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Sélections Tops

Les 10 meilleurs morceaux de 2014

Comme vous pouvez l’imaginer, ce classement a aussi fini en pugilat au sein de l’équipe. Ceci est le meilleur compromis qu’a pu trouver la rédaction de votre site favori. Il reflète l’année rap français dans ce qu’elle nous a donné de meilleur mais aussi dans sa diversité. Car notre top comporte du story-telling, de l’egotrip, des morceaux fleuves et des sons courts, de la trap et du rap à textes. Il faut de tout pour faire un monde et ce que nous vous proposons le reflète assez bien. Action.

10 – Le Savoir Est Une Arme – Dooz Kawa

« Le savoir est une arme »… Une bien belle citation qui sauva d’innombrables rappeurs en panne d’inspi. Mais alors que la plupart l’utilisent à tort et à travers, Dooz Kawa choisît d’en faire un titre. Assumant son sens, il y dénonce la falsification de l’histoire et rend hommage à ses réels défenseurs, de Snowden à Charlie Hebdo. « On assassine toujours les messagers » le pavé est lancé.

Merveilleusement prolifique depuis 2010, Dooz Kawa promène une nouvelle fois sa plume là où ça irrite et ne craint pas de faire s’effondrer quelques mythes. Alliant texte et technique, le tout sur des instrus généralement somptueuses, Dooz Kawa est une valeur sure. Et ce morceau en est la preuve incontestable.

9 – Les faiseurs d’illusions sortent des lapins morts de leur chapeau – Lucio Bukowski

Les années commencent à se suivre et à se ressembler. Encore une fois, Lucio Bukowski fait partie du top 10. Et le pire dans tout ça, c’est ce que le débat a été rude afin de savoir quel morceau figurerait dans ce classement. Égal à lui-même, le lyonnais nous régale sur ce son en étayant encore un peu plus sa pensée profonde sur une instru de Haymaker. Regorgeant de citations toutes plus pertinenets les unes que les autres, Lucio finit par être au-delà du rap engagé pour faire de l’art engageant.

Lire aussi : la chronique de L’Homme Vivant et les 5 films de Lucio Bukowski.

8 – 1435 – Abdallah

Un sample de Strange Fruit de Billie Holliday chanté par Nina Simone. Le morceau démarre bien et au fil de l’écoute, on se rend compte qu’il se transforme en son fleuve. Impossible de le résumer en quelques mots tant le texte est dense mais impossible aussi d’en décrocher quand la touche lecture a été enfoncé. Abdallah a signé son meilleur morceau et on ne peut qu’être curieux de ce qui va suivre pour lui. Et pour les curieux, 1435 était l’équivalent de l’année 2014 sur le calendrier musulman.

7 – André – Guizmo

Sept minutes et cinquante-neuf secondes pour un morceau qui porte le prénom le plus porté pendant l’année 1952. Autant dire qu’il ne partait pas forcément gagnant. Et pourtant, sur une prod’ portée par une voix lyrique envoutante, Guizmo se révèle et propose probablement le meilleur morceau de sa jeune carrière. Entre auto-critique et analyse sociétale d’un coin de rue, il balance une avalanche de multi-syllabiques, d’assonances et d’allitération. Le pari était risqué, il aurait pu perdre 99% des auditeurs avant la fin du son mais le compteur Youtube a dépassé le million de vues et c’est franchement mérité.

6 – Yes Mani – La Smala

La fête, l’alcool et les plaisirs simples sont le fil rouge du morceau. Émetteur d’énergie et de folie douce, Yes Mani est une cacophonie absurde intemporelle, et ça déboite. Rythmés par les claps et les snares, chaque artiste amène un texte sans trop de fond mais qui résonne dans les têtes avec de nombreuses multi-syllabiques autour d’un refrain sans queue-ni-tête. Folie et Carpe Diem sont les maitres mots, assemblés en une seule expression : « Yes Mani ! ».

Lire aussi : la chronique de Un Murmure Dans Le Vent.

5 – Shoote Un Ministre – Vald

Oubliez le politiquement correct, Vald l’a envoyé au sous-sol avec un coup de pied au derrière. Véritable Ode à la haine du dirigeant, du ministre et autre élite, le message est claire : tu veux te défouler ? Ne t’en prends pas aux innocents, shoote un ministre, tu auras plus de chances de viser juste. Thèse placée évidemment sous le signe du second, voire, du troisième degré, mais le morceau reste cohérent et propose un discours plutôt lucide et limpide sur le système.

