L'exégèse rapologique

L’Exégèse rapologique #2 – Solaar Pleure de MC Solaar

Troisième couplet – Deuxième mouvement

Solaar pleure, Solaar pleure… (vers 52)

NON ! Pourquoi moi ? c’est une erreur ! (vers 53)

Garde-moi, je suis noble de cœur ! (vers 54)

Arrêtez la chaleur, j’crache sur Belzébuth, (vers 55)

Je garderai la foi, et puis j’ai l’uppercut. (vers 56)

En effet, le combat épique qui va opposer l’As à Satan sera de nature verbale. On remarque d’abord que le fade-out des « Solaar pleure » remplace le refrain et est associé à un long break instrumental et poétique qui sépare les deux mouvements : ces procédés suggèrent que le morceau touche à sa fin et que Solaar a donc perdu, ou abandonné tout du moins. Mais il résiste, et cette résistance est avant tout verbale : le moment où il hurle « Non ! » correspond à celui où il se « réveille » et reprend espoir.

Et on constate vite que le reste de sa défense est elle aussi entièrement rhétorique : Claude parle certes d’uppercut (vers 56) et de lance-flammes (vers 60), mais il ne fait qu’en parler et n’entreprendra jamais d’action physique directe à l’égard de Lucifer pendant toute la durée de leur confrontation. Le combat n’est donc pas littéral – le p’tit se serait vite fait fumer –, mais bien verbal et moral : ou pour le dire autrement, les armes de Solaar seront son rap et ses principes – ça ne vous rappelle pas quelque chose ?

Mais ralentissons un peu, nous n’en sommes pas encore vraiment au combat ; on remarque en effet que ces quatre mesures ne s’adressent pas au diable mais à Dieu, comme le suggèrent l’expression « Garde-moi » et le fait qu’il mentionne le premier à la troisième personne. On en revient donc au jugement du deuxième couplet où Solaar, de la même manière, défendait sa valeur. En réalité, il est vrai que les circonstances (à part le lieu, évidemment) et les enjeux ne sont pas si différents : l’As plaide sa cause auprès du Créateur pour éviter un châtiment éternel – la grande divergence portant finalement sur l’intensité du discours.

Celui-ci est en effet traversé par de nombreux effets phonétiques qui augmentent sa densité et accentuent son impact : une assonance en [a] sur les quatre vers, qui met en relief les groupes « Pourquoi moi », « Garde-mo», « Arrêtez la chaleur » et « Je garderai la foi » ; une autre en [e] qui insiste sur la proposition « Je suis noble de cœur » ; et une allitération en [r] sur le vers 55 qui lui confère une grande force. On note enfin un jeu sonore sur les rimes « sur Belzébuth » et « j’ai l’uppercut » qui met en valeur ce qui constitue à mon sens le premier coup de ce duel, l’uppercut – un coup de nature rhétorique, comme je l’ai précisé plus haut, et symbolique.

Symbolique, car n’oublions pas que derrière l’Antéchrist, c’est tout autre chose que MC Solaar combat : par un procédé de personnification qui remonte à bien avant notre naissance, Satan représente évidemment le Mal dans toute son essence, pur, absolu et universel. Lors de son jugement, Claude a tenté de convaincre le Créateur par la preuve de sa vertu et de son amour du bien ; il fait ici la même chose en montrant son mépris pour le vice et sa volonté de le combattre. Ces actes se voient donc liés entre eux par leur but commun – prouver sa valeur à Dieu – et deviennent alors presque synonymes. Chez Solaar, faire le bien revient à combattre le mal – ce qui explique, dans une certaine mesure, son comportement passé et présent.

Pourquoi ce blâme ? Pourquoi ces flammes ? (vers 57)

Pourquoi ce torréfacteur qui nous crame ? (vers 58)

Cet âne de Sheitan plane sur nos âmes, (vers 59)

Il vit par le feu, périra par le lance-flammes. (vers 60)

A propos de ces mesures, on notera d’abord qu’elles poursuivent l’assonance en [a] et l’allitération en [r] des précédentes, notamment par la triple répétition de l’adverbe « Pourquoi » qui crée un effet de questionnement rhétorique appuyé par la rime en –ame des groupes concernés. Ce procédé, qui caractérise les mesures 57 et 58, est appuyé par une puissante allitération supplémentaire en [c] et l’usage de termes fortement connotés : le tout accentue la violence et la cruauté du sort réservé au MC, et sous-entend évidemment qu’il ne le mérite pas. Lui, mais pas uniquement : « Pourquoi ce torréfacteur qui nous crame ? / Cet âne de Sheitan plane sur nos âmes ».

Si le propos est subitement étendu au reste de l’humanité, c’est pour une raison très simple : c’est parce qu’elle est désormais concernée. Par ce procédé de généralisation, MC Solaar s’inscrit dans un mouvement qui dépasse sa personne : du duel pour le salut de son âme, il fait une bataille pour le salut des hommes. Pris en considération avec la nature symbolique de l’Antéchrist décrite un peu plus haut, ce phénomène montre que nous passés d’une lutte entre deux entités précises – Solaar et Satan – à la confrontation de deux concepts plus généraux : le bien et le mal. Ce dispositif poétique induit donc, en filigrane, l’idée que l’As est la personnification de la vertu (ou en tout cas son représentant), de la même manière que Lucifer l’est pour le vice.

