Interviews

Une drone de polémique.

C’est le sujet qui affole la médiasphère française ces derniers temps. Les drones ! Ce sont ces engins de la peur qui survolent nos villes et nos centrales nucléaires sans qu’on sache trop qui les pilote. C’est donc le défilé des experts ès aviation qui déblatèrent comme à leur habitude sur les plateaux télé pour discuter du phénomène. Ce qu’on sait moins et ce qu’ils ne disent pas, c’est que ce petit engin volant est utilisé depuis un moment dans les clips et notamment ceux de rap français. On a donc demandé leurs avis à des réalisateurs puisqu’ils sont bien placés pour en parler.

Artik :
« Je kiffe bien le procédé mais c’est clairement une mode comme le Canon 5D quand il est sorti. Ça peut être un plus mais il ne faut pas tout miser là-dessus. Le clip de Je Me Tire de Maitre Gims est abusivement en drone, par exemple. Pour ma part, je compte m’en servir mais seulement si c’est nécessaire. »

Karim Meg :
 » J’ai utilisé le procédé une fois sur un clip de Bassirou Talibé. J’ai pris cette décision parce qu’on était sur le toit d’un immeuble avec piste d’atterrissage pour hélicoptère à Los Angeles. Je trouve ça cool à partir du moment où c’est utilisé dans un découpage spécifique. Ça doit rester un outil pour mettre en avant un lieu. »

Nicolas Bozino :
 » Ça fait surement peur aux gens parce qu’ils ne connaissent pas. On s’en sert depuis déjà quelques années mais c’est connu depuis peu du grand public. Je dis peut-être une connerie mais dans l’esprit collectif, les drones sont les avions militaires qui larguent des bombes donc quand on vient leur expliquer que ce sont aussi des appareils inoffensifs qui servent à filmer, ils ne comprennent plus rien… Pour moi, ça ne mérite pas tout ce bruit mais une grande surveillance parce qu’effectivement, les usages détournés peuvent être dangereux.

Ça reste un super outil qui nous permet de faire des plans d’hélicoptères pour dix fois moins cher. Ça apporte une nouvelle dimension aux vidéos, c’est certain. La première fois que je me suis retrouvé avec un drone, c’était sur un clip de Gaël Faye au Mali en 2011. J’ai voulu mettre tous les plans aériens dans le montage, j’étais comme un fou ! Donc oui, je m’en sers souvent mais il y a un paquet de charlatans qui l’utilisent sans savoir comment faire aussi. C’est comme à la sortie des 5D il y a cinq ans. Tout le monde était devenu réalisateur ou cadreur alors qu’il n’y avait qu’une infime partie qui savait l’utiliser. C’est pareil avec les drones. Je ne sais pas si les gens sont bien au courant qu’il faut un permis, une licence et un savoir-faire pour utiliser ces engins en toute sécurité. »

Snooz :
 » C’est comme pour le reste de l’actualité, les gens ont peur de ce qu’ils ne connaissent pas. Et les médias adorent instaurer ce climat de peur car sinon ils n’ont rien à dire. On ne voit pas un média dire « aujourd’hui rien de spécial, tout va bien. » Moi, j’utilise les drones depuis 2009 donc bien avant tout ce fouillis médiatique. La première fois, c’était pour un rappeur sans envergure qui a sans doute arrêté de rapper depuis.  »

Cleefson :
« J’utilise les drones depuis un an, pour rendre mes clips plus riches. On peut vraiment exploiter le paysage, l’image respire plus. Je comprends cette polémique parce qu’il y a des règles à respecter et qu’elles ne le sont pas. Ça risque de rendre le travail des professionnels encore plus compliqué à l’avenir. »

An7hony :
« Je suis justement en train de m’y mettre pour clipper avec. Ça commence à se répandre car les prix sont beaucoup plus accessibles. Je vais probablement me lancer sous mon nom propre en septembre avec un DJI Phantom équipé d’une GoPro. C’est un outil pro et stable. Je trouve que le drone est vraiment sous-utilisé dans les clips français. Il donne des plans beaucoup plus aériens, plus graphiques qui ne sont pas exploités. Si tu fais des séquences en voiture ou en moto, un plan de drone en poursuite c’est marquant. Pour revenir à la polémique, les médias ont peur de tout. Hier, c’était les mini-motos et aujourd’hui les drones. Il faut bien vendre du papier. »

À proposStéphane Fortems

Dictateur en chef de toute cette folie. Amateur de bon et de mauvais rap. Élu meilleur rédacteur en chef de l'année 2014 selon un panel représentatif de deux personnes.

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