Lire aussi : La chronique de NQNT et l’interview de Vald par Le Bon Son.

4 – Chargé – Kaaris

On vous voit déjà lever les bras et hurler au péché originel. Kaaris en quatrième position ? Et pourquoi pas ? Un putain de gros gimmick, une présence et un charisme hallucinant ont suffit à caler Chargé dans les morceaux de l’année. Et le morceau porte bien son nom car chargé, il l’est. La production prend une place monstre pendant que le torso-nudiste de Sevran enchaine les phases d’anthologies en invitant pêle-mêle Marine Le Pen, Myke Tyson et Materazzi. Impossible de ne pas le garder dans notre top 10.

3- N°02062014,2 – L’animalerie

Les morceaux filmés aux allures de freestyles c’est bien le fonds de commerce, non commercialisé, de l’Animalerie, et ce depuis longtemps. Mais celui-là en a estomaqué plus d’un, chez nous ça a tourné en boucle pendant 10 jours consécutifs. Deux prod’s et onze artistes pour un envoutement de 9 minutes entre deux univers aussi parfaits qu’ils sont différents l’un de l’autre. Un pur produit lyonnais qui prouve une fois de plus que Paris n’est pas la seule ville digne du rap français. Grosse pensée pour Vald qui a présenté un couplet si technique qu’il aurait réveillé George Brassens, Raymond Devos et Pierre de Ronsard.

2 – 99% – Asocial Club

L’Asocial Club est énervé. Leur album Toute entrée est définitive aura clairement marqué la scène du rap français cette année. En plus d’être une véritable leçon de flow, 99% se veut critique aiguisée de ce milieu complexe et tordu, envoyant ci et là de judicieux pics à certains MCs très cons qui sauront (ou pas) se reconnaître. En quelques mots, ces cinq minutes trente d’orgasme auditif sont un subtil mélange homogène entre une prod’ frémissante et des lyrics plus chargées qu’un neuf milli. Profusion de voix et de rage, explosion de saveurs: une fois encore, Al, Casey, Vîrus et DJ Kosi déploient leur talent au-dessus de la planète du rap français.

Lire aussi : la chronique de Toute Entrée est Définitive et l’interview de l’Asocial Club par Le Bon Son.

1 – Wolfgang – Lino

Lino a annoncé son retour et n’a pas fait dans la dentelle, Wolfgang est pour nous le meilleur morceau de cette année. Le moins qu’on puisse dire est qu’il n’a pas perdu sa précieuse verve avec laquelle il écrase, à coup de rimes, les détracteurs du rap. Grâce à la référence au célèbre compositeur Autrichien, Lino s’auto-sacralise maitre des arts, sorte de Parthénon du rap au milieu des ruines. Le fond est toujours alarmiste et il le revendique : l’ange déchu du système nous enlise dans sa flaque d’encre funeste. Album annoncé pour janvier 2015.

Lire aussi : l’interview de Lino par Le Bon Son.

Sélections Tops

Les 10 meilleurs Eps/Mixtapes de 2014

Parce que les mixtapes et les EPs font dorénavant partie intégrante du paysage du rap français, nous avons décidé de rendre hommage aux dix projets qui ont le plus marqué la rédaction cette année. Après deux bonnes semaines de batailles intenses et de parlementations, nous sommes en mesure de vous proposer notre classement 2014. N’hésitez pas à réagir si vous pensez que nous avons oublié vos rappeurs préférés. Bonne fin d’année !

 10 – Alph Lauren – Alpha Wann

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C’était sûrement l’un des rappeurs qu’on attendait le plus au tournant en 2014. Alpha Wann de 1995 sortait son premier solo et les détracteurs avaient déjà sorti le sniper pour frapper au moindre faux-pas. Sauf que de faux-pas, il n’y a pas eu. Huit très bons titres pour une grosse demi-heure de flow chaloupé et de placements complexes comme seul le jeune noir à lunettes sait le faire. Une vraie confirmation.

A lire aussi : l’interview d’Alpha Wann et la chronique de Alph Lauren.

