais des multi-syllabiques, ça se fait de moins en moins. Forcement, quand les gens en entendent, même s’ils ne savent pas ce que c’est, ils voient que c’est différent du rap qu’ils ont l’habitude d’écouter.

Et dans L’histoire d’un negro, là, t’as grave des styles de voix, des variations aigües/graves et, l’autre jour, j’écoutais du L.I.M. et je retrouvais un peu ça. Même Mala, vu que c’est du 9.2, il y a peut-être des influences ?

Ben non figure toi que même pas, c’est plus un petit frère qui m’a influencé, je traînais beaucoup avec Guy 2 Bezbar quand j’ai fait ce morceau et lui, tu vois, il est beaucoup autotune, harmonie, mélodie et j’aimais grave son délire. Un jour je m’y suis tenté, avec mon style à moi et ça a donné L’histoire d’un négro.

C’est un gars du label Yonea Willy aussi ?

Ouai il est passé en formation chez nous, aujourd’hui il est chez Plata O Plomo et ça se passe bien pour lui, je lui souhaite méga de la force.

maestro

Tu fais beaucoup de références dans cet album à des rappeurs français, parfois dans les phases « j’ai la furie et la foi » (ref. Fonky Family), même Rohff « minimum 10 ans si tu fais le dingue négro », c’est parceque tu kiffe ce genre de rap années 2000/2005 ?

De fou malade, et pour aller encore plus loin je le kiffe tellement ce rap que ça sort tout seul, je fais pas exprès. La seule que j’ai fait exprès c’est « j’suis dans ma werss depuis le code de l’honneur », mais sinon les autres références, ça sort tout seul parce que je suis vraiment bousillé à ça.

Ouai même Orelsan « c’est pas Jimmy Punchline mais Guizi Pompette ».

G : (rires) Ouai ouai ouai… J’aime beaucoup ce morceau, Jimmy Punchline mais moi c’est plus Guizi Pompette.

En ce moment, parmi les rappeurs français, si on imagine, je te verrais bien en feat avec Ninho ou Moha La Squale, qu’est-ce que t’en penses ?

Ouai j’aime bien ouai… J’aime un peu moins Moha La Squale que Ninho, parce que Ninho c’est beaucoup plus mon univers tu vois, déjà la manière d’écrire et tout. Moha La Squale j’aime bien sa véracité tu vois, ce coté vrai, ce côté « brut de décoffrage ». Moi j’ai vécu ce qu’il a vécu. A 18 ans j’étais en prison tu vois. J’ai niqué ma vie, j’étais destiné à faire du foot, j’ai fait n’importe quoi. J’ai bu, j’ai dealé et Dieu seul sait tout ce que j’ai dealé. J’ai pas dealé que de la beuh comme la plupart des jeunes comme moi. Tu vois, quand je dis dans un morceau « une sale enfance, pas comme mes camarades de classe » c’est, par exemple, en plein hiver on sortait à 17h, je me rappelle, au collège on était peut-être en en 5ème/4ème. Quand tout le monde rentrait prendre son goûter, des pains au lait, du Coca et regarder Loft Story ou j’sais pas quelle autre connerie, moi j’allais dans un hall et je restais là-dedans jusqu’à 3h du matin à vendre des doses d’héroïne, j’savais même pas ce que c’était, dans un paquet de Mentos, tu vois ce que je veux dire ? Et je sens la vérité comme ça chez Moha, parce que quand tu connais un truc et quelqu’un te parle aussi du sujet tu sais un peu jauger, voir tu vois. J’aime beaucoup Moha, son côté vrai… Ouai les deux je les vois en feat. Après pleins d’autres ! Niro, Sadek… Tu vois il y en a plein que j’aime bien, vraiment, dans le rap français, et que j’aime humainement aussi.

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Ouai parce que là t’as accepté un feat avec deux rappeurs du coin justement (ndlr : Toulouse), pourquoi ce feat justement ?

Déjà parce que, à ma grande surprise, le feat que les gens attendaient de leur part c’était pas avec Guizmo, c’était avec l’autre… Donc déjà le fait que ce ne soit pas ça c’est… tu vois ? Et puis après parce que c’est des mecs qui m’ont toujours fait preuve de grave de respect, d’affection. Moi, je me suis toujours comporté pareil avec eux : respect, affection. Et c’est des gens bien franchement, ils travaillent en famille comme moi, ils font leurs affaires en famille comme moi. Ils essayent de générer une énergie positive partout où ils passent même quand ils sont fatigués, ou pas forcement d’humeur, et c’est des gros bosseurs qui sont talentueux. Et puis… On va se venger d’OrelSan comme ça (rire). Non c’est une petite pichenette mais j’aime tout le monde ! Non franchement ils sont venus vers moi et je me voyais pas leur refuser quoi que ce soit, c’est des mecs, moi je suis derrière eux à fond.

Donc là ça y est t’es reparti sur un projet tous les 6 mois.

(Sourire) on dirait bien ma gueule.

Y a grave l’inspi encore ?

Là, je suis en fin de studio, fin de tournée… Fin d’argent ! Ah on va pas se mentir ma gueule, mon frigo il se remplit pas tout seul et pareil, ma passion elle se nourrit pas toute seule. T’imagines le coup de blues si j’ai une salle comme ça (ndrl : le Bikini à Toulouse) à disposition et qu’on fait 400 préventes alors qu’il y a une capacité de 1400 personnes ? C’est des choses qui arrivent à certains rappeurs… Y a rien qui va sans rien, et voilà moi j’ai faim, j’ai faim de tout et j’suis gourmand de tout là en ce moment.

Interview : Simon Casagrande

Photos : SIXLU

Merci à Guizmo et son équipe pour leur accueil, à l’association Regart et au Bikini pour leur invitation et leur gentillesse. 

À proposSIX.LU

BOOM!

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