Sans Signature nous a pris, à moi et à Oster, plus d’un an de travail, de peaufinage, de destruction et de re-création. C’est un album sans concession, autant dans les textes que dans les choix musicaux. Il symbolise un peu notre vision de l’art et de la musique : n’écouter personne que soi, ne pas se brider ni réfléchir en fonction de l’auditeur (ou du critique, c’est selon). La diversité des atmosphères déroutera probablement à la première écoute, de même que le parti pris d’un mix et d’un mastering plus punk-rock que rap.
Ce titre de Sans Signature possède deux sens bien précis. D’abord il s’agit évidemment d’insister sur le fait que ce projet a été mené en parfaite indépendance. Aucun label, aucun financement, aucune limite dans nos choix. Cela signifie également aucune distribution. Nous sommes de petits artisans pratiquant le fait-main, hors de la grande industrie du disque et de la communication de masse. Ce projet est la preuve que l’autogestion est possible, que l’on peut se passer des DA-requins et autres parasites pompeurs de pourcentages. Cela demande un peu plus de temps et d’énergie mais c’est une histoire de choix.
Cette idée de Sans Signature comme liberté et indépendance dans la musique est représentée dans l’album par trois morceaux : Sans Signature, Indépendant (produit par Milka) et Tout plaquer. Cette petite trilogie résume ma vision du milieu rap (et artistique plus largement), c’est-à-dire l’éloge de l’insoumission et la fustigation des rampants. Ce sont peut-être les morceaux les plus rap de l’album, fortement orientés egotrip, à la fois agressifs et légers, drôles et pamphlétaires.
L’autre versant de Sans Signature (et c’est la raison pour laquelle mon nom n’apparait pas sur le visuel), c’est l’idée que chaque thème traité dans l’album concerne chacun de nous. La mort, le temps, l’art, le sexe, l’enfance, les angoisses existentielles. Le but recherché est évidemment que l’auditeur se retrouve personnellement impliqué dans ce qu’il écoute : peut-être que je raconte sa propre histoire, ou celle d’un proche. Peut-être que je mets en mots une pensée non formulée qui lui trottait dans l’âme.
Certains morceaux sont écrits dans cette optique, à l’image de Memento Mori, qui traite du thème de la mort, ou encore de Ludo, qui se présente comme l’état des lieux mental d’un homme qui réfléchit sur le temps qui passe, son parcours, ses échecs… Dans la même veine, la chanson Plus qu’un art (avec Arm et produit par Nestor Kéa) est une sorte d’OVNI poétique dans le genre Illuminations de Rimbaud.
D’autres titres s’intéressent plus à la critique du monde moderne (si l’on peut encore critiquer le modernisme sans passer pour un staliniste réactionnaire mangeur d’enfants). Le morceau Le clin d’œil du borgne (accompagné de DJ Fly aux scratches) s’inscrit dans cette idée : il s’agit d’un panorama du ridicule absolu dans lequel ont échouées nos sociétés « civilisées ». Le monde du spectacle, l’apologie de la bêtise, des discothèques et des biscuits allégés : voici ce qu’il nous reste de 5000 ans d’évolution, d’arts et de culture.
Enfin, deux morceaux plus spéciaux entrent dans la catégorie qu’on pourrait nommer textes à contraintes. Le 1er est Testament (avec Anto et Hippocampe Fou), où l’idée était de faire des sortes d’inventaires sous forme de dernières pensées. Le second est Le poète et le vandale (également avec Anto et produit par Haymaker), mais là je laisse la surprise du concept…
Voici donc grossièrement dessinées les grandes lignes de cet album.
Voici notre manière de faire de la musique et du texte.
Sans bornes, sans cases, sans attentes.
Merci bien et rideau.
L…
Pour vous procurer l’album, ça se passe à cette adresse : Sans Signature.