Ce dernier est d’ailleurs le sujet des mesures 59 et 60, lesquelles poursuivent le thème du combat verbal. On remarquera d’abord la poursuite de l’assonance en [a] et l’ajout d’une allitération en [l], qui créent un forte impression de vivacité ; l’assonance est soutenue par l’effet de paronymie équivoquée qui lie les syntagmes « Cet âne » et « Sheitan » – rapprochement phonétique qui tend largement à moquer et réduire ce dernier.

Enfin, le vers 60 constitue une élégante réécriture de la célèbre sentence biblique « Qui vit par l’épée périra par l’épée ». Il fait montre d’une grande violence lexicale, appuyée par de puissantes allitérations en [p] et en [r] qui insistent tout particulièrement sur le verbe « périra », qui voit ainsi son impact renforcé. Mais le principal intérêt de cette mesure réside dans la variation qu’y insère Solaar, qui ajoute du sel à la reprise de la locution biblique : en effet, au lieu de répéter le syntagme « feu » comme l’est le mot « épée » dans la citation originelle, Claude achève le vers par la mention d’un « lance-flammes ». Ce procédé, en plus d’augmenter significativement la violence de la mesure, suggère que la fin de l’Antéchrist ne peut être le fait d’une loi abstraite et universelle (telle que « Qui vit par l’épée périra par l’épée »), mais de l’action d’un homme – car il en faut bien un pour porter le « lance-flammes » –, sous-entendant ainsi la nécessité d’intervenir et d’agir contre le mal, en opposition à une attitude passive qui attendrait que le « feu » s’en charge.

Du lac Lancelot, double A du Graal, (vers 61)

Rabbins, prêtres, imams priez, aidez-oim ! (vers 62)

J’ai porté la croix jusqu’à la main de Fatma ! (vers 64)

Pourquoi moi, pourquoi ce karma, zarma, (vers 63)

On peut observer que l’As convoque dans ces quatre vers une multitude de symboles religieux, rendant ainsi tout à fait apparente cette volonté de généralisation de son propos, d’universalisation de sa lutte axiologique, que nous avions pu observée à travers le passage au « nous ».

Mais plus que convoquer ces symboles, il les revendique : cela est visible dès le vers 61, où il établit un rapprochement significatif entre son blaze et le « Graal » en pointant le « double A » qu’ils partagent (tout en glissant une petite assonance en [a] pour illustrer tout ça) ; il s’agit d’un jeu de mots assez proche de celui qu’il faisait dans le vers « Ci-gît Claude M’Bara, initiale MC ». De la même manière que dans cette dernière mesure, ce procédé lie étroitement le nom de Solaar (dans un sens figuré, sa nature) à une fonction ; il s’agissait avant de rap (de pratique poétique), il s’agit maintenant de religion – de morale.

Cette idée était déjà légèrement sous-entendue dans la proposition « Du lac Lancelot », qui suggère que le rappeur se place sous le signe du Chevalier de la charrette, donc de la justice et de la vertu. Mais je suis persuadé que son principal intérêt et que la raison même pour laquelle Solaar l’a écrite ont été entièrement cernés par RapGenius : « Certains voient aussi un jeu de mots entre “lance-flammeset “lance-l’eau” (Lancelot) ». Les « Certains » ont raison, doutez pas d’vous-mêmes les gars ! Bien joué en tout cas, j’avais pas du tout cramé – merci. Bref, un jeu de mots inséré un peu à l’arrache par un poète aguerri, mais toujours avec classe puisqu’en opposant l’eau aux flammes il accentue indirectement l’antinomie du bien et du mal.

La mesure 62 montre un beau mouvement œcuménique par la mention de représentants des trois grandes religions monothéistes, et tout le vers est construit pour les mettre sur un pied d’égalité. On remarque en effet que la syntaxe n’opère aucune distinction entre eux, et que tous ont droit à leur effet sonore : la suite de la précédente assonance en [a] sur « rabbins », « imams » et « oim », une allitération en [r] sur « rabbins », « prêtres » et « priez », et enfin la rime interne en « imams » et « oim ». Tous ces effets appuient la volonté de rassemblement du rappeur ; mais c’est véritablement autour des deux verbes du vers que celle-ci se cristallise.

La syntaxe, nous l’avons dit, n’établit aucune différence entre les trois noms de la mesure : les verbes s’appliquent donc à eux à une intensité égale. Or ces verbes ne sont pas anodins : « priez » et « aidez-oim ». Le premier invoque l’acte de prière, et donc indirectement la foi en Dieu, qui constitue donc le premier point commun des trois religions du Livre selon Solaar. Mais surtout, « aidez-oim ». Pourquoi l’As demande de l’aide ? Pour affronter Satan, le mal. C’est le deuxième point commun : si MC Solaar convoque et rassemble les trois monothéismes à ce moment fatidique, c’est parce qu’il estime qu’ils sont (ou devraient être) tout aussi déterminés que lui à combattre le mal. Plus que celle de faire le bien, c’est la volonté d’agir contre le mal qui serait commune à toutes les religions monothéistes : unies par ce but commun et autour de la personne de l’As, leurs divisions sont alors reléguées à l’ordre du détail sans importance.