9 – Selecao 2 – Zekwe Ramos

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Pour qu’il se passe une année sans Zekwe Ramos dans les tops de fin d’année, il faudrait sûrement qu’il ne sorte rien de janvier à décembre. 2014 ne fut pas une de ces années-là et sa mixtape Selecao 2 n’a fait que confirmer l’incroyable talent de l’enfant du 91. Dix-neuf titres, des featurings à n’en plus finir et une sensation de tenir là un artiste bien à part. Un maestro.

8 – L’Orgamixtape – Alkpote

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Encore un mec du 9-1 dans ce top 10. Le rappeur au vocabulaire le plus étendu du game est revenu en 2014 pour nous offrir ses textes léchés et ses nouvelles inventions lexicales autour de la bite, du cul et des seins. Et bien comme d’habitude, Alkpote a frappé juste. Un subtil mélange de grosses punchlines, d’instrus carrés et de name-dropping à n’en plus finir. Bref, une mixtape qui vous donnera à coup sur le sourire.

Lire aussi : la chronique de L’Orgamixtape et l’interview d’Alkpote par Captcha Mag.

7 – Phases B Volume 2 – Phases Cachées

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On ne va pas nier qu’on aime beaucoup le crew parisien de Phases Cachées à la rédaction. Alors quand ils sortent un projet, on est heureux. Mais quand en plus, il est saupoudré d’une véritable flopée de featurings, nous sommes aux anges. Phases B Vol.2 réunit tout ce qu’on aime chez eux. Du groove, des flows différents mais excellents et une alternance entre sujets sérieux et ambiance mongole. Mentions spéciales pour Crossover, J’Délaisse le Fitness, Peng Peng et Diplomatico. Vivement l’album en 2015 !

6 – Sheygey Vara – Gradur

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C’est le gros manque de la rédaction cette année. Si vous tapez Gradur dans la barre de recherche, vous ne pourrez que constater qu’on est passé complètement à côté du nouveau phénomène du Nord. Ce n’est pas par dégout ou volonté mais c’est un fait, on n’a quasiment pas mentionné Gradidur cette année. Le tort est réparé puisque sa mixtape Shegey Vara entre dans ce top 10 grâce notamment à des sons comme Tractions ou Négro qui ont bien failli s’immiscer dans le top 10 des morceaux. Et pour tous ceux qui pousseront des cris de vierge effarouchée, Gradur est sûrement le rookie de l’année. Que ça vous plaise ou non.

5 – Seigneur – Lomepal

lomepal seigneurLomepal était aussi attendu au tournant de 2014. Essai transformé et avec seigneurie. Cet EP, aussi sombre que complexe, fait la part belle au réalisme ambiant. La force des thèmes travaillés et les collaborations idéalement choisies font de ce projet celui qui révèle le plus notre homme pâle parisien. Découvert il y a trois ans, son talent ne cesse de s’affiner et prouve une fois de plus la qualité d’un rap français plus précieux dans les textes comme dans les images.

Lire aussi : l’interview de Lomepal et la chronique de Seigneur.

4 – Un Murmure dans le Vent – La Smala

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La Belgique est venue placer son grain de sel dans notre bon vieux rap game. La Smala a encore frappé. Cela fait longtemps qu’un groupe indépendant à 100% n’avait pas allié quantité et qualité avec autant de virtuosité. Après avoir été “là là” 3 fois, les cinq compères nous servent un 8 titres complet, diversifié et plus authentique que leurs anciens projets. Un EP qui vient confirmer leur créativité et leur talent incontestables et qui contient l’une des perles de l’année, le bondissant Yes Mani.

Lire aussi : la chronique de Un Murmure Dans le Vent.

3 – L’Homme Vivant – Lucio

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Lucio par ci, Lucio par là. C’est sûrement ce que vous vous dites mais ce n’est pas à nous qu’il faut s’en plaindre. Allez porter vos doléances au génie lyonnais, c’est de sa faute à lui s’il est si créatif. Donc oui, Lucio est troisième avec cet Homme Vivant. On le suit dans ses déambulations spirituelles entre arrogance et véhémence. Qu’il continue à ce rythme et le lyonnais va finir par devenir un incontournable de la chanson française contre son gré. Bref, toujours aussi chaud le Lucio.

Lire aussi : la chronique de L’Homme Vivant et les 5 Films de Lucio Bukowski.

