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Le rap français et la culture graffiti – numéro 1

Issus tous deux de la culture urbaine, le rap et le graffiti ont toujours été assimilés et ce fameux mélange a aujourd’hui pondu des classiques comme Dégradation d’Hugo du TSR Crew, dans son projet Fenêtre sur rue, ou encore le bon vieux Paris sous les bombes du groupe NTM, qui n’est plus à présenter.

Des morceaux gorgés d’encre de marqueur, une ruelle à peine éclairée, les sirènes des policiers qui passent et repassent, voilà l’atmosphère dans laquelle les Mc’s ont souvent voulu nous plonger, pour nous faire découvrir l’environnement dans lequel ils évoluent. Et le graffiti fait aujourd’hui partie intégrante du paysage urbain, comme on peut le constater dans chaque ville avec les throws-ups et tags recouvrant chaque panneau de signalisation, mur désaffecté ou encore des plus gros graffitis sur les trains. (On vient de se rendre compte que Le Bon Son a fait un article autour du même thème cette année, allez le lire !)

1995 : L’ascension d’un mouvement

C’est en 1995 que Kool Chen et Joey Starr nous racontent leurs aventures nocturnes dans la capitale, munis de Bombes aérosols pour recolorer la ville, sur un flow assez particulier et une prod un peu agressive. « Stimulés par la pénombre », leur envie de graffer est décuplée. Leur mission commence de nuit et se finit au petit matin : ils ont pendant la nuit redécoré les métros de la RATP, tout en essayant d’éviter les agents de maintenance. « Paris sous les bombes » est donc un véritable hymne au graffiti vandale des années 90. C’est donc à partir de cette époque que la culture graffiti se propage, devient de plus en plus présente dans les rues de la capitale, pour finalement s’étaler sur toute la France.

Véritable passionné de la pratique, Fabe fut aussi autant influent dans le rap que dans le graffiti, puisque c’est le membre de la Scred Connexion qui fut sûrement le plus engagé dans ce mouvement artistique. 4 albums solos, 7 Maxis, 1 ep et de nombreuses apparitions dans des mixtapes, notamment celle de Cut Killer en 1994 font de lui un des rappeurs phare français, mais aussi un grand revendicateur du graffiti et du tag.

Devenu plus célèbre et critiqué aujourd’hui, Booba reste toujours un exemple pour les Mc actuels, à en juger par le succès de son ancien duo avec Ali, Lunatic qui reste encore gravé dans la roche pour des génération Avant de se mettre à manier sa plume, B2O passait quelques nuits à arpenter les rues de sa banlieue parisienne avec ses potes, équipé de bombes, marqueurs, squeezers et C’est justement le fait de graffer qui le poussa à lâcher deux trois couplets sur les mixtapes de ses amis, justement car il noua des liens avec la rue, puis finit par prendre goût à l’écriture.

Années 2000 : Toujours le même état d’esprit

Le graffiti reste aujourd’hui un des sujets principaux des emcee’s , à en juger par le morceau d’Hugo TSR Dégradation, où il nous montre sa passion pour le graffiti (qui est à l’origine une des branches du Hip-Hop). Anton Serra de l’Animalerie a quand à lui écrit son hommage au graff : Zaïro , dans lequel il nous montre toutes les techniques de vandalisme et son amour pour celui-ci, sur une instru bien fat comme il les aime. « Il fallait qu’on le vive » est sûrement la phrase que l’on peut retenir de cette musique, car elle prouve que le graffiti est une expérience unique et palpitante.

Interview: NEM du JCR

NEM

« Rap et tag ont toujours été un espèce d’exutoire , un terrain où je suis plus ou moins à l’aise et ou j’essaye de me surpasser pour obtenir un truc qui me plaît »

Oui, nos voisins sont aussi à l’honneur dans ce papier ! Voici NEM, un jeune rimeur et graffeur de Bruxelles, talentueux et persévérant dans son écriture comme dans son graff. Il a décidé de nous partager ses premiers tags, ses premières rimes et son point de vue sur ces disciplines.

Quand as tu commencé ?
Le rap et le graff ont démarré en même temps, vers mes 14 – 15 ans. J’ai commencé à gribouiller des graffs et des rimes dans mes cahiers. Mais c’est la culture hip-hop, plus particulièrement le rap et le tag dans son ensemble qui me passionnait.