Le vers 63 poursuit ce mouvement d’ouverture religieuse, par la mention du « karma » et par sa liaison paronymique avec l’islam via le terme « zarma », qui lui est immédiatement adjacent. De la même manière que dans le vers précédent, on note la présence de nombreux effets sonores qui renforcent cette volonté de rassemblement : la poursuite de l’assonance en [a], une allitération en [r] et une autre en [m], qui continuent toutes au vers suivant.

Celui-ci se caractérise par l’usage d’une élégante figure de rhétorique, le zeugma, qui consiste à lier syntaxiquement un mot (souvent un verbe) à deux autres mots ou groupes de mots qui entretiennent avec lui des rapports sémantiques différents. Il réside ici dans le terme « porté », qui renvoie à deux sens différents selon qu’il s’applique à « la croix » ou à « la main de Fatma ». Ces deux expressions sont en effet fortement connotées : d’une part, porter la croix fait inévitablement penser à la Passion du Christ ; d’autre part, porter une main de Fatma évoque naturellement l’image du bijou. Le verbe « porté » n’apparaît donc textuellement qu’une unique fois, mais deux de ses sens sont exploités. Notons qu’en plus, les deux termes qui lui associés ne sont pas liés uniquement syntaxiquement et sémantiquement, mais aussi phonétiquement puisqu’ils sont rapprochés par l’assonance en [a] qui les traverse.

Ce procédé crée une relation d’équivalence entre les deux symboles – et donc entre les deux religions qu’ils représentent. Cette relation passe une fois de plus par la personne de Solaar (« J‘ai porté »), lequel, en définitive, mobilise et revendique plusieurs symboles de différentes confessions pour mieux unir celles-ci autour de sa cause et de sa pensée.

Je suis comme un gladiateur desperado, (vers 65)

Envoyé en enfer pour une mission commando. (vers 66)

Lucifer, ne vois-tu pas que Dieu est fort ? (vers 67)

Si nous sommes soudés, nous t’enverrons toucher la mort ! (vers 68)

La première paire de mesures est simplement essentielle : elle transfigure le châtiment de Solaar en « mission » pour le compte du divin. Cela est notamment visible par le passage de « gladiateur desperado », une expression qui évoque l’esclavage et la violence, à « mission commando », qui est connotée beaucoup plus positivement puisqu’elle sous-entend que l’As agit sur les ordres de Dieu. Mais comme le suggère l’usage de la conjonction de subordination « comme », on peut légitimement penser que cette transfiguration n’est pas le fait du Seigneur mais de Claude lui-même, qui décide ainsi de tirer le meilleur parti de sa situation : envoyé en Enfer par Dieu pour y pourrir, l’inarrêtable Solaar n’y voit qu’une belle occasion de le servir, en abattant son plus grand opposant. Une opposition ontologique illustrée dès le vers suivant, avec les expressions « Lucifer » et « Dieu est fort », par procédés allitératif et structurel.

On remarque enfin que la mesure 68 est construite sur le modèle de la condition : [si + condition + effet]. Cette structure induit que la première proposition, « Si nous sommes soudés », apparaît comme une condition sine qua non à la réalisation de la seconde : en somme, l’unité des gens de bien serait nécessaire à la défaite du mal – idée appuyée par la relation phonétique qu’entretiennent la condition et l’effet, et qui explique le désir de Solaar d’unir toutes les confessions sous une même bannière, celle du bien. Dans une acception diamétralement opposée, on peut aussi comprendre qu’« il suffit que les hommes de bien ne fassent rien pour que le mal triomphe ».

Troisième couplet – Troisième et dernier mouvements

Solaar pleure, ses larmes éteignent les flammes, (vers 69)

Libère les âmes, fait renaître Abraham (vers 70)

Le diable est à l’agonie, unissons nos forces, (vers 71)

Bouddha, Grand Architecte, Teresa bombons le torse ! (vers 72)

Nous y sommes ! Introduite par un cri de désespoir, l’ultime et peut-être la plus significative des occurrences du syntagme « Solaar pleure », celle qui va faire entrer l’œuvre dans la sphère de l’épique. Contrairement aux précédentes, l’action qu’elle exprime (Solaar pleurant) est en effet profondément ancrée dans la diégèse : elle a une influence directe sur le cours du récit dont elle fait partie, puisque ce « Solaar pleure » final signe la victoire de l’As ; sa valeur symbolique n’en est alors que plus forte. L’acte de pleurer serait capable d’éteindre les flammes et donc, plus littéralement, de faire disparaître le mal. Or Solaar qui pleure, c’est Solaar qui rappe ses plaintes – ainsi l’acte de pleurer, ce même acte qui a le pouvoir de vaincre Lucifer, mobilise à la fois ses codes moraux et sa pratique poétique. Ce sont donc très exactement les deux armes que l’As utilise dans sa lutte, les deux moyens qu’il propose pour affronter le vice : cet ultime « Solaar pleure » et ses conséquences sur l’action montrent que pour Claude, le mal doit être combattu par l’art et la morale. On comprend alors d’autant mieux ses cris de ralliement : l’As se fait le medium artistique de la force morale des religions.