2 – Rien – Odezenne

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Les trublions de Odezenne n’ont pas raté l’occasion de se faire remarquer en 2k14. Comme toujours, ils ont étonné, détonné. C’est leur manière de faire : une poétique de la subversion, du délire, du non-sens. A travers les cinq textes qui composent ce trop court ouvrage, on retrouve alors les caractéristiques du rap d’Odezenne comme les voix suaves et la frénésie des mots, la douceur musicale et ses judicieux changements de rythmes. De plus, on découvre cette saisissante faculté qu’ont les rappeurs du groupe à mettre des images sous les yeux de l’auditeur. Nouvel hors-piste musical, Rien entraîne donc l’auditeur dans des territoires inconnus et continue, cependant, de suivre les grandes lignes de l’œuvre « odezienne ». Entre désir du goût et goût du désir, on prend plaisir à écouter cet EP qui annonce, nous l’espérons, une suite tout aussi fantasque et envoûtante à l’œuvre d’Alix, Jaco et Mattia.

Lire aussi : la chronique de Rien.

1 – NQNT – Vald

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Fidèle à son personnage, Vald continue de n’en avoir rien à foutre. Et même s’il sort un EP prêt depuis plus d’un an, ça ne lui empêche pas de signer l’un des meilleurs projets de l’année 2014 en se payant plusieurs belles polémiques notamment avec le titre Autiste. Maintenant, on attend un vrai album.

Lire aussi : la chronique de NQNT et l’interview de Vald par Le Bon Son.

Sélections

[Edito – Spécial Coupe du Monde] Le 11 français des meilleurs MCs

Quel est le principal point commun entre le rap et le football ?
Ceci n’est pas une blague. On aurait aimé pourtant balancer une chute digne d’un carambar 90’s : celle de la bonne boutade qui faisait non moins rire pour le fond mais parce qu’elle nous venait d’Yves du 56, précédant la génération des « défis barrés » qui a provoqué tant de coups de vieux. Non, ce ne sera pas de cet ordre-là pour répondre à la question posée : aujourd’hui, le thème, c’est la profondeur. Carton rose. (suite…)

Sélections Tops

2013 en un album et un morceau (par 13 membres de la rédaction)

Le choix d’Abder :

La Rumeur – Les inédits 2

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« Tu m’trouveras plus au tieks sauf pour les enterrements, j’ai plus rien à y foutre j’te le dis sincèrement… » Ekoué, Hamé, Le Bavar, trois Mcs, trois parties, des cigares cohibas, du Gabin : vous êtes bien chez La Rumeur. Elle continue de se propager aux travers des albums du groupe (Tout Brûle Déjà le dernier en date), mais n’a pas fini de s’étendre. Au lieu de nous balancer un maxi bidon comme plusieurs groupes déjà bien installés s’en seraient contentés, La Rumeur va nous chercher ses millésimes et autres grands crus jamais dévoilés. Inutile de vous dire que votre soif va rapidement être étanchée. Malgré un Hamé un peu moins étincelant que sur les précédents volets (mais pourtant très bon- c’est dire le niveau), les Inédits 2 sont pour moi l’incontournable de l’année 2013, grâce à un Ekoué en état de grâce et d’un Bavar qui n’en finit plus de jouer des coudes. Musicalement, les mélancoliques de L’ombre sur la mesure ne seront pas déçus, et les aficionados du Coeur à l’outrage y trouveront leur compte. Incontournable.

Lucio Bukowski & Tcheep – Impopulaire – De la survie des fauves en terre moderne

Impopulaire

 « Pose le B-le U-K-O-W-S-K-I, débridé comme Henri Michaux sous mescaline« …Et dieu sait que le Mc de L’animalerie paraît sous drogue hallucinogène. Lucio, réputé pour être un mc littéraire est à mon sens bien souvent sous-estimé en terme d’egotrip. Pourtant c’est un style dans lequel il n’a plus à faire ses preuves, que ce soit dans son Ep précédent avec Mani Deïz (Marvin Hagler avec un mic) ou dans le freestyle d’anthologie N°18012013. Une fois de plus les punchlines pleuvent, le beat de Tcheep est transcendant et la subversion du rappeur est sans équivoque (« Nique Canal, Sky’, Technikart et Oliver Cachin » / « à force de niquer vos races j’dois pratiquer la guerre ethnique »). Au-dessus de François Hollande en terme d’impopularité comme son titre l’indique, Bukowski cherche juste à rester ce  « meilleur anonyme » qui défonce de la célébrité à tour de mic. Il n’y a qu’un animal pour survivre en terre moderne.