Pourquoi ?
Ce qui m’a toujours plu dans ces disciplines, c’est la manière dont les gens faisaient passer leurs messages, leurs émotions, etc. Au début, j’étais plutôt focalisé sur le graffiti, du coup j’ai passé quelques années à signer les murs, c’était plutôt du vandale que des pièces, même si j’ai fait quelques terrains. La plupart des fois où j’ai utilisé des bombes, c’était dans la rue. En fait je ne me suis jamais considéré comme un graffeur, j’étais toujours admiratif devant le taf de mes potes et j’aimais bien suivre l’un ou l’autre lors de leurs virées.

A quel moment as-tu dérivé vers le rap ?
J’ai arrêté le graff vers 18 ans même si j’ai continuer à gribouiller, ce n’est que vers 20 ans que je suis entré en studio la première fois. Depuis je me concentre sur l’écriture, même si depuis quelques années j’ai fais évoluer les graffitis en infographies, je conçois des sites web, des pochettes et autres supports visuels (www.justcrackingrecords.be ), j’envisage même de me lancer dans le montage de clip !

Qu’est-ce que t’ont apporté ces disciplines ?
L’un comme l’autre ont toujours été un espèce d’exutoire, un terrain où je suis plus ou moins a l’aise et où j’essaye  de me surpasser pour obtenir un truc qui me plait, et ce n’est pas toujours évident. Pour l’instant c’est un peu compliqué, j’essaye de concilier ces passions avec une vie professionnelle, mais ce qui est sur, c’est que je ne compte pas m’arrêter là ! »

Le graffiti est avant tout un art visuel, c’est pourquoi les clips vidéo des rappeurs sont souvent parsemés de nombreux throws-ups, comme dans le titre de Népal « Skyclub » dans lequel on peut voir un de ses amis du « Dojo » à l’œuvre , graffant sur une vielle porte sur les rives de la seine, ou encore Omry du TSR Crew, qui pose un tag très spontané dans le clip « Tu connais le tarif » , qui a d’ailleurs fait un retour très attendu après 8 ans d’absence, avec à la carte toujours une petite dose d’acrylique.

On peut également parler d’artistes plus célèbres de la scène rap française, comme Darryl Zeuja du fameux groupe 1995, qui pose énormément de couplets sur la thématique graffiti, mais aussi dans tous ses autres projets solos comme dans « Alias Darryl Zeuja », avec « Je marche seul » , ou plus récemment Innercity en collaboration avec son fidèle compagnon beatmaker Hologram Lo’. Darryl semble donc avoir une relation stable et durable avec son marquer et ses bombes…

Interview: C-sen

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« Le graffiti c’est pour la vie, sous toutes ses formes, le rap c’est tant que j’aurais envie de dire des choses c’est possible qu’un jour j’arrête de parler à tout le monde. »

Trentenaire profondément passionné, C-sen est un artiste graphique et musical attaché aux valeurs du Graff et du Rap. Toujours indépendant, celui-ci vous délivre ses convictions, projets et ressentis face à ses passions urbaines.

Par quelle discipline urbaine as-tu commencé ?
C’est par le graffiti que j’ai commencé, j’écoutais du rap mais c’est l’action qui me passionnait. J’avais 11 ans et je m’imaginais la nuit, les rails, les rencontres, la police, tout ça me fascinait et je l’ai vécu ensuite.

D’où tires-tu ton inspiration pour écrire tes textes et mettre au point tes graffs, as-tu des influences particulières ?
Mes textes viennent de ce que je vis, de mon quotidien, de mes aspirations et de ce que j’observe, que cela me plaise ou me dégoute, tant que ça m’intéresse. Pour le graffiti, mon style a évolué d’abord avec ce que j’ai vu autour de moi, le long des lignes de chemins de fer, la rue puis plus tard je me suis documenté, c’est ma culture que je traduis à ma manière.

Qu’est ce qui te plait le plus dans ces deux branches du Hip-Hop ?
La liberté, l’ouverture aux autres, s’adresser aux autres comme je l’entends.

Quels sont tes projets futurs dans ces deux domaines ?
Le graffiti c’est pour la vie, sous toutes ses formes, le rap c’est tant que j’aurais envie de dire des choses. C’est possible qu’un jour j’arrête de parler à tout le monde.

Qu’est ce que toute cette encre qui sort de ta plume et de ta bombe t’apporte finalement ?
Ce sont des passions dévorantes, je ne les ai pas choisies. Elles me font du bien par moment et du mal à d’autres.

 

Héritiers de la culture urbaine, les rappeurs et graffeurs manient toujours leur stylos, que ce soit sur un mur délabré ou une feuille raturée, dans un même but de partage et de vénération envers les valeurs du Hip-Hop, qui soutiennent et accompagnent encore des millions d’artistes.

À proposTim Levaché

Chaque jour mes tympans avalent des kilos de lyrics et de tapes pour le bien de mon cerveau.

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