Pour appuyer cette idée, souvenons-nous que le combat que le poète mène contre l’Antéchrist est d’ordre exclusivement verbal, oral : poétique. Nous l’avons dit, le moment où il reprend espoir en ses chances de victoire, le moment où il hurle « Non ! » coïncide avec celui où il se remet à rapper. Et ce pouvoir « poético-moral » est capable non seulement d’éradiquer le mal, mais aussi de préserver voire de ranimer le bien. On remarque d’ailleurs dans cet extrait que le pouvoir des larmes de Solaar (donc de sa poésie et de sa morale) est de nature profondément religieuse, voire mystique, puisqu’elles affectent des « âmes » et le père légendaire des monothéismes – un symbole qui n’est évidemment pas anodin, et qui suggère l’importante valeur spirituelle et religieuse de l’art et de la morale. Enfin, ce procédé d’accumulation d’actions extraordinaires du protagoniste constitue un trait typique de l’épopée : ce souffle héroïque, homérique, va caractériser l’ensemble de ce dernier mouvement.

Notons en dernier lieu que les mesures 69 et 70 montrent des effets sonores intéressants qui lient les différents syntagmes qui les composent entre eux. D’abord, la ressemblance allitérative entre « Solaar » et « ses larmes », qui met grandement en relief l’aspect lyrique de ces vers ; ensuite, la rime interne sur « ses larmes » et « les flammes », deux groupes syntaxiquement connectés et sémantiquement opposés, ce qui a pour effet d’accentuer leur caractère antithétique et l’antagonisme du bien et du mal ; et enfin une assonance en [è] et deux allitérations, en [l] et en [r], qui permettent une scansion extrêmement fluide et accentuée de ces deux mesures.

Les vers suivants poursuivent cet effort de vivacité par l’usage d’une assonance en [a] et d’une allitération en [n] (sur le 71 uniquement). L’assonance a aussi pour conséquence d’entretenir la volonté de rassemblement du MC en rapprochant significativement trois entités symboliques de différentes confessions : « Bouddha, Grand Architecte, Teresa ». Enfin, la rime « unissons nos forces » / « bombons le torse » crée d’une part un puissant effet d’apostrophe par le double usage en fin de vers de l’impératif à la première personne du pluriel, et suggère d’autre part l’intensité épique et la progression du combat par la nature du lexique utilisé (unir nos forces, bomber le torse), comme s’il suffisait d’une dernière poussée, d’un dernier effort pour triompher de Lucifer.

« Solaar pleure », Solaar rappe ses plaintes : pour résumer et affiner l’analyse, il s’agit d’une synthèse extrêmement puissante des codes axiologiques du rappeur, qui sont la cause de sa déploration, et de sa pratique poétique, qui constitue le moyen par lequel il l’exprime. Cette élégie, marquée par l’union étroite de l’art et de la morale, agit sur sa cause, le vice des hommes : tout au long du texte (et pas uniquement lorsqu’il dit « Solaar pleure »), MC Solaar nous présente en effet cette combinaison comme le meilleur moyen de combattre le mal et de faire le bien – j’y reviendrai en conclusion.

Priez, aidez-moi, il chancelle, il boite, (vers 73)


l s’consume, il fume, il n’a plus qu’une patte ! (vers 74)

Je vois qu’il souffre, je vois qu’il hurle, (vers 75)

Il a créé le Mal, c’est le Mal qui le brûle ! (vers 76)

La première paire de mesures montre une répétition assez intéressante du « priez, aidez-oim » du vers 62 : l’As convoque de nouveau ses alliés spirituels des mesures précédentes pour achever Lucifer : « il chancelle, il boite / Il s’consume, il fume, il n’a plus qu’une patte ! »). Cette description progressive, entièrement tournée vers l’antagoniste, suggère que la fin est proche et constitue une gradation vers la défaite du Diable qui confère à l’action un grand souffle épique.

Notons aussi que les verbes « il s’consume, il fume » évoquent fortement le vers 60. Il faut croire que maintenant que les hommes de bien se sont unis, la sentence prophétique s’est réalisée ; et son impact est encore renforcé par les sonorités : « Il s’consume, il fume, il n’a plus qu’une patte ».

La mesure 75 poursuit cette description graduelle, laquelle achèvera son mouvement ascendant au vers suivant, et débute une allitération en [l] produisant une grande sensation de fluidité à l’écoute, mais qui ne prendra sa pleine mesure qu’au vers 76 elle aussi.

Celui-ci répète deux fois le mot « Mal », mais cette redite n’est pas vaine : elle se double d’une modification de la fonction syntaxique du « Mal » et de Satan qui, en jouant de la sorte avec leur relation de causalité, suggère la dimension ironiquement équitable du sort réservé à Lucifer. L’effet agit sur sa cause, la créature sur le créateur, qui ne récolte alors que ce qu’il a semé. Enfin, la proposition « c’est le Mal qui le brûle » montre elle aussi l’accomplissement de la sentence du vers 60 et associe le feu au vice de manière définitive, sous-entendant ainsi que le feu, pourtant l’un de ses attributs majeurs, s’est lui aussi retourné contre Satan, qui semble alors complètement désarmé.