Le choix de Léonard :

L’or du commun   – Fayçal

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Troisième opus d’une des œuvres les plus cohérentes du rap français, L’or du commun est un habile concentré de poésie. Mûr et assuré, il vient confirmer tout le bien que l’on pensait de Fayçal et de son écriture si particulière. L’orfèvre girondin y rappe avec justesse et vigueur, au rythme d’une scansion précisément cadencée sur la mesure, la complexité d’un monde en proie notamment aux valeurs libérales et individualistes de l’époque. Si différents beat-maker (Vista Prod, Dj Yep ou encore Noname) constellent les pistes de l’album et que de nombreux intervenants accompagnent le rappeur (C-Sen, Nasme, Demi-Portion, L’indis, Mysa.) l’ensemble parvient cependant à conserver une véritable unité de ton ainsi qu’un univers artistique toujours aussi singulier. Œuvre subtile et raffinée, il paraissait donc inévitable pour nous de saluer ce petit bijou du milieu indépendant qui a réjoui la plupart des amateurs de rap en cette année 2013. Pour ceux qui auraient loupé le projet, n’hésitez plus : C’est de l’or en barre !

 Renaissance  – IAM – …IAM

C’est au soir d’une œuvre singulière et imposante que le clan phocéen a publié en Novembre 2013 sa dernière pépite : « …IAM ». Au terme de cet ultime opus, les rideaux se tirent sur une magistrale Renaissance, morceau épuré et feutré, qui croque avec tendresse les années d’hommes et de rappeurs qu’a pu constituer l’aventure musicale du groupe. A l’image des nombreux titres emprunts de nostalgie dans la discographie d’IAM, ce dernier coup d’éclat sonne comme une véritable hymne au rap et à la vie d’artiste. L’occasion pour nous de rendre hommage aux mythiques compères marseillais qui osent conclure leur pharaonique entreprise rapologique sur une renaissance. C’est tout un symbole.

Le choix de Pauline :

Rocé – Gunz N’ Rocé

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S’il fallait retenir un album de l’année passée en ce début 2014, l’attention se portera selon moi sur Rocé et son désormais classique Gunz n’ Rocé sorti en mars. Le rappeur du Val-de-Marne est revenu avec un quatrième album et ce n’était pas pour plaire à ses détracteurs. Rocé, en mêlant comme à son habitude complexité du verbe, pertinence de l’analyse politique tout se positionnant explicitement à contrepied des travers de son milieu musical, prouve qu’il est capable – pour la quatrième fois – de nous livrer un album de génie. Contrairement aux artistes qui peinent à faire exister leur talent dans la durée, Rocé fait partie de ceux qui, à l’instar des rappeurs de La Rumeur comme Hamé ou Ekoué, parviennent à pérenniser leurs acquis artistiques, sachant les faire évoluer, sans jamais régresser. Gunz n’ Rocé, beaucoup l’ont qualifié de « moins bon » que son désormais classissime Identité en crescendo, en vérité Rocé ne fait que confirmer sa technique au travers d’un album certes plus « punchlines » que les précédents mais toujours dans la perspective de soigner le contenu : « en apnée je monte à la surface pour décrire/ tellement rien à dire/ là-haut toujours le même délire/ on a rien raté mais le pire/ comment te le décrire/ ce que les MCs appellent punchlines ce que j’appelle écrire » (En apnée) . En bref, le meilleur cru de 2013. On retiendra le magnifique hommage rendu dans Magic à DJ Mehdi, qui rappelons-le avait fait émerger le rappeur au début des années 1990 en l’intégrant à son bel Espion.

