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Le rap français et le Name-Dropping

Au-delà de la critique, l’hommage.

Mais le name-dropping n’est pas seulement là pour critiquer ouvertement, il permet aussi de rendre hommage à une culture, un artiste ou un art. Sur le même plan que le morceau de Demi-Portion étudié dans cet article, les artistes vont introduire des éléments connus, des œuvres, des artistes implicitement pour en faire un véritable texte. On pourrait en citer des dizaines : Hymne au cinéma d’Hippocampe Fou, Ôde au Grand Jacques de Lucio Bukowski (encore), Littérature de deux membres de l’Animalerie (pour citer encore Lucio accompagné de Nadir). Mais nous ne développons pas plus, il est fort probable que ces morceaux soient analysés pour de prochains articles du même concept… Bon allez, simple citation du morceau du collectif Lyonnais pour la référence à Kafka « Crions métamorphose, faisons l’procès de vos établissements »

On termine cet argumentaire avec un récent hommage au rap signé Nekfeu dans le morceau Time Bomb, name-dropping déjà présent dans le titre. Sur quatre mesures, sept albums, artistes et morceaux rap sont cités, belle prouesse.

« Le combat continue, aucun temps mort / Tant qu’on est jeunes, coupables et libres / Pour être les princes de la ville, on boxe avec les mots / Un peu-Ra punchingball comme Oxmo, Opéra Puccino »

Alors oui, le name dropping peut parfois paraitre redondant dans le rap français, cependant, il faut prendre en compte qu’il est une partie intégrante de cette culture. Imaginez-vous un texte de rap sans cette figure de style, vous en devinerez la fadeur qui en découlerait. C’est comme un Brassens sans ses allitérations ou un Coltrane sans son saxophone. De plus, avec ce procédé, les rappeurs peuvent affirmer, implicitement, qu’ils ont les mêmes références culturelles que le reste de la population, que le rap n’est pas une bulle sectaire et casanière.

Pourquoi implicitement ? A vrai dire, les rappeurs n’ont rien à prouver, avec le name-dropping, ils vont jusqu’à créer leurs propres références pour ainsi émanciper cette culture comme nous l’avons vu avec le morceau de Nekfeu. Ce procédé est primordial pour captiver l’auditeur, il le transplante dans un décor familier et universel qu’il comprendra.  A présent, les artistes se l’approprient et l’arrangent à leur sauce, quel que soit leur but, c’est intéressant, c’est beau, et c’est une des raisons pour lesquelles on écoute du rap.

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5 commentaires

  1. Très bon article même si on retombe souvent sur les mêmes artistes malgré la variété des thèmes abordés.

    Concernant le name dropping, comme T.BRED MMC, j’ai pensé directement à « Lecture aléatoire » de Médine et son énorme « Dans la caisse, on bosse IV my people
    Mais la rouille rongera la chaîne
    Tout sera moins cool quand Joey deviendra star dans les chaînes »

  2. Louis-Ferdinand Céline, et non Louis Fernand. Sinon l’article est intéressant dans sa quête de vérité artistique. Cela fait plaisir de voir que le rap, pour certains, n’est pas « une sous culture d’analphabétes » mais bien un mouvement artistique, et donc analysable intellectuellement.

  3. L’article est de qualité et le sujet est vraiment intéressant. Un phénomène dont on parle peu dans le rap mais auquel la plupart des rappeurs accordent de l’importance sans parfois même s’en rendre compte.

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