Le bien pénètre chez la bête de l’Apocalypse, (vers 77)

Comme poussé par une hélice, pour que son aura s’éclipse (vers 78)

Raël, Raël, Ézéchiel, Ézéchiel, (vers 79)

Avec la lumière, combattre le mal suprême ! (vers 80)

Ces quatre mesures, plus que les précédentes, sont entièrement consacrées à l’expression sonore de l’intensité épique de l’action : leur intérêt est en effet principalement technique. Le vers 77 commence plutôt doucement, par la « corruption positive » de Lucifer, puisqu’il se voit pénétré par le bien, en opposition à la mesure précédente où il était brûlé par le Mal. Ce retournement illustre la progression du combat : mis à genoux par sa propre arme, le mal, l’Antéchrist va être achevé par celle de Solaar, le bien. Ce dernier est ainsi mis en valeur par une correspondance phonétique en [b] et une opposition sémantique avec le mot « bête » – opposition appuyée par le complément « de l’Apocalypse ». Le terme « bête » connaît d’ailleurs un autre écho sonore, avec le mot « pénètre », qui accentue encore la violence du propos.

C’est avec le vers 78 que se multiplient les jeux phonétiques : une allitération en [p] entamée à la mesure précédente, une autre en [s], une légère paréchèse sur la syllabe « pou » et un jeu d’assonances entre « -pocalypse » et « aura s’éclipse ». Le tout est rappé très rapidement, avec une forte accentuation à la césure, exprimant ainsi par les sonorités le déchaînement et l’intensité de l’action.

MC Solaar invoque dans la mesure 79 d’autres personnages religieux, mais cette fois-ci moins pour illustrer une volonté de rassemblement que dans une perspective technique : en effet, outre les évidentes rimes en « -el » et l’assonance en [l] à laquelle elles participent, le mot « Raël » va entamer une allitération en [r] et une assonance en [a] qui vont se multiplier et se déployer pleinement à la mesure 80. Celle-ci ajoute aussi une assonance et une accentuation orale particulière qui lient « lumière » à « [mal] suprême ». La grandiloquence de cette opposition et de ce vers, considérée avec la scansion frénétique et presque affolée que permettent ces très nombreux effets sonores, montre que nous sommes arrivés à l’acmé, au paroxysme de l’œuvre.

Le Mal hurle ! je l’entends hurler, (vers 81)

Des fleurs poussent, El Diablo est carbonisé (vers 82)

Il implose, il explose, (vers 83)

Et de l’antimatière jaillissent des ecchymoses ! (vers 84)

Ces quatre mesures poursuivent et achèvent donc le mouvement épique qui caractérise l’ensemble de ce 16 et qui atteint ici son apogée : cela est textuellement appuyé au vers 81 par la phrase « Le Mal hurle ! », et musicalement par les hurlements en arrière-plan. De plus, cette mesure entame une allitération en [l] et une autre en [r] qui vont se développer par la suite et qui illustrent l’intensité de la bataille, comme c’est le cas de l’assonance couronnée interne du vers 82, laquelle montre d’ailleurs l’accomplissement total de la sentence du vers 60, avec le verbe « carbonisé ». Notons en dernier lieu l’expression « Des fleurs poussent », qui constitue un élégant indice poétique de la défaite de Satan ; il entre en dissonance avec le déchaînement des propositions qui l’entourent, renforçant ainsi le contraste entre cette scène affreuse et ses conséquences salutaires.

Le vers 83 se caractérise presque entièrement par sa rime (voire sa paronymie) interne, dont le caractère antithétique est sérieusement accentué par la brièveté du vers et la lourdeur de la scansion, illustrant ainsi l’aspect extraordinaire, inouï et final de l’action. Enfin, la mesure 84 montre une assonance en [i] qui participe à l’entretien du souffle épique de ces vers, et un écho phonétique entre « explose » et « ecchymoses » qui insinue la violence de la mort de Lucifer.

Par ailleurs, comme nous le suggère l’annotateur CirrusMinor, il ne serait pas pertinent de comprendre cette mesure littéralement : « l’antimatière » est en effet invoquée dans une perspective, dans un sens uniquement poétique. Il en va de même pour le jaillissement des ecchymoses, qui n’a aucun sens s’il est compris littéralement – les « ecchymoses » ne « jaillissent » pas. N’oublions pas qu’il s’agit de l’ultime mesure du combat épique qui oppose MC Solaar à Lucifer ; ainsi, elle a clairement vocation à achever le récit, à le couronner d’un dernier prodige – d’une « cerise sur le gâteau ». Ce lexique étrange est convoqué dans le seul but d’appuyer la violence et l’aspect métaphysique, voire surnaturel de ce vers final.