Mon café préféré – Sidi O – Borderline

Un son surprenant et imprégnant de cette année 2013. Pourtant, rien de bien surprenant dans ce qui sert de base au MC pour nourrir son inspiration : son café préféré, ce lieu de sociabilité populaire que le sens commun désignerait comme populeux, qu’on imagine aux alentours de Marcadet-Poissonniers, ou au détour d’une rue de La Chapelle, où s’entrecroisent les mêmes destins parfois pendant vingt ans, entre les habitués et les clients passagers, ou se décortiquent les dernières frasques politiques et les histoires personnelles autour d’un café ou d’un whisky. Avec beaucoup d’humour et une finesse littéraire implicite, Sidi O nous transmet parfaitement l’ambiance de ces cafés du peuple  que l’on connaît tous, entre histoires de vie tragiques et rêves formulés à voix haute, en passant par les commentaires désabusés sur le quotidien. Une sorte de Brèves de comptoir mélancolique sur ces instants saisis à la faveur d’un morceau de rap. « Dans mon quartier préféré, y a des raclos qu’ont l’œil crevé/ y a des cadres au chômage, du vice des meufs paumées/ qui te parlent de govas avec les jantes chromées / un keuf qui prend d’la cess et rêve de s’jeter sous l’tro-mé. » Mais loin d’utiliser un ton condescendant, la force de ce morceau qui apparaît à première vue superficiel, c’est bien réussir à démontrer le tissu social qui émane de ces lieux « y a d’la richesse à revendre dans mon café préféré/ d’la tristesse dans mon café préféré/ on discute et on croise des inconnus / et on repart tous les jours, on scrute toujours le même regard/ ouais ça vit, hein, dans mon café préféré », non sans une touche d’humour parfois : « ça fait mille ans qu’le barman a la même blague » ou « on parle du PSG on s’prend pour Pastore/ dans un café qu’a jamais été restauré ». Mon café préféré, ça aurait pu être Mon bistro d’en face ou Ma voisine de palier , en bref, un son qui te donne l’étrange impression de l’avoir déjà vécu.

Le choix d’Aleko :

Yoshi – Hip Hop Momo

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Recette du cocktail de l’année 2013 :

Ingrédients :

Une base d’instrus old school
Quelques instrus digitalisées
2/3 riddims de reggae/roots
Une touche de beat-box
Des gros scratchs
Des lyrics variées
Des flows authentiques
Des MC’s chevronnés venus de tous horizons

Préparation :

Mélangez le tout avec harmonie et vitamines. Laissez la créativité et la fantaisie œuvrer à l’ordonnancement de la tracklist. Pour le liant entre les egotrips, les morceaux conscients et les chansons festives, pensez à bien placer vos transitions et vos interludes. Gardez bien sûr le gros freestyle pour la fin afin de bien détériorer les oreilles de l’auditeur. Veillez également à ce que l’autodérision et le sens du rythme soient saupoudrés sur tout l’album. Pour finir, secouez bien et ouvrez sans attendre. Cette recette peut être servie, été comme hiver, se déguste seul ou avec des amis, dans un mp3 ou sur grosses baffles. Bonne écoute et bonne année 2014, en espérant que ce millésime 2013 sera à votre goût.

Sëar Lui-même -Droit d’asile – Big Punchliner Reloaded

« Crois-tu qu’on a pas vu tes ruses ?
Tes lyrics ressemblent à une passe
La bêtise est une tass
Toi t’es sorti de son utérus. »

 Toujours aussi intarissable en paroles et technique dans sa diction, Sëar Lui-même a sorti cette année Big Punchliner Reloaded, un 15 titres de haute volée dont la chanson pivot est sans contexte Droit d’asile.
Sur le thème de l’opportunisme des rappeurs qui vont et viennent entre rap et autres genres musicaux sans pertinence ni succès, Sëar signe ce morceau qui a marqué l’année 2013 tout en rappelant le meilleur des années 90.
Un bon gros beat bien lourd, un accord au piano et un sample, il n’en faut pas plus à Sëar pour se lancer et accrocher l’oreille. Calé du début à la fin des 3 minutes, il enchaîne les punchlines telles que : « tu crois qu’tu pèses tu rimes ? c’est bien fous toi à poil, ton leust est dégueulasse comme boire dans un test d’urine » avec la facilité qui le caractérise, pour le plus grand bonheur des tenants de l’ancienne école.
Même si certains objecteront que la formule artistique n’est pas très novatrice, ou que son point de vue recèle un certain sectarisme, il n’en demeure pas moins qu’en cette année 2013, Sëar a placé la barre très haut pour qui s’imagine que le rap est un territoire vierge et accessible au tout venant.

Le choix de Guy :

Scylla – Abysses

Il ne pouvait pas exister de meilleur titre pour cet album. Scylla nous emmène avec sa voix hypnotique dans le calme des abysses, au fond de ses pensées obscures. Dans son isolement, le monstre s’exprime entre introspection et observation du monde actuel. Ainsi, il nous raconte sa précieuse jeunesse, sa solitude, la direction religieuse qu’a prise sa vie. Mais il décrie aussi le comportement humain. Il se considère comme un résident de la caverne de Platon. Il va jusqu’à souhaiter la mort de certains pour qu’ils puissent réapprendre à savourer la vie. Le discours tenu tout au long de cette écoute est cohérent et est fidèle au personnage. Il tient notamment à respecter ses convictions premières non lucratives.

