Billets d'humeur

Le rap français, une culture élitiste ?

Que n’entend-on pas déjà se gausser tous les propagandistes de la thèse de la sous-culture pour analphabète ? Les Zemmour et affidés. Nous pourrions déjà les voir  monter sur leurs énormes chevaux à la simple vue de cette assertion. Rap + élite dans la même phrase, ça ne fait pas bon ménage. Pourtant, la question malgré son côté légèrement provocateur n’est pas si sotte et mérite d’être posée. Le rap français est-il mis de côté car trop intelligent ?

De nos jours, la notion d’élitisme est plutôt floue. Vaguement péjorative, elle symbolise surtout l’idée de la difficulté d’accès, d’un concept réunissant sous sa bannière une certaine catégorie de gens. Ainsi la musique classique est considérée quasi unanimement comme élitiste. Inabordable pour la majorité. Cette énumération ne colle-t-elle pas au rap français ?

Premièrement, hormis pour les petits veinards qui furent bercés à ses mélodies depuis le berceau, c’est un genre assez difficile d’accès. Il est si vaste que trouver une porte d’entrée adaptée à sa personne et à ses goûts se révèle être une tache ardue. Aimer le rap quand on vient d’un autre milieu musical, c’est s’obliger à y venir petit à petit. Commencer par le côté du cercle pour s’y enfoncer. Acquérir le savoir nécessaire à la compréhension des textes. C’est rigoureusement le principe de ce qui fait une culture élitiste : quelque chose d’impossible à appréhender facilement, des connaissances impossibles à feindre.

Il est aisé de constater qu’un titre de rap est, en moyenne, plus long qu’une piste lambda. On retrouve des pistes étendues dans les genres musicaux privilégiant l’instrumental tels le jazz, le funk et le classique, dans le rock aussi. Cependant, rares sont les morceaux de rap qui se contentent du son. Du texte décore la musique quasiment tout le temps. Il est donc curieux que ses détracteurs disent de lui que ce n’est que du bruit. Ainsi, dans le classement des 100 classiques du rap français de l’ABCDR du Son, 29 morceaux dépassent les cinq minutes, 70 balancent plus de quatre minutes de punchlines et deux titres culminent même à dix minutes. Demain, c’est loin de IAM compte 1773 mots, ce sont sept feuillets en terme journalistique. Bien évidemment, il est notoire que quantité ne rime pas avec qualité. Il est possible de tenir des propos inaudibles sur de très longues durées. C’est pourquoi il est urgent de parler des textes.

La partie la plus intéressante mais la plus compliquée aussi. Que l’opinion publique se soit forgé une vision si décalée du rap français est révélateur du traitement de ce dernier dans les médias ; que l’on entende encore des phrases telles que « le rap, c’est toujours la même chose, ils ont tous le même discours » est ubuesque. Les textes ciselés de Casey, Médine, Rocca, Rocé et consorts n’ont vraiment pas d’égal à l’heure actuelle sur la scène musicale. Cependant, à l’heure où l’art musical devient un vaste foutoir, où le top 50 a réussi à être mené par René la Taupe, on est en droit de réclamer réparation. On ne peut pas propulser quelque chose d’aussi insipide en tête des charts et cracher ensuite sur la chanson française version R.A.P. sous des prétextes fallacieux.

On peut aussi définir le courant français du rap comme élitiste par son isolement sur la scène médiatique. Curieusement, il est beaucoup moins visible qu’à ses débuts. Il ne l’a peut-être pas voulu. Parfois, un groupe plaît à la fameuse « ménagère de moins de 50 balais ». Mais pour une Sexion d’Assaut sous les projecteurs, combien de Nakk dans l’ombre ? S’il tente ces excursions fugaces vers le grand public, c’est souvent pour mieux revenir au bercail underground très rapidement.

Il y aura forcément des gens pour dire que là où nous voyons de l’élitisme, il n’y a que du nivellement par le bas. Si l’on ne parle du rap qu’en mal, c’est qu’il n’y a pas de bien à en dire. Il est temps de prouver à tous ces gens qu’ils se trompent dans les plus grandes largeurs. Enlevez les œillères, libérez les cerveaux et laissez-vous entraîner. Nous vous donnons les clés pour entrer dans le rap français. Profitez-en.

À proposStéphane Fortems

Dictateur en chef de toute cette folie. Amateur de bon et de mauvais rap. Élu meilleur rédacteur en chef de l'année 2014 selon un panel représentatif de deux personnes.

21 commentaires

  1. En fait, j’ai l’impression que les gens n’attendent d’un site de rap qu’une seule chose, qu’il fasse des chroniques gentillettes, des interview promos et qu’il fasse passer tous les clips possibles et imaginables.

    Vous êtes tombés à bras raccourcis sur l’auteur alors que je ne vois vraiment pas ce qui lui vaut ce déchaînement. Ok, il manque un peu d’arguments mais le point soulevé est intéressant.

  2. Le RAP c’est comme tout quand c’est bien fait. Dans tout les arts il y a des œuvres qui touchent tout le monde, même des personnes non initiées au milieu. Et c’est là le vrai talent.

    Finalement l’élitisme, quel qu’il soit, est un peu de la vanité et un moyen de mettre en valeur une production qui est bonne mais pas exceptionnelle.

    Attention à ne pas penser que j’approuve la vente commerciale, ce n’est pas la même chose : ils nous lavent le cerveau pour que l’on achète un produit de mauvaise qualité.