Satan est mort, le bien reprend vie. (vers 85)

A quand la Terre comme nouveau paradis ? (vers 86)

On ne sait plus que faire, on ne sait plus quoi faire, (vers 87)

L’enfer est sur terre et qui la gère ? (vers 88)

La conclusion : elle agit comme une morale, puisqu’elle dévoile la dimension allégorique de l’œuvre et développe très brièvement ses implications. Le texte aurait très bien pu s’achever sur la défaite de Lucifer, sans que son impact ou sa portée n’en soient affectés ; nous avons pourtant devant nous quatre mesures supplémentaires, presque superflues, qui ne rajoutent rien au récit qu’elles closent puisqu’elles en sont presque entièrement détachées. Pire, en abandonnant ainsi le registre du récit métaphysique allégorique pour retourner sur « terre » et s’adresser directement à l’auditeur, on pourrait aisément reprocher à ces vers de tout simplement ruiner la valeur symbolique et l’aspect mystérieux du texte. Mais c’est aussi et paradoxalement tout leur intérêt : leur fonction de morale explicative appuie la dimension didactique de l’œuvre et l’ancre ainsi profondément dans la réalité de l’auditeur – qui n’a alors plus besoin de recourir à l’interprétation ou de lire une fuckin’ exégèse pour comprendre ses implications dans leurs grandes lignes.

La mesure 85 est syntaxiquement construite de manière à fortement suggérer un lien de causalité entre les deux propositions qui la compose : « le bien reprend vie » parce que « Satan est mort » ; pour le dire autrement, le bien peut prospérer parce que le mal a disparu. Une fois de plus, combattre le mal revient à faire le bien, mais c’est plus que cela qui est suggéré par cette phrase : elle sous-entend qu’à l’inverse, la vertu s’éteint lorsque le vice s’épanouit ; elle sous-entend que leur relation est régie par des rapports de domination et même d’interdépendance, puisque la condition de l’une affecte celle de l’autre. Est alors déclarée plus explicitement une idée souvent sous-entendue dans le texte : la nécessité de combattre le mal, car faire le bien ne suffit pas. Solaar nuance alors une fois de plus le manichéisme de son système axiologique, de son idéologie morale, laquelle n’est pas loin de son aboutissement.

De plus, le vers 85 débute une allitération en [r] poursuivie sur le 86 qui permet une accentuation particulièrement marquée des mots « mort », « terre » et « paradis ». Ces deux mesures sont aussi liées par la symétrie métrique et sonore des expressions « Satan » et « A quand », cette dernière suggérant une nouvelle relation de causalité, comme si « la terre comme nouveau paradis » n’était envisageable qu’une fois « Satan mort » – comme s’il suffisait de combattre le mal pour rendre le monde meilleur, comme s’il était l’unique chose qui empêchait la terre d’être un « paradis ». Dans cette conclusion plus qu’ailleurs dans le texte, MC Solaar insiste sur l’importance de la lutte contre le vice, bien plus que sur celle d’un comportement vertueux – sous-entendant alors peut-être qu’il est plus efficace de combattre le mal que de faire le bien.

La mesure 87 montre une répétition intéressante puisqu’elle se double d’une variation du pronom interrogatif (de « que », on passe à « quoi ») : ces deux procédés accentuent terriblement la sensation de désemparement et de désespoir transmise par ce vers. Celle-ci est encore renforcée par une assonance en [è] (qui continue à la mesure suivante) qui insiste sur les termes répétés « sai» et « faire », qui constituent très justement le cœur de l’expression de la désespérance du poète. Il est d’ailleurs curieux que ce dernier se mette dans cet état à deux doigts de la fin et juste après avoir éradiqué le mal : mais voilà, nous ne sommes plus dans le récit allégorique autofictionnel qu’est Solaar Pleure, mais bien « sur terre » et dans la réalité. La fable finit bien, mais sa morale est cruelle – le mal domine toujours le monde.

C’est ce qu’exprime la proposition « L’enfer est sur terre ». Les deux occurrences du mot « terre » que nous pouvons observer dans ces mesures sont d’ailleurs très significatives : la « terre » est d’abord liée au Paradis, mais dans une perspective de questionnement ; elle est ensuite associée à l’Enfer, et il s’agit cette fois d’une affirmation catégorique. Ce phénomène n’est pas négligeable, car la « terre » n’avait pas été mentionnée depuis le premier couplet : en effectuant ainsi un retour au terrestre, au matériel, il témoigne de la volonté d’ancrage dans la réalité de l’auditeur que nous avons identifiée plus haut. Mais il a aussi et surtout valeur de synthèse explicative : en demandant « A quand la terre comme nouveau paradis ? » et en affirmant juste après qu’elle connaît « l’enfer », l’As décrit figurativement les codes moraux (ou leur absence) des hommes, et par extension expose de nouveau la raison à l’origine de sa quête spirituelle – le vice des hommes, l’enfer sur terre. Ce procédé, qui consiste à achever le discours par la répétition de sa thèse de départ, réoriente la finalité et les implications de l’énoncé, et inscrit le corps du texte dans une logique argumentative globale : Solaar conclut le récit allégorique de sa lutte ontologique par le rappel de son fondement, et la boucle est ainsi bouclée.