Notre rappeur francophone prouve qu’il a une belle plume, à l’instar du morceau La logique d’une contradiction étoffé d’oxymores. Son rap conscient est servi par un vocabulaire étendu et une musique efficace interprétée principalement par des violons, un piano et un beat. Cet album est noir, mais se termine sur une note de piano, qui résonne tel un espoir au fond de ce gouffre. Pour nous, l’espoir d’un nouveau disque aussi riche.

Swift Guad – Expédition punitive – Vice et Vertu

Généralement dans le rap, les chansons entraînantes n’ont pas trop de fond, voici un des meilleurs contre-exemples. Une voix gutturale, une écriture prolifique ces derniers temps, une musique rythmée et rapide à tendance arabique. Le ras-le-bol exprimé dans les paroles peut-être qualifié de vulgaire, il est vrai, mais il paraît tellement sincère et spontané qu’on l’accepte. Ce morceau est extrait du très bon album Vice et Vertu, qui a eu une sortie plutôt discrète. Toutefois ce disque va certainement refaire parler de lui, servi par la superbe réalisation visuelle du titre Vautour. Il avait fini l’année 2012 en trombe avec les Inglorious Bastardz. Il a gardé un bon rythme sur l’année 2013, et 2014 s’annonce déjà de bonne augure.

Le choix de Mandarine :

Marche Arrière – Le Gouffre

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C’est un condensé de presque tous les meilleurs rappeurs d’hier et d’aujourd’hui. Sur les 69 morceaux, il y en a 4 au maximum que je n’aime pas trop. Un exploit pour une compilation  aussi riche. On retrouve l’esprit des mixtapes d’antan. C’est également une bonne occasion de découvrir des nouveaux artistes et de redécouvrir des anciens. Une initiative, donc, à applaudir des deux mains et qui s’écoute sans nous lasser tant il y a de diversité. Indiscutablement, le meilleur album de l’année.

Saleté de rap – Georgio et Hologram Lo – Soleil d’Hiver

Il y a eu beaucoup de très bon sons cette année, mais mon choix se porte sur Saleté de rap. Une production simple et efficace, un texte justement écrit et un gimmick « Qu’est ce que je t’aime, saleté de rap » qui me parle particulièrement. Je l’ai écouté toute l’année, et pourtant, j’ai toujours le même sentiment dès les premières notes et je n’ai pas fait d’overdose.

Le choix de Jibé :

Kaaris – Or Noir

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Depuis sa première sortie, 43éme BIMA, en 2007, Kaaris a développé un personnage et un univers hors des conventions esthétiques du rap français. Image d’un homme seul contre tous, dont l’ego démesuré n’est surpassé que par sa cruauté gratuite et son habilité au micro. Or Noir, c’est l’incarnation physique sous forme de CD d’un bulldozer métaphorique, qui roule sur le rap français s’enlisant encore et encore sur les débats d’authenticité de ses acteurs et de pseudo-résistance à l’industrie. Dans un enchaînement déchaîné de punchlines imagées à la portée hollywoodienne, soutenues par les instrumentations lourdes à l’atmosphère post-apocalyptique, Kaaris et les producteurs de Therapy refondent l’image d’un rap cru, dont la gratuité des propos ne fait qu’appuyer leur dimension faussement subversive pour ne retenir qu’un divertissant défouloir, exutoire mental et physique lorsque l’on bouge en rythme en traitant ta grand-mère de prostituée.

Vald – Autiste – NQNT

Valeur montante du rap en France, le blond d’Aulnay au rap phallo-centré, adepte de substances parfois illégales mais toujours psychotropes est venu annoncer à tout l’internet son prochain projet, NQNTMQMQMB 2, avec un titre à son image. Entre morceau autobiographique et fiction horrifique, Autiste brouille les cartes et mélanges les pistes, appuyé par un clip à la hauteur de la démence du MC. Sur une instru à base de cordes et de chœurs classiques, de ricanement de jeunes filles et de roulement de snares, Vald baise le monde avec sa voix nasillarde en assassinant sa famille entre deux parties de GTA. Une bonne mise-en-bouche en attendant ce qui s’annonce comme un des gros disques de 2014.