Interviews Rappeurs

[Interview] Hippocampe Fou : « L’album est construit comme une sorte de voyage céleste »

Ça fait une petite couleur différente ?
Oui. Sur l’album d’avant il y avait Max Pinto qui avait fait du saxophone. J’aime bien avoir un peu de vrais instruments et instrumentistes qui viennent mettre leur patte. D’un coup, le morceau est plus vivant. Il y a la boucle qui se répète derrière mais avec de vrais solos.

C’est quelque chose qui peut se reproduire sur scène ?
Oui, aussi. Sur des grosses dates car c’est difficile de les faire venir à chaque fois.

En termes d’écriture, est-ce qu’il y a quelque chose qui a changé pour toi ?
Je pense que j’ai trouvé quelque chose. Je peux parler de choses qui me touchent, des choses personnelles. Je peux faire des morceaux introspectifs sans pour autant perdre cette fantaisie. Sans être forcément les pieds sur Terre. D’un coup faire rentrer des personnages complètement imaginaires et loufoques au milieu de quelque chose où tu parles de ton ressenti en tant que pauvre petit terrien qui rêve de partir dans les nuages. C’est un peu ça le cahier des charges. L’idée c’est : Hippocampe fou est sorti de l’eau, d’un coup il a vu l’eau de mer s’évaporer pour former les nuages. Il regarde les nuages et les étoiles quand le ciel est plus clément et il se dit « tiens, si j’allais explorer un peu cet espace-là. ».

Justement, il y a deux ans, je t’avais demandé si ça n’allait pas te saouler l’Aquatrip. Est-ce que tu te souviens que tu m’avais dit que tu ferais peut-être du rap spatial dans deux ans? C’était réfléchi avant ?
Oui je m’en souviens. J’anticipe toujours un petit peu. Je ne veux jamais être pris au pied du mur ou dans l’impasse. Je suis obligé de réfléchir à l’avance et d’envisager les projets futurs. Du coup, au lieu de faire un rap spatial j’ai fait un rap céleste. C’est-à-dire qu’on n’a pas forcément besoin d’une fusée, on va y arriver avec un ULM ou un avion tout simplement. Je me suis dit « ne partons pas si loin, il y a plein de choses à visiter avant. Les nuages et les étoiles. Pas dans le sens où tu es une étoile mais dans le sens où tu regardes les étoiles et ça te fait rêver. »

Sur Las Estrellas, si on traduit le refrain, c’est « Quand les étoiles mourront, on se regardera sans pleurer, on cachera notre tristesse et on restera là sans rêver ». A un moment les étoiles s’éteignent, le ciel qui s’éteint, plus de rêve plus de vie. Pour moi tant qu’il y a du rêve il y a de la vie. Mais tu peux perdre tous tes rêves et te dire « merde, en fait, c’est la vie, faut que j’arrête de rêver, de déconner. J’ai une famille à gérer. »  Moi je n’ai pas envie de perdre ça, ce serait étouffer le rêveur et l’enfant qui sommeille en moi.

C’est marrant qu’on parle de ça le jour où le Petit Prince sort au cinéma. (ndlr : l’interview a eu lieu fin Juillet)
Oui, en plus la pochette est très Petit Prince. Ce n’était pas forcément notre référence au départ. C’est FIFOU qui a signé la pochette.

On l’a rencontré quand on interviewé Youssoupha
Le mec est partout. En fait il bosse dans les mêmes locaux que mes managers. Il avait déjà signé l’affiche de l’aquashow, on avait shooté dans son studio. L’idée était de garder un esprit enfantin et en même temps d’avoir une belle photo. Et lui sait très bien faire ça. On a bossé aussi avec Marion Fontaine qui est maquilleuse et décoratrice. La pochette est un alliage de talents.

Et tu as mis le pull pour être raccord avec l’univers ? (ndlr : Hippocampe Fou porte un superbe sweat étoilé)
Je le mets en interview sur les conseils de mon attaché de presse

Au cas où il y a des photos ?
Exactement. D’ailleurs quelqu’un m’a dit « lourd le pyjama, t’es en pyjama maintenant sur scène. » J’ai dit « ben non, c’est un sweat » (rires).

Il y a deux ans, tu disais aussi qu’il te fallait une idée percutante par ligne. Est-ce que tu le penses toujours ?
Oui, et plus que jamais. Dans le sens où je pense avoir compris et travaillé cette notion de punchine avec l’album précédent. Il y avait cette envie d’être cité, d’être repris. Et comme je me suis fait vachement plaisir ces derniers temps sur les réseaux sociaux (Twitter, Instagram, Facebook), j’aime bien l’idée de la petite formule. Le petit jeu de mots, la petite phrase. Je pense que ça se ressent dans l’écriture du nouvel album.

J’ai trouvé l’écriture plus subtile que sur l’album précédent
Ça fait plaisir. Je pense que je l’ai affinée. C’est le travail, cette envie d’avoir toujours une double lecture pour que tout le monde puisse comprendre à sa manière. Et que ceux qui creusent vraiment se disent « ah ouais, ça c’est en rapport avec ça. ». C’est un petit kiff et c’est parce que j’ai écrit beaucoup ces dernières années.

Tu ne t’es pas dit « je vais toujours être dans le jeu de mots, mais en étant plus subtil » ?
Non, c’est surtout que je me suis dit « la concurrence est rude, donc affinons les choses ». Je ne peux plus me permettre de faire du flow. Je ne rejette rien sur l’album précédent mais il y a quelques morceaux qui sont pour moi plus basés sur le texte, ou des exercices de style et de flow. Je me disais que l’important c’était le flow, la mitraillette. Ce truc-là, je l’ai vraiment laissé de côté.

À proposStéphane Fortems

Dictateur en chef de toute cette folie. Amateur de bon et de mauvais rap. Élu meilleur rédacteur en chef de l'année 2014 selon un panel représentatif de deux personnes.

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