Par ailleurs, l’expression « L’enfer est sur terre », avec « gère », participe à une triple rime interne entamée au vers précédent, laquelle, considérée avec la position finale de cette mesure, amplifie grandement l’impact de cette ultime question rhétorique. Car contrairement à celle du vers 86, cette interrogation est bien rhétorique : sa réponse est déjà connue du locuteur, et elle a valeur d’affirmation déguisée. En somme, demander « qui la gère » après avoir affirmé que « l’enfer [était] sur terre » permet à Solaar d’établir une corrélation significative entre le vice des hommes et leurs chefs : entre le pouvoir et la morale. Cette idée est aussi illustrée par le phénomène de variation des pronoms interrogatifs, qui suggère que le mal se répand et que la terre n’est pas un paradis non pas parce que les gens de bien n’agissent pas assez (ils agissent au contraire tellement qu’ils ne savent « plus que faire », deux fois!), mais parce que certains individus spécifiques contrebalancent totalement leurs efforts : les gérants, les dominants, les puissants.

Le rapport ainsi créé entre pouvoir et morale sous-entend assez explicitement que la purification de la terre doit passer par celle de son élite : les valeurs des hommes seraient subordonnées à celles de leurs dirigeants. Cette idée insérée au dernier moment pose la pierre finale sur l’édifice de l’idéologie morale de MC Solaar.

Conclusion

Comment résumer ? Comment suis-je censé résumer l’analyse d’un texte si long, d’un morceau si technique, d’une œuvre si dense, si complexe, si puissante ? Les éclairs de virtuosité poétique et autres traits remarquables abondent : un jeu constant sur la narration et la situation d’énonciation, une brutalité pensée et contrôlée des transitions, un immense travail technique sur les sonorités, et une multiplication des procédés d’euphémisation et de dramatisation ainsi qu’une densité poétique et symbolique dignes des plus grands poètes classiques.

Une idéologie axiologique singulière enfin, très chrétienne et extrêmement manichéenne, mais beaucoup plus subtile qu’il n’y paraît. Car si Solaar exhibe constamment sa haine du vice et son amour de la vertu, il sait pourtant que la frontière entre eux est floue : les prêtres sont d’abord connotés négativement avant de devenir ses alliés et, comme le montre son escale au Paradis, combattre le mal peut amener à le faire – l’Enfer est pavé de bonnes intentions. Le passage de l’As au jardin d’Éden n’a que mieux révélé ses faiblesses ; son excursion en Enfer a mis sa force en valeur. Cette force, elle s’illustre par le meilleur moyen que le rappeur a trouvé pour affronter le mal sans se corrompre : la puissante alliance de sa poésie et de ses principes, de son rap et de sa spiritualité, de l’art et de la morale, qui se cristallise à plusieurs endroits du récit, mais tout particulièrement à travers l’expression « Solaar pleure ».

Solaar Pleure. Le titre du texte, et son syntagme le plus significatif sans doute. J’ai beau l’avoir examiné, analysé, décortiqué dans tous les sens, il me laisse toujours l’impression d’être trop haut, trop symbolique, trop subtil pour que je puisse pleinement en saisir le sens, d’être au-dessus d’une compréhension critique et rationnelle – comme s’il s’agissait d’une sentence qui se suffirait à elle-même, dont la seule fin serait elle-même et qui tiendrait par la seule force de son évocation.

C’est pourtant en elle que s’accomplit le plus intensément l’union élégiaque de la morale et de l’art : MC Solaar pleure, rappe ses plaintes, exprime sa déploration par la poésie pour mieux s’opposer à l’objet de son élégie – le mal.

Enfin, cette combinaison de l’art et de la morale, de la pratique poétique de l’As et de sa spiritualité, ravive le souvenir d’une posture poétique qui a depuis longtemps disparue de l’histoire littéraire : celle du poète inspiré par les dieux, le vates. En latin primitif, ce mot signifiait prophète et plus généralement devin, oracle. Mais à partir du IIe siècle av. J.-C., l’usage du terme s’est étendu pour désigner une sorte de poète-prophète qui porte le message des dieux par sa poésie. Et pendant toute l’Antiquité, la Renaissance, la période classique et dans une moindre mesure le Moyen-Âge, cette position de poète d’inspiration divine sera reprise par les écrivains, dont Dante.

Dans une certaine mesure, Solaar adopte lui aussi dans cette posture héritée de l’Antiquité et aujourd’hui tombée en désuétude – elle est manifeste dans le vers 22 notamment : « Pas pour parader mais professer la septième prophétie ».

Vates des temps modernes, poète-prophète d’la street, MC Solaar ne prétend pourtant pas prêcher la bonne parole : il préfère la rapper. Solaar Pleure, c’est un sermon déguisé en rap épique – la morale passe toujours mieux avec des rimes, du rythme et de l’action : La Fontaine le savait, l’As aussi. L’art prête sa beauté à la morale, qui en retour lui défère sa vérité. Alors quitte à exiger qu’il la mène droitement, autant essayer de faire en sorte qu’la vie d’autrui soit comme une poésie

À proposIdir

Just rap.