  3. Le syndyicalisme, c’est élitiste. Les manifs, c’est élitiste. La haine, c’est élitistes, Les prolos, les noirs et les hanidcapés, c’est élitiste, Les SDF, c’est élitiste.,Che Guevara c’est élitiste, les banlieues, c’est élitistes. parce que dans ma télé et dans mes amis et dans mon travail, on y a pas accès! Ecouter du rap, c’est juste être conscient d’un certain nombre de choses, réfléchir, prendre du recul, faire des choix. Si tu te laisses porter et que tu te retrouves à écouter Jennifer et Laurent Delahousse, c’est pas une question d’élitisme, c’est un problème d’aliénation! On écoute pas du rap comme on achète de la lessive, si ça c’est être élitiste. Wake up!

  4. Bonjour,

    J’aimerais déposer plainte pour plagiat, j’ai mon blog rap sur RUE89 depuis belle lurette, et je pensais être le seul à dire que le rap c’était pas que des faits divers et des caillra bling bling.
    Damn’ en plus vous connaissez Rocé, Casey et Médine, je croyais être le seul.
    Mon avocat va vous contacter.

  5. @ Stardust : si je réagis pour critiquer la démarche volontaire et gratuite de l’auteur, c’est juste parce que je suis passionné par le sujet et que j’ai envie de faire avancer le débat. J’ai aucune animosité envers l’auteur, juste un point de vue différent, ça arrive.

  6. J’comprend pas tout ces débats sur le rap, on aime ou pas, rien de plus. Je trouve l’article bien écrit et censé. Les détracteurs il y en a partout…

  7. La rédaction vous remercie de ces critiques qui nous aideront à améliorer notre contenu, elles sont toutes bienvenues ! C’est vrai qu’on aimerait un peu plus de nuances parfois mais nous apprécions vos réactions, quelles qu’elles soient ! Bien à vous, les amis !

  8. J’comprends pas trop ce que vous reprochez à l’auteur, il fait un article, il expose un point de vue avec en plus un point d’interrogation, il le fait plutôt bien et vous venez le démolir gratuitement, sans nuances, comme ça. Ça me désole.

  9. Apparemment, il y a des gens qui ne comprennent pas le sens d’un édito… L’auteur n’a pas a apporté d’arguments puisqu’il donne un point de vue !

    Quand aux 7 feuillets que personne lit, c’est super triste mais il a raison, c’est la base des cours de rédaction web : aérer le texte, surligner des mots importants et faire des articles concis.

    Continuez comme ça, j’aime !

  10. Merci de votre réponse franche.

    Je ne pense malheureusement pas pouvoir revenir souvent par chez vous donc je vous laisserai sur vos petits pré carrés, et vous sur les miens.

    Je ne relèverai que ça de manière révélatrice :

    « Personne ne lirait un article de 7 feuillets »

    Vous avez déjà une haute opinion de vos lecteurs.

  11. N’empêche qu’il n’y aucun vrai argument dans cet article. Effectivement le rap peut être élitiste : la preuve une bonne partie de sa compréhension semble visiblement vous échapper, en atteste votre chronique de Lunatic par exemple. Mais bon « les goûts et les couleurs », comme on dit, faut d’arguments.

  12. Bonjour Adraye,

    Si c’est l’énième article sur le sujet, j’aimerais lire les autres si vous avez des sources.
    L’auteur ne cite que 4 ou 5 noms car cette liste ne se veut en aucun cas exhaustive.
    Effectivement, chaque genre peut être élitiste, personne ne le nie.
    Je ne pense pas prêcher à des convaincus au vu des prises de contacts que nous recevons de personnes ayant envie de se mettre à écouter du rap sans trop savoir par où commencer.
    Vous extrapolez en disant que nous pensons être des puristes. Le mot n’a été lâche à aucun endroit et loin de nous cette idée. L’auteur est loin de connaître 4 artistes, heureusement pour lui.

    Personne ne lirait un article de 7 feuillets, nous préférons une approche en plusieurs coups.

    Force & honneur l’ami !

  13. Enième article sans aucun fond où l’auteur pense argumenter en citant les 4/5 noms de rappeurs habituels permettant de faire passer ca pour un genre élitiste. Lequel ne l’est pas ? Même la pop’, contrairement à son nom, peut en être un à un certain niveau.

    Ca part d’un bon (trop?) sentiment, mais ca ne creuse rien, n’apporte rien. Vous voulez convaincre qui avec une si faible argumentation ?
    la seule réussite d’un tel papier, c’est de prêcher à des convaincus. Des convaincus qui croient qu’en connaissant Oxmo, Fabe et Rocé, ils font partie de l’élite du rap et sont des vrais puristes. Ca va bien plus loin que ca. Et si l’auteur ne connait que ces articles, qu’il cite leurs textes les plus complexes, les plus difficiles d’accès en illustrations.
    7 feuillets de journalistes, ca serait bien un minimum pour ce genre de (début de) débat.

    Courage & bonne humeur

  14. Si tu appelles La Fouine ou Al K-pote des rappeurs…
    Et les amateurs de rap lambda ont plutôt entre 25 et 40 ans.

  15. Je sais pas si le rap est élitiste, mais par contre mettre les mots « importants » en « gras » dans un article, ça évoque la peur d’un public qui ne comprendrait pas ce qu’il lit….Ca me rappelle les manuels scolaires…

  16. C’est ça.
    Mais le problème alors, est que les « arts » élitistes sont pour une élite.
    On ne peut pas considérer que les amateurs lambdas de Rap soient une élite.

    Il ne faut pas oublier que la plupart des auditeurs ont entre 15 & 20 ans. Que ça fait tourner LIM, Al K-pote et autres La Fouine.
    Si c’est une élite, elle est bien terne et peu attrayante.

    Il y a en revanche une élite parmi les auditeurs de Rap. Cette élite aime Oxmo, Fayçal, VII, Lucio Bukoswki, Nakk, ou L’indis et compagnie.

    Je vois les choses comme ça, ça fait vraiment puriste à 2€, je sais.

    Bonne continuation.

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