13 commentaires

  1. Merci pour cette exégèse très fouillée ! Pour être honnête je n’avais pas le quart de la moitié du commencement de tout cela 😉 Je vois cependant une autre dimension qui n’a pas été évoquée sauf erreur de ma part : le combat du héros est épique parce qu’il est unique et extraordinaire au premier sens du terme. La conclusion voit la victoire de l’As sur Lucifer, mais le retour à la réalité voit un monde toujours dominé par le mal. Le héros remporte une victoire individuelle mais ne sauve pas le monde (ou alors par l’exemple seulement) car il faudrait des millions d’autres combats et d’autres victoires pour faire de la Terre un paradis.

  2. Impressionnant cet article, et impressionnant ce site !
    Mille félicitations à l’auteur.
    Dont j’ai recherché quelques éléments biographiques sans succès.
    Tous ces articles sont-ils écrits bénévolement ?
    Un tel travail mérite salaire 😉 reconnaissance publique diffusion.
    Bravo !

  3. Je tombe sur cet article un peu en retard… Déjà merci pour l’analyse c’est super intéressant, je n’avais pas tout compris à l’époque même si j’adorais déjà la chanson.
    Je réponds principalement à SolaarFan qui se posait une question sur le sens de son nom (à 0:45). Moi aussi je trouvais le son bizarre, comme s’il était édité à ce moment-là mais je n’avais jamais compris en quoi.

    Je viens de tester d’inverser le sens de défilement du son (avec Reaper) pour voir ce que ça donnait et en effet, le son est à l’envers à ce moment-là. Une fois remis dans le bon sens il dit clairement « M’Barali Claude » avec une diction plus naturelle (donc dans le bon sens). Dans le morceau (donc inversé), ça donne quelque chose comme « Dlauc ilaraB’M », ce qui se rapproche en fait beaucoup phonétiquement de son nom à l’endroit, surtout avec le début de « initiale » à la suite qui fait office de dernière syllabe de « M’Barali » comme l’a noté Idir.

    Je ne sais pas exactement la signification de cette inversion s’il y en a une, peut-être qu’il a seulement voulu s’amuser avec son nom en créant une sorte d’illusion sonore, comme ces images qui gardent le même sens une fois mises à l’envers. Bref ce morceau est définitivement fascinant !

  4. Pour le refrain, ne peut-on pas aussi le comprendre comme « Ecoute Solaar (et) pleure » pour confirmer l’efficacité du texte du rappeur > écouter Solaar, c’est ensuite nécessairement pleurer comme lui ?

  5. Avant tout, mille fois bravo !
    Je suis un grand admirateur de poésie et finalement, je comprends mieux pourquoi le rap me plait autant… J’ai toujours rêvé d’étudier un texte de rap comme nous le faisons avec la poésie (et surement comme le feront nos enfants dans 100 ans). Alors merci pour ce travail tout simplement énorme ! (dans les deux sens du terme :D)

  6. SolaarFan : Oui c’est vrai qu’on peut se demander pourquoi il n’a pas cité son nom complet, alors que la syllabe est courte et aisément ajustable au rythme. Je pense que l’explication la plus probable est que Solaar a voulu fondre la fin de « M’Bara » et le début de « initiale », c’est-à-dire qu’il s’est tout simplement dispensé de finir le mot, le suivant faisant déjà le taf.
    D’un point de vue plus classique ça évite aussi un effet malvenu de cacophonie par la répétition successive de la même voyelle.

    One luv !

  7. Bravo pour l’analyse poussée!

    Un vers m’a toujours intrigué dans cette chanson. C’est le vers #11: « Ci-gît Claude M’Bara, initiale MC, ».
    Je l’ai même écouté au ralenti et je n’arrive pas à comprendre exactement ce que Solaar dit. Son vrai nom étant Claude M’Barali, j’ai l’impression qu’il a inversé en studio le sens de lecture de son prénom puis de son nom. Cela donnerait: «  »Ci-gît edolC ilaraB’M initiale MC, ». Quelle en serait l’interprétation? L’homme est devenu artiste? MC Solaar est le miroir Claude M’Barali? Solaar ne veut pas citer son vrai nom?

  8. whaou!!
    joli!!
    moi aussi je la connaissais depuis un bout de temps et j’avais décelé 2-3 trucs, et je m’intéressais à trouver une analyse plus complète, mais là c’est à couper le souffle!!
    Chaque mot est pesé, et tout ça avec une musique agréable aussi d’un point de vue purement acoustique.
    En tout cas merci, c’est un sacré boulot!!

  9. Whoua!
    Alors là… Je connais ce morceau depuis que j’ai 15 ans, et jamais je ne pouvais imaginer apporter une telle profondeur à ce texte si riche.
    L’analyse reste claire, même si je pense qu’on ne peux systématiquement entrer dans une telle étude sur chaque morceau, sinon le plaisir de l’écoute laisserai la place à une réflexion constante et viendrai « gâcher » notre écoute innocente et insouciante!
    Sinon bravo, je ne pensais pas que quelqu’un pouvais porter une telle réflexion sur un morceau porteur de notre culture.
    Vivement une suite juste sur la signification du code barre au 3éme